Recup TRi (seul on va vite, ensemble on va plus loin)

L’association Recup Tri est née le 1er janvier1993. Tous les ans soixante dix personnes entrent et sortent de l’association. Il s’agit de redonner aux gens qui ne travaillent plus depuis longtemps goût à l’action. De les motiver. La plupart des gens qui viennent à l’association est au RSA et à la CMU. Didier et Alain que nous avons rencontrés ce matin sont respectivement directeur et encadrant à Récup Tri. Il s’agit de permettre aux gens de remettre le pied à l’étrier. Plus de 50% des gens qui sortent de Recup Tri ont retrouvé du travail en CDI ou en interim ou alors partent en formation. Le maître mot de l’association, c’est la confiance : Faire confiance, donner confiance, avoir confiance en soi.

Didier suit les gens sur les chantiers qui apprennent au jour le jour les différents aspects du métier du bâtiment. Au début de chaque embauche à l’association, les personnes (hommes et femmes) sont initiées à la polyvalence. Les ouvrier-e-s sont formé-e-s dans différents domaines. On peut être à la fois plaquiste et soudeur…

Sur la cité des Provinces, le partenaire de Recup Tri est l’entreprise Bouygues qui rénove toutes les maisons du quartier. C’est le PLI (pôle local à l’insertion) qui mis en relation Bouygues et Recup Tri sur ce chantier, après un appel à candidatures. Pour Alain et Didier, il est essentiel que les ouvrier-e-s de l’association soient directement en contact avec des ouvriers qualifiés qui travaillent dans une grosse entreprise. Pédagogiquement cela a un effet déterminant. Les gens réapprennent au contact des autres les réflexes et le rythme du travail. En général, précise Alain, c’est une découverte pour les uns comme pour les autres. Les gens apprennent à se connaître par le travail et cela est bénéfique pour tout le monde. Les un-e-s sont fiers de faire passer leur savoir faire et les autres sont fiers de la confiance qu’on leur accorde et retrouvent les joies du collectif, et l’estime de soi.

Recup Tri 2

C’est un retour progressif dans la vie active. Certaines personnes n’ont jamais travaillé de leur vie. Les gens qui viennent à Récup Tri restent entre 7 mois et 24 mois. En moyenne, il sortent au bout de 9 mois car ils ont retrouvé un travail qui leur plaît. Les gens sont guidés dans leur recherche de travail par des conseillers en orientation qui travaillent pour Récup Tri et aident les personnes en fonction de leur désir et du marché du travail. Il faut savoir, nous dit Alain, que certains ont connu des chutes vertigineuses (socialement, individuellement) et qu’ils supporteraient difficilement que ça recommence une deuxième fois. Il faut que l’association soit à l’écoute de ses travailleur-e-s, pour ne pas commettre d’erreur d’aiguillage. La suractivité, la polyvalence des gens dans l’association permet à chacun de découvrir des métiers et de choisir à bon escient. Pendant le temps de leur présence à Récup Tri, les gens se retrouvent dans beaucoup de corps de métier différent. Quand les gens arrivent à Récup Tri ils font des semaines de 26h, et puis de semaine en semaine, cela va évoluer pour arriver à 35 heures. Chacun-e- retrouve au fur et à mesure un rythme de vie normale. Alain et Didier nous disent qu’il est faux de penser qu’il faut être qualifié pour trouver du travail, tous les deux nous disent que ce qui compte le plus, c’est la confiance et être motivé.

L’association dispose d’un encadrant pour cinq personnes. L’association est à but non-lucratif donc l’argent est systématiquement réinvesti dans l’achat de matériel et l’embauche de nouveaux encadrants.

Pour Alain et Didier, l’insertion est une vocation. On devient militant de  l’insertion vers 40 ans quand veut changer de métier, bifurquer. Les gens travaillent en moyenne sept ans à Récup Tri ou dans l’insertion en général. Alain et Didier voulait travailler dans le social après avoir passé des années dans l’industrie.

Cloclo au Cosmos

Isabelle Bichon a participé dans son enfance à grand nombre d’activités de la Cité des Provinces :

  • les jeux dans le champ, elle prenait une couverture pour s’y installer et jouait dessus ;
  • les mercredis, tous les mercredis à l’époque, elle les passait avec l’Amicale ;
  • la Ducasse annuelle du 11 ;
  • et surtout, un de ses moments de gloire, les spectacles de danse au Cosmos, où elles apprenaient les chorégraphies de Claude François. Aujourd’hui, c’est son tour d’être « chorégraphe de la connerie » pour présenter des shows burlesques aux personnes âgées avec qui elle travaille. Peut-être qu’elle aurait dû faire clown dans un cirque pense-t-elle à voix haute.

Avant de partir, on lui demande de photographier les photos du spectacle de danse, qu’elle garde bien en vue dans son salon.

Mémoire, présent, questions.

Didier et Marie n°3 se posent des questions sur la mémoire.
La mémoire qui reforme les souvenirs de façon légèrement différente à chaque fois qu’elle les réactive.
Marie n°1 se pose des questions sur l’instant présent.
L’instant ne peut il pas être toujours présent si l’on pense à lui alors qu’il vient d’être passé?
Guy cherche des surnoms emblématiques pour chacun d’entre nous.
Il récite également quelques vers de poésie.
Didier se demande s’il y a du citron ou de l’anis étoilée dans la recette du poulet ce midi.
Lucien se demande où serait le café  dans cette cité, s’il y avait un café.
Parfois, certaines réflexions entendues au QG, dans l’une ou l’autre bouche, poussent à se demander si l’on passe ou non un jour à l’âge adulte.
On pense et on rit bien.

Les gîtes de l’Ecole Buissonière

On ne vous a pas encore montré les gîtes d’Elsa et Pierre.

C’est dans celui-ci que Martine et Didier nous ont montré leur petite forme. Il y a donc de la place pour 17 sans compter les terrasses du bas et du haut.

Celui-là on peut le déplacer où on veut. Il a déjà mille projets à venir dans la tête de ses propriétaires. Et on se disait ce midi que ce que l’on projette existe peut-être déjà un peu.

Deux guerres et une bataille

Pierre m’a expliqué hier: en 1914, y’avait les corons. Tous détruits. L’église aussi, détruite: les obus. Ils ont tout reconstruit, mais ils ont fait des cités pavillonnaires à la place. Les mines étaient puissantes, elles se sont fait plaisir: y’a pas deux maisons identiques. Elles ont toutes une particularité. L’église a été reconstruite puis détruite à nouveau. C’est pour ça que si on regarde la cité des Provinces, de haut, on voit voit encore le dessin du plan de l’église, entre les deux écoles.

En 1945, tout était à l’arrêt. Le gouvernement de l’époque a demandé aux mineurs de faire un effort supplémentaire pour extraire cent mille tonnes de charbon par jour, de travailler le dimanche, pour sortir le pays de la guerre et amorcer la reconstruction.

Un Dimanche de portraits. Marie L.

Dimanche, mon premier jour de Portraits dans la cité des Provinces. J’accompagne la compagnie HVDZ chez les habitants, dans un porte à porte caméra en main pour tourner des séquences du film-spectacle. Pas de porte, photos d’objets, portraits chinois et citations deviennent prétextes à la rencontre, autant de protocoles qui, une fois montés, raconterons quelque chose de l’histoire de la cité. Si la caméra fait peur à certains, nous sommes toujours bien accueillis, peut-être la légendaire amabilité des gens du nord ? On nous invite à manger une tarte aux myrtilles, succulente, on nous souhaite bon courage, on nous répond, on nous raconte, toujours avec plaisir. Certains sont très à l’aise devant la caméra, et n’hésitent pas à nous en raconter plus, leur vie d’avant, d’aujourd’hui, ce qui leur manque, ce qui leur plaît.

Pour nous, pas de peur de la caméra (nous sommes du bon côté), mais une peur des chiens. Surtout après avoir été poursuivis par un gros chien aboyant. Mais tout va bien, on referme la grille d’entrée à temps.

Bref, je suis venue pour rencontrer des gens, les habitant d’ici et de là, je suis servie. Je suis venue entendre des histoires, j’en entends à foison. Et puis, il y a des pépites, de belles phrases prononcées par des habitants…

Il y a…

A la cité des provinces,

il y a un city-stade,

il y a de belles écoles,

il y a Armelle qui a trouvé un obus dans son jardin,

il y a des maisons rénovées, des maisons qui seront rénovées, des maisons fermées,

il y a la rue Léon Blum et ses commerces,

il y a les gites d’Elsa et Pierre,

il y a de la neige ce matin sur les terrils,

il y a des gens qui dressent leurs chiens sur le stade le dimanche matin,

il y a l’anniversaire de Jérémie,

il y a les jardins des cités-jardins,

il y a des briques, des briques et des briques,

il y a les belles chaussettes de Marie sur le radiateur,

il y a les très bons plats que The Sisters’Canteen nous préparent tous les midis,

il y a Récup’tri qui font un super boulot  dans le cadre de la réinsertion des personnes au R.S.A.,

il y a beaucoup de chiens, des petits, des gros, des gentils, des moins gentils,

il y a Mr Gapa et sa Harley Davidson,

il y a M. et Mme Petit et leurs enfants qui nous ont fait un café fort, et avec qui ont a bu une « Fée Torchette »,

il y a 3 Marie(s) dans l’équipe et ça nous perturbe,

il y a Guy qui mange tout le chocolat,

il y a la joie d’être là,

il y a un amour des habitants pour leur cité,

il y a une nostalgie dans l’air,

il y a une volonté de réveiller la belle endormie comme dit Didier,

il y a Cartoon’s qui s’occupe des enfants le mercredi après-midi,

il y a la danse à l’amicale, le Karaté et le tir-à-l’arc aussi le samedi

il y a des pigeons bleus, il y a des pigeons gris, il y a des pigeons blancs mais les colombes, ça n’existe pas selon les colombophiles…

il y a un American staff qui a failli nous manger en porte à porte,

il y a eu la peur, la peur et la re peur et la joie d’être en vie voire entiers,

il y a Damien qui ne quitte pas son sweet capuche Culture Commune,

il y a Lucien qui a un look de communiant aujourd’hui mais personne n’est dupe,

il y a des priorités à droite à tous les coins de rue,

des sens interdits, des impasses, des voies uniques, des rendez-vous manqués, des faux horaires de train, des rues qui se croisent,

il y a Guy encore qui divague,

il n’y a plus de yoga du rire, c’est interdit à la compagnie,

il y a la déception et la frustration de certains membres d’HVDZ qu’on brime plus souvent que les autres,

il y a Martine qui monte, qui monte, qui monte…quand redescendra t-elle?

il y a toutes les petites formes que nous voulons offrir aux habitants,

il y a les blagues de Didier,

il y a Mourad qui danse dans le vent glacé,

il y a notre Q.G. au 11, rue du lyonnais.