plus belle la vie-carnets de route-

Aujourd’hui et demain on fait des enchaînements. Plein d’enchaînements. Frantz sera là pour régler les éclairages et les problèmes techniques. On ne sera pas trop de deux à la technique. Demain soir la troupe se disperse. On peut dire que le stage qu’on a fait avec Le Pavé a été très utile. On voudrait continuer. Aller travailler chez eux en Bretagne. Et on va organiser d’autres formations au sein même de la compagnie. Ouvert à tous, évidemment. On va commencer avec un professeur d’économie politique. Et puis on voudrait rencontrer Toni Négri. Ou quelqu’un qui connaît bien Toni Négri et nous enseigne sa philosophie. C’est ce que Le Pavé appelle le savoir froid. Le savoir chaud, c’est tout ce qu’on apprend par expérience. Par exemple, tout ce qu’on ne saurait pas si nous n’avions pas fait les Veillées. Une autre façon de faire de la politique. On a passé des heures là dessus ces derniers jours. On est revenu sur de nombreuses histoires qui nous sont arrivées pendant les Veillées. On a relié chaque anecdote à un savoir froid. C’était aussi le but des Atomics, réfléchir, discuter, interroger notre présence dans les villes et les quartiers pendant toutes ces années. Nous ne l’avions jamais fait. Nous ne nous l’étions jamais autorisés. On a beaucoup de chance d’être à la Fabrique. On dispose de deux salles. Les danseurs ont travaillé dans une salle. On se réunissait dans l’autre. Et Howard prenait les danseurs quand il en avait besoin. Pour régler les chorégraphies du spectacle. On a bien avancé. Howard retourne à Montréal ce matin. Il revient le 12 janvier 2011. Un peu avant les représentations des Atomics à la Fabrique. Sandrine rentre de Stavanger demain soir. Olivier hier était à Fresnes pour suivre les jeunes artistes de la compagnie Porte 27 qui sont en résidence à la prison de Fresnes.

howard part demain-carnets de route-

On arrête vendredi soir la répétition. On avait prévu jusque samedi midi. Mais on arrête vendredi soir. Hier on a célébré le départ d’Howard qui reprend l’avion demain matin pour Montréal. Il a fait un boulot énorme. C’est géant. On a de la chance de pouvoir travailler avec lui. On s’était rencontré en deux mille un. Au cours d’une rencontre organisée par l’école de cirque de Châlons en Champagne et L’école de cirque de Montréal. Fred Arsenault  avec qui on a travaillé par la suite pendant huit années a participé à ce stage. Il vient de créer la compagnie Un Loup pour L’homme avec Alex Fray et s’apprêtent à faire un deuxième spectacle. Howard part demain et il va nous manquer. Depuis longtemps les gens vont et viennent à la compagnie. Certains ont le désir de rester plus longtemps et d’autres fabriquent des projets personnels. Parfois on a le désir d’une vie plus stable parce que  cette vie là est difficile à combiner avec des enfants. On y arrive mais ça demande des trésors d’organisation. Et à l’intérieur d’un groupe, ça n’est jamais des plus simples. C’est normal. C’est la vie. Mais on se disait encore hier que les gens qui quittent les compagnies n’y reviennent jamais ou rarement. Frantz a trouvé un emploi stable dans un grand théâtre près de chez lui. En Normandie. Il s’en va bientôt. Hier on est revenu sur nos anecdotes de Veillées en tentant d’y mêler le savoir chaud et le savoir froid. On a dit pour la phase 6 des Atomics, en 2015, on aura peut être tout dit. Tout raconté. En 2015, je ne serai plus là. On a du mal à se faire à l’idée que c’est possible et fortement probable. En 2015, je ne serais plus là. A la recherche de l’avenir perdu.  Marcher le plus loin possible, le plus longtemps possible pour trouver l’avenir perdu. T.Piasecki nous a envoyé un merveilleux mail d’analyse et de synthèse du filage qu’il a vu samedi dernier. Toute la troupe l’a lu. Et nous tenons compte de ses remarques pour la suite du travail. Howard prend l’avion demain à 11h. Aujourd’hui, on va beaucoup danser et revoir comment, dans le spectacle, on va raconter nos histoires, nos rencontres pendant les Veillées.

hi hi-carnets de route-

On a pensé qu’on pouvait fondre les deux rubriques, carnets de route et Labo 12/2010 en une seule. Faut le faire d’ici à la fin de la semaine parce qu’après chacun retourne chez soi pour faire ses achats de noël (hi hi), et retourne chez les siens. Pour les fêtes de noël. La troupe est dispersée aux quatre coins du pays et du Québec. Il y aura de la neige à Noël (surtout au Québec). L’autre jour, des gens au village me disent, on ne comprend pas bien ce que vous faîtes… Vous êtes des bohémiens… Vous faîtes du porte à porte (pour les Veillées) comme les bohémiens… Et vous allez d’un endroit à un autre… Oui, je dis, je suis souvent sur le terrain... Mais tout de même on ne vous voit pas beaucoup dans votre jardin (hi hi)... Je pense qu’il y a quelque chose de très vrai là dedans. Entre le malentendu  (de leur part) et l’habitus clivé (de mon côté). Plus vraiment de quelque part et pas vraiment d’ailleurs. Même si je veux donner l’impression que c’est un métier comme un autre. Et puis , à un moment mais avec l’âge, vous n’avez pas eu envie de faire un métier normal. Quelque chose de sérieux. Tout cela évidemment n’est pas faux. Ce serait trop simple. De penser que c’est faux. La réalité est ambiguë. Profondément ambigüe. Je fais un travail de service public qui n’en est pas un, véritablement. Compliqué. Et la représentation commune de l’artiste n’a rien à voir avec ce qu’on fait dans les Veillées.

partout-carnets de route-

On a regardé la vidéo de l’enchaînement. Ne pas oublier de l’envoyer à Frantz à Rouen pour lui donner des idées d’éclairage. Sandrine s’en va en Norvège. Ce soir à Lille au Grand Théâtre du Nord, il y a une grande réunion, qu’est ce qui ne va pas dans la culture? On se pose la question tous les jours. Chaque jour qui passe on se demande comment on pourrait faire pour que ça change. Une boîte à outils au service de tous et pas une autre manière de se hisser dans la hiérarchie sociale qui ne profite qu’à quelques uns. Ceux qui ont déjà tout. Penser la culture de façon à transformer la société. C’est là dessus qu’on s’interroge tous les jours. C’est dans cette direction qu’on mène nos recherches actions. Avec parfois bien des difficultés comme en ce moment avec les Atomics. Mais ça va le faire. Pas de raison que ça n’aille pas. On a une heure qui tient la route. Ensuite on pourrait dire qu’on manque de spectaculaire. Chaque chose en son temps, il nous reste une semaine. Et c’est la Phase 1 des Atomics. Qui appelle une Phase 2. On pourrait aller jusqu’à huit si on prend le décompte de la danse. Puisque ça mêle cirque danse théâtre et vidéo. Howard, le chorégraphe s’en va jeudi matin. Hier on se demandait si la compagnie, c’est vraiment la solution. Est ce qu’on pourrait pas faire les choses autrement? Se relancer. Autrement. Quel est le fonctionnement idéale? Question obsédante! On a sorti un magnifique journal pour le quartier du 11/19. Qu’on va distribuer partout. Partout.

on n'a pas encore trouvé la fin-carnets de route-

Parfois un pigeon se coinçait une patte entre les tuiles du toit du coron et il fallait monter sur le toit pour le libérer. En général il s’en sortait avec la patte cassée et on le tuait pour le manger. La neige a presque totalement disparu du paysage. Hier on a fait un enchaînement; ça fait une heure dix. Les dix dernières minutes sont longues. On n’a pas trouvé la fin. La vie est courte mais elle est longue par petits bouts (C’est Dédé Fortin du groupe québécois les Colocs qui racontait ça: il avait croisé un type dans la rue assis sur un trottoir qui lui avait dit ça, donc: la vie est courtes mais elle est longues par petits bouts. J’ai beaucoup aimé ce groupe de musique. Je me souviens d’un titre, dehors Novembre). Mais on va y arriver. Il nous reste une semaine et quelques jours de reprise au mois de janvier; ça fait douze dans qu’on est à la Fabrique de Théâtre de Loos en Gohelle. Douze ans!  On a démarré les Veillées en 2003. L’année de la mort de Kader. Et puis on n’a plus fait que ça et un spectacle normal, on va dire, Base 11/19.  On était quelques uns à beaucoup souffrir sur Base 11/19. Hier pendant la représentation on a essayé deux séquences de Pépites et Râteaux. Des anecdotes des Veillées. Chacun a sélectionné parmi les histoires qu’il avait déjà racontées, trois ou quatre histoires qui lui sont arrivées et qui sont emblématiques du savoir chaud et du savoir froid. C’est à dire qu’elles révèlent des comportements, des difficultés, des disfonctionnements et des petits ou des grands bonheurs aussi; ça marche plutôt pas mal et ça donne un autre ton à la pièce. Ces histoires ne sont pas écrites. On les réinvente d’une certaine manière quand on les redit. Dire une pièce pour les Atomics: même ce mot-là semble étrange. Camille a raconté qu’on avait dansé la nuit sur un cargo turc dans le port de St Nazaire quand on a fait la Veillée de Méan Penhouët et que c’était surréaliste. Le dimanche c’était les concours de pigeons. On n’avait l’interdiction totale de mettre les pieds dans le jardin. Mon père n’ admettait aucun intrus. Ses pigeons rentraient de Tours, Blois, Orléans, Poitiers, pour rejoindre le bassin minier. En quelques heures. Quand on est allé jouer dans ces villes, c’est comme si j’étais devenu un pigeon à mon tour.

enchaînement-carnets de route-

Ce samedi on va faire un enchaînement. A 11h30. Dans une semaine on aura fini les répétitions. On a tellement pris l’habitude d’être tout le temps dehors avec les Veillées et les Instantanés qu’on a beaucoup de mal à rester enfermé à longueur de journée. On se souvient qu’à l’époque du Ballatum, ça a failli nous rendre fous. Ce sentiment est resté ancré en nous profondément. Le théâtre fait peur. On va voir ce que donne l’enchaînement tout à l’heure. On a hâte. On s’est dit que ce travail sur Les Atomics, c’est une manière de penser ce qu’on va faire par la suite. C’est à dire créer de la matière pour les prochaines Veillées et le travail dans les villes et les quartiers. On s’est encore redit hier combien on n’avait rien à faire sur les plateaux (ou le moins possible). Etant donné ce que peut représenter un plateau de théâtre concernant la division du travail, la hiérarchisation  des rôles, les différences insupportables entre ouvriers artistes et ouvriers techniciens… On se demande bien ce qu’on serait devenu si on n’avait pas fait ce travail avec les habitants? Hier on est revenu sur l’engagement de chacun et de la compagnie et on s’est dit qu’on allait prendre des cours d’économie politique. Souvent on pense qu’on serait mieux ailleurs. Qu’on aurait été plus utile quelque part. Dans l’éducation nationale par exemple. Ou dans un centre social. On se souvient du livre de R. Debray sur Pierre Goldman, le rendez vous manqué. Rendez vous manqué avec l’histoire. Avec la révolution. Et puis on a évoqué le film de Romain Goupil, mourir à trente ans.

ça bosse -carnets de route-

Quand on a répété Base 11/19, le spectacle Base 11/19, on avait commencé par quinze jours de danse. Avec Howard. Tous les danseurs et acrobates. L’autre partie de l’équipe travaillait à Calais au Channel à l’époque de sa construction. Une Veillée autour de la construction du nouveau complexe artistique. Et principalement sur les métiers et les ouvriers qui participaient à cette nouvelle réalisation imaginée par l’architecte P. Bouchain. Pour les Atomics les danseurs travaillent à nouveau énormément. Howard n’est là qu’une dizaine de jours donc il travaille comme un fou. Howard retourne à Montréal jeudi prochain. Hier on a enregistré les textes sur un nouveau matériel. On y a passé une bonne partie de la journée. Avec Jean Pierre de Culture Commune. Frantz a travaillé sur le décor et les éclairages.  On a travaillé aussi sur les pépites et râteaux. C’est à dire les petites histoires qui nous sont arrivés sur les Veillées. Des anecdotes. Il faut en chercher d’autres encore. Beaucoup d’autres. Partout ça travaille fort. Au bureau Maggie, Sandrine et Olivier se démènent pour que tout soit prêt et se passe au mieux. Les problèmes sont résolus rapidement… On a sorti une lettre d’informations.

mont blanc -carnets de route-

La salle est pleine là bas. Des centaines de gens assistent à un spectacle et ils sont ravis. Un spectacle qui parle de politique et qui fait rire et s’émouvoir. Qui ne parle pas de classe ouvrière. Penser la société en fonction de la lutte des classes n’est pas une posture, c’est chercher le bonheur. Ici on dit, mais vous auriez fière allure  si vous jouiez des textes du répertoire dans des vêtements de marque alors que c’est tout le contraire qu’on vit et qu’on défend. On donnerait sa vie pour ce travail là, les Veillées. Au Ballatum c’est ce qu’on faisait, des textes anciens en habits  chics d’aujourd’hui.  Je n’ai jamais été aussi bien habillé que dans les spectacles du Ballatum. Je me souviens, je faisais un officier de l’armée russe dans une pièce de Tcheckov, dans un magnifique costume gris. C’étaient les nouveaux romantiques. Des costumes taillés sur mesure. Ou de marque. Au Pavé ils n’ont pas de vêtement de marque, même si F. Lepage écrit avec un stylo Mont Blanc. Ils ont pourtant fière allure, aussi. Hier on a beaucoup dansé. Les danseurs ont un courage monstrueux. On a lu le grand dégoût culturel qu’on a mis sur le blog à la rubrique des Atomics. On a essayé d’autres façons de dire les textes. On les chante. Enfin on a cherché d’autres musiques. D’autres tonalités. On travaille les textes par blocs entiers. Et puis on a continué à se raconter nos pépites et nos râteaux des Veillées. Les spectacles qu’on faits avec les gens. Les Veillées, c’est pour ne pas sombrer. Pas mourir. Habillés comme on est.

autre chose -carnets de route-

Toute la matinée on a travaillé sur un enchaînement avec les nouvelles danses. Le plateau est vraiment très étroit et très encombré et on est nombreux (pour ce petit plateau). Hier midi on a fait une réunion pour décider des actions qu’on mènerait au théâtre du Grand Bleu le jour du retour sur les différents Instantanés qu’on aura fait dans la région avec le Grand Bleu, Culture Commune et la Condition Publique de Roubaix. On a décidé de reprendre Inventaires qu’on avait présenté au Prato, lors de l’inauguration du nouveau Prato et qui avait fait scandale. Et à quoi ne pense t elle pas quand elle danse? Jérémie travaillera des portraits de lycéens. On fera des portraits citations et des installations de vidéo et de photos… La réunion a duré un peu dans l’après midi. Puis on s’est remis aux danses et aux récits sur les Veillées. C’est pas facile; comme on dit, ça se saurait si ça l’était. Qu’est ce qu’on est content d’avoir mis en place ce stage avec le Pavé! On comprend mieux nos doutes et nos incertitudes quant aux spectacles et à l’art. On se dit que c’est pas une question de peur même si ontologiquement la peur est toujours là, parce que vivre fait peur et la nature est d’une infinie cruauté. Mais là, il ne s’agit pas de ça. C’est qu’il va de cette terrible imposture, la culture pour tous. Qui est un oxymore. Pour être plus juste, on pourrait dire l’art contemporain pour tous… Et quand on vient du peuple travailler là dedans,  se mêler d’art contemporain, c’est une traitrise. Je suis un social traître. C’est ça qui ne va pas. Si ce n’était que la peur. Non, c’est autre chose…

penser avec les pieds -carnets de route-

On a commencé par une discussion autour de la table. Histoire de faire le point. Quand on était au Ballatum, les quelques cinq ou six dernières années on avait décidé qu’on ferait autrement que les autres. Qu’on ne ferait plus de travail à la table. Temps de réflexion dramaturgique où on explore le texte et où on découvre son personnage. On se disait qu’il fallait penser avec les pieds. Comme les marcheurs. C’est une phrase de Nietzsche, je pense. Se mettre en action. Mettre tout de suite le corps en mouvement. Mais là ça n’a rien à voir. Fallait qu’on revienne sur ce qui nous était arrivé avec Le Pavé. La question principale étant de savoir si on pouvait redémarrer normalement. On s’est rendu compte qu’il fallait faire avec les moyens du bord; ça va aller très vite, en fin de compte, ces deux semaines et demi de répétition. Mais vu l’état de nerfs dans lequel on s’est mis, c’est pas évident. Charlotte est absente pour plusieurs jours. On l’a prévenue trop tard de notre changement de calendrier. On a voulu faire une première phase des Atomics plus vite que prévu mais Charlotte s’était entre temps engagée à temps plein sur une formation de musicienne. Très exigeante et très poussée. On a de la chance qu’elle ait pu toute de même majoritairement se rendre disponible pour les répétitions. On a donc eu cette discussion à table. On a ramené le livre, le grand dégoût culturel dont il avait été question avec le Pavé au stage. Puis on a revu les danses en même temps qu’on se racontait des histoires de nos aventures pendant les veillées. Un exercice qui s’appelle Pépites et Râteaux qu’on a commencé avec Le Pavé. Faudrait que Thomas P. qui était avec nous au stage et qui travaille avec la Spoutnik Théâtre nous dise ce que ça lui a fait de nous voir bousculés comme on l’a été la semaine dernière. Et Didier A. On reprend à dix heures.