Isabelle nous dit qu’il n’y a qu’ici qu’on dit ça quand il pleut très fort, « j’ai pris la drache ». Ce qui veut dire qu’on est trempé. C’est ce qui est arrivé à Mourad, accompagné de deux jeunes gens de la classe de quatrième 3, lorsqu’ils sont allés hier après-midi d’un commerce à l’autre pour offrir une petite danse. La pluie s’est déversée sur elles et eux tandis qu’ils et elles rentraient au collège. C’est arrivé si soudainement et si brutalement qu’ils n’ont pas eu le temps de trouver un quelconque abri. Les collégiennes ont pris des photos et fait des superbes films de cette aventure. Deux autres élèves ont accompagnés Isabelle, la magicienne des mots pour une conversation filmée chez Mathilde, une personne du Banc Vert. La classe de quatrième 3 réalise un court-métrage et nous suit durant toute la semaine au cours de nos multiples protocoles et interventions. On se rapproche à grands pas de la diffusion du film-spectacle. Dès cet après-mi, on ira rejoindre l’auditorium Bizet pour répéter sur la scène car demain on joue à 16h et 19h. On a de la concurrence parce que c’est le week end de la folle aventure à Dunkerque et son pourtour.
Portraits
AU BANC VERT, ON NOUS A MONTRÉ. OBJETS #2
Au Banc Vert, on propose aux habitants du quartier, pour une séquence du film-spectacle, de nous montrer un objet qui leur tient à cœur. On nous a montré :
. La toile de Paul. C’est une toile que Paul a faite pendant tous les confinements. C’est un kit Aduges qu’on a récupéré, c’était pour la fête des mères cette année. Il fallait qu’il crée un tableau avec les éléments qui étaient donnés dans le kit. Et cette photo là, c’était la seule photo de classe qu’il a eu. Parce qu’il a eu des petits soucis de santé, alors il n’a qu’une seule photo de classe. Et je trouve qu’il s’est bien débrouillé et c’est un super souvenir. Je suis quelqu’un de très minimaliste, mais ça c’est quelque chose que je vais garder.
. Tableau d’une jeune fille. Un des tableaux que j’ai peint. Celui-ci je l’aime beaucoup. C’est une jeune fille qui vit dans des conditions très dures en Amérique du Sud. Et qui en fin de compte vit de tout ce qu’elle trouve. C’est pourquoi la plupart du temps, ces jeunes filles ont un visage un peu marqué, un peu sali. J’ai peint ce tableau là il y a 3 ans. C’est une image qui m’a plu et que j’ai peinte à la peinture à huile. Je la trouve tellement expressive, je la trouve magnifique, donc j’ai tenté de la peindre.
. Un fer à repasser. C’est un objet qui m’a été offert, j’étais encore étudiant. Ça m’a beaucoup servi, pour aller à la fac, pour repasser mes T-shirt. C’est un ami étudiant qui me l’a donné. J’ai fait mes études ici, à Dunkerque. Je l’ai depuis 15 ans. C’est la seule chose que j’ai ramenée dans ma nouvelle maison.
. Le médaillon. C’est objet vient de Lillebonne en Normandie. C’est des petits épis. Je l’ai depuis au moins 45 ans. Il a fait plusieurs maisons. Il m’a suivit dans 5 maisons. Il m’a plu, je l’ai gardé et il tient toujours le coup.
. Un oiseau sur sa fleur. C’est un objet qu’on a acheté pour notre chat parce que notre chat c’est notre bébé. Ça fait au moins deux ans qu’il a cet objet. On a trouvé cet objet sur internet, on a cherché pour lui. Ça a été une réussite, il joue avec : il y a une pile et ça tourne et elle joue avec, elle attrape l’oiseau. Bon, maintenant, elle s’en occupe moins parce qu’elle a 6 ans, elle est un peu moins joueuse.
. La petite plante grasse. Une petite plante grasse qui m’a interpellée quand je l’ai vue. J’ai une passion pour les plantes et surtout le potager. Vous voyez sur mon balcon, j’ai des tomates qui poussent, j’ai plein d’aromates. Cette plante : je trouvais très joli le fait que ce soit du recyclé, dans du bois. J’aime tout ce qui peut être recyclé, réutilisé, je trouve qu’il y a beaucoup de gâchis, beaucoup de choses qui sont jetées parce qu’elles sont cassées parce qu’on donne pas la peine de réparer, ou éventuellement de donner : il y a des gens qui aime bien retravailler ou retransformer les objets. Et je trouve que le recyclage, la plante qui naît, qui meurt, c’est tout un cycle.
Rendez-vous à l’école Paul Meurisse

Ce matin, 9h rencontre dans la cour de l’école Meurisse, celle à côté du City Park, en face ce mur d’enceinte qui a l’air d’être très vieux mais dont personne n’a su nous dire l’origine. Au passage, Paul Meurisse, c’était un acteur des années 30-40, qui a été marié à une Michèle, puis à une Micheline et encore à une Micheline, sacré critère.
9h05, nous entrons dans la petite classe des CE1 de Mme Cheminel. Petite, car nous y rencontrons 10 élèves : il y a Ajan, Meliana, Aydan, Lahcen et Yoann, il y a aussi Ndack, Laya, Farmata, Imad et Arman. Si vous aviez une baguette magique, qu’est ce que vous changerez dans votre quartier ? Les réponses sont d’abord timides, puis elles fusent : on ferait des maisons en bonbon et des toboggans en pâte à sucre, une piscine géante, des châteaux gonflables, des bateaux pirates.
9h45, on grimpe un escalier et on arrive dans la classe des CM2 de Mme Dondeau (qui est aussi la classe de Mr Leclercq, le directeur). Cette fois-ci on change de consignes, c’est citations ! On rencontre Nourhane, Yassine (qui est le frère d’Imad de la classe d’avant), Mourad, Luigi, Wassy, Mathéo, Laoni, Meziane, Rahaf, Kaïna, Laureen, Aliyah, Soukaïna, Yannis, Stefen, Alycia.
L’une d’entre elle, » le souvenir est le seul paradis dont nous ne pouvons être chassés » a été transformé par Meziane en » l’amour est le seul paradis dont nous nous ne pouvons être chassés », ça c’est fait tout seul, et ça marchait très bien.
Quand on est dans l’école, on repense à ce qu’on a pu nous raconter sur la destruction prochaine des écoles Meurisse et Giono, qui laisseront place à une nouvelle dans les prochaines années. On a eu beaucoup de questions et d’avis sur ça, « ça va être beaucoup plus pratique pour les familles », « peut-être que ça va amener de nouveaux commerces », « pourquoi fusionner à tout prix ? », « pourquoi mettre des sous à cet endroit alors qu’elles ne sont pas en mauvais état ? ».
La fin du marché

Tristan, veilleur du quartier, au marché Louis XIV
« Je suis Tristan, élève de 4ème 3, du collège Lucie Aubrac. Je participe à HVDZ, car cela nous montre notre quartier. J’ai suivi les rencontres avec les personnes de 10h30 à 11h45. Ce matin, on est allé au marché place Louis XIV puis nous avons proposé à des personnes du quartier de choisir une citation et de se présenter avec leur « mots ». On a dansé la valse… Ce moment était un moment convivial et joyeux, en plein cœur du marché. »
La Creuse, depuis les fenêtres de Paul Meurisse

Portrait de Familles !
Le Portrait du Quartier du Banc Vert de Dunkerque, est intitulé :
« Portrait de Familles ».
D’habitude, quand on va quelque part, c’est le « Portrait » de cet endroit. Le Portrait du Quartier du Canal, le Portrait de Fives, le Portrait de Salé, le Portrait de Faux-la-Montagne.
Mais ici, ça ne s’appelle pas le « Portrait du Quartier du Banc Vert de Dunkerque », ça s’appelle « Portrait de Familles » et ce n’est pas pour rien, et ce n’est pas anodin, et ça raconte beaucoup.
Alors, parce que ce qu’on fabrique avec les habitants du quartier du Banc Vert c’est un « Portrait de Familles », on a eu envie de poser – à un moment donné – dans chaque interview – les trois mêmes questions :
• Qu’est ce qui fait famille, qu’est-ce qui fait lien dans la famille ?
• Qu’est ce qui fait qu’on se sent bien dans la famille ?
• Comment la famille s’est transformée ces dernières années ?
On nous a parlé de solidarité, de soin, d’attention, d’amour. On nous a parlé de beaucoup de choses. Et on nous a aussi dit, par rapport aux « transformations de la famille ces dernières années », que ces transformations sont positives ! On aurait pu nous dire « c’était mieux avant », on aurait pu nous dire « le téléphone, les réseaux ça cassent tout. »
On aurait pu nous dire ça.
Mais on nous a dit :
« Ces transformations sont positives. Il y a moins le poids de la morale, il y a moins le poids de la société, alors, oui, dans les familles d’aujourd’hui, on peut assumer des schémas qu’on auraient dit marginaux « avant ». Dans les familles d’aujourd’hui, on peut fait preuve de créativité pour inventer son propre modèle, chacun a le droit de choisir sa place, chacun a la liberté de choisir sa place. »
Familles de sang, familles recomposées, familles de voisins, familles monoparentales, familles homoparentales, familles élargies, familles choisies, familles de cœur.
Faire, faire faire, laisser faire et un millefeuille.
« Faire, faire faire et laisser faire ». Ça peut paraître obscure, mais on comprend vite pourquoi « Faire, faire faire et laisser faire est le leitmotiv de Mehdi Guirous, le directeur de l’Afad. (*aide familiale à domicile). Oui, la transmission est au cœur de son métier : on reçoit et quand on a reçu, à un moment on est en capacité d’aussi aider les autres. Ce portrait est intitulé « Portrait de Familles ». Aussi, il y a des questions particulières que l’on a eu envie de poser à chacune des « conversations filmées », et notamment : « Pour vous, qu’est-ce qui fait famille ? Qu’est-ce qui fait lien dans la famille ? » À l’Afad, Mehdi nous répond : « C’est l’amour. Même si c’est compliqué (même si le matériel est compliqué, même s’il y a disputes) c’est le lien d’attachement, c’est l’amour qui fait famille. »
Avant de commencer l’interview, Mehdi nous fait visiter l’Afad, rue de Petite-Synthe, avec son grand jardin caché derrière, et Mehdi nous explique que c’est le jardin de toutes les personnes qui viennent ici. Et là – ce n’était pas prévu – on rencontre Jean-Paul qui jardine « parce que le jardin ça aide certains enfants à s’exprimer, alors je viens pour entretenir, préparer des choses pour eux… » Jean-Paul a été aidé par l’Afad il y a 3 ans, et ça semble aller de soi pour lui de continuer à passer des heures dans cet maison, mais pour aider les autres maintenant. On lui demandera : « Et si l’Afad était un plat, ce serait quoi ? » Jean-Paul répond : « Un mille-feuille, parce que c’est disposé de plusieurs couches et comme il y a plusieurs personnes, chacun apporte sa couche au mille-feuille »
Au Banc Vert, il y a
Il y a la Dordogne, le Limousin, le Languedoc, les Landes, les Cévennes, la Gascogne, la Creuse, la Guyenne, le Béarn, le Périgord
Il y a des tout petits chiens et un chien avec une énorme tête qui s’appelle Boras
Il y a un tunnel pour sortir du quartier
Il y a un cabinet de kiné, mais pas de café
Il y a des plantes dans les classes
Il y a une sonnerie de collège qui ne ressemble pas à une sonnerie de collège
Il y a des gens qui vivent là depuis plus de 45 ans
Il y a RDM, RDF et aussi des BBC
Il y a un cours de neuro-fitness
Il y a une infirmière au Top
Il y a une rue Gro Harlem
Il y a des dealeurs de mots
Il y a des bancs qui ne sont pas verts mais il y a de la verdure
Il y a des poupées russes dans la balance
Il y a un petit garçon qui adore Godzilla VS King-Kong et qui pense que c’est logique que Godzilla gagne à la fin puisque un dieu est plus fort qu’un roi
Il y a Nathalie et Rania que tout le monde connait
Il y a le City Park
Il y a des citations dans des poches
Il y a un rappeur-médiateur
Il y a un clown au CPM : Coucou aux Quatre Cents Coups
Il y a des barbecues entre voisins
Il y a Raymond et Lucie Aubrac
Il y a un Redacteur en chef
Il y a de l’entraide
Il y a des topinambours dans la cour du collège et des framboisiers dans les écoles
Il y a des escaliers qui montent et qui descendent
Il y a la Ferme qui rejoint le Marais
Il y a un chantier où on peut danser même en chaussures de ville
Il y a Gambetta mais on lui a piqué ses fenêtres
Il y a des euphorbes
Il y a des fans de Johnny
Il y a beaucoup de géraniums très rouge
Il y a un château d’eau d’un côté et une église de l’autre
Il y a un peu de méfiance mais surtout beaucoup de bienveillance
La caméra, Alexandre, Rémi, Guillaume, Manu et les autres…
La caméra d’Alexandre !





























