Labeur laboure

Jus d’orange dans la vieille ferme artésienne
vis à grain sous la grange et gravier noir sur la cour d’avant
Les près gras autour du corps
100 000 heures fortes dans les bras
après ses champs refait son toit

les yeux les bras de tâche en tâche
dans la lumière d’août, de mai, de mars
ça eut payé, ça ne paie plus
au soir le dos, la nuque ne peuvent plus

pourtant l’eau vive que l’on voit,
rentrant des champs poussière aux bras
la rivièrette toute la vie, celle que l’on suit depuis petite
les veaux en buvant qui vacillent
les saules et les blés et les grives
et l’habitude et ses plaisirs
la fatigue comme un habit,
l’impossible temps de l’ennui
ça aide à bosser jour et nuit.

Il fait très cau

Le soleil brille dans les pare-brises des rurbains qui s’acheminent, traversant l’ancien pays des mines, vers le boulot
Le soleil tape sur les chaumes, sur les tracteurs qui transportent jsuqu’aux granges immenses de blancs ballots
Le soleil baigne les garages, les statuettes de plâtre et les gazons que rien n’ombrage
Le soleil brille sur les marmots qui boivent l’ombre sous le préau, sur les ados et leurs vélos, sur les scooters des jeunes hommes, sur la dame de service qui prend sa pause
Le soleil entre dans les maisons des vieilles dames qui vivent seules, embête grand père qui se repose, il fait transpirer les cyclos, inonde pâtures et silos, il fait pâlir le vert des bois, le ciel est bleu ici, des fois.
Le soleil cogne la benne à verre, verte, la pompe à eau, rouge, la benne à dons, blanche
et les Scénic, grises
Les bacs à fleurs, longs
l’échafaudage de l’église, haut
la toile grise du chapiteau
les haies taillées, le grand noyer, beau
la placette vide
et le blanc ballon de Léo

L’énergie qui décoiffe

Toute petite, elle jouait dans les bennes à blé, faisait du rodéo sur les vaches, construisait des cabanes. Son apprentissage à la ville lui a donné un métier, la passion de coiffer qu’elle allie à l’art d’écouter.
Quand on lui demande où est la vie dans un village, elle répond « l’école » sans aucune hésitation. Les trois quarts de ceux qui ont été enfants à Gauchin reviennent ensuite au village. Comme elle. Pour que leurs enfants connaissent la liberté de courir à travers champ et l’art de construire des cabanes. Pourtant les temps changent. Il est plus difficile de faire sortir les gens de chez eux, les enfants qui trainent dans la rue inquiètent quand avant ils s’amusaient, beaucoup craignent de dire bonjour aux inconnus, ont du mal à ouvrir leur porte. Pourtant, il reste dans les villages l’art de se rencontrer, de s’entraider. Hélène fait partie du comité des fêtes et du conseil d’école. L’école c’est la vie dans le village et nos enfants ont la chance d’être peu nombreux, peut-être plus posés qu’en ville.
On n’est pas des sots à la campagne ! Les anciens ont amené des choses, elle fait partie des jeunes qui ont repris le flambeau. C’est plus dur qu’avant mais on n’abandonne pas. Et d’un lumineux sourire elle conclut :
Il faut rigoler pour vivre longtemps !

Big up

Lundi soir, la Smob est comble. Comblés gens de Caucourt Hermin Gauchin Estrée ébahis, amusés, scotchés, époustouflés par les danseurs du défi paillette. Hip Hop down in the country. Groove électro et furieux drummer, danseurs stupéfiants poppin’, freestyle, newstyle, footwork et top rock.
Big up, big up big up ! La soirée s’achève sur un tapis de paillettes, ce sont les mains des gens qui donnent le tempo. A la sortie du chapiteau, jeunes et vieux dansent irrépressiblement. « c’est pas des manchots ! » « incroyable hein ! »« tu vas voir dans la cour de l’école ! »« on va s’entraîner » « Ah i doivent pas avoir de sciatique eux. » « on va faire un club de hip hop pour les élus des communes vertes ! » « bah va falloir d’abord faire un peu d’assouplissement ! »Et les sourires s’éloignent en dansant. La culture urbaine fleurit aussi dans les champs.