Violaine et Louison frappent à notre porte

Violaine, la coloc’ du trio au poncho, vient de frapper à la porte. Ces cohabitants nous ont dit qu’elle danse vachement bien, alors on se dit qu’on aimerait bien la voir faire une petite intervention dans le spectacle de samedi. Elle « a un passif de classique » et fait maintenant de la danse contemporaine. Comme Camille n’est pas au QG, on donne son numéro à Violaine pour qu’elles en discutent directement.

Et puis, ça frappe encore. Cette fois c’est Louison, la dernière de la colocation. Ça y est on aura rencontré tout le monde. C’est agréable quand ce QG devient un lieu de passage, on aime bien avoir de la visite.

Louison est orthophoniste et fait de l’accordéon. Elle nous demande si on connait le Halte aux Postes, le bar à côté, parce que pour elle c’est ce qui représente le mieux son quartier. C’est grâce à cet endroit qu’elle a rencontré le plus de monde, des personnes avec qui elle n’aurait pas échangé si elle n’avait pas fréquenté le lieu. Le balai qu’elle emprunte à son voisin, elle lui emprunte parce que c’est dans ce bar qu’elle l’a croisé. Elle nous redit aussi ce qu’on a déjà entendu : la pizzeria d’en face qui fait aussi des plats iraniens est une super adresse !! Violaine travaille aux Rencontres Audiovisuelles. Elles n’ont pas mis leur poncho.

Au marché, tu peux, tu peux tout acheter

Deuxième marché du Portrait, celui de la place de Fives a lieu le mardi après-midi. On sort nos grandes affiches avec les citations pour proposer aux passant.e.s de poser devant la caméra avec la phrase qui les touche le plus. Trop facile, les volontaires se suivent et ne se ressemblent pas à une vitesse infernale.

Et puis vient notre autre rituel, celui de la valse, et nous voici à aller à la recherche de partenaires d’un court instant de corps à corps. La foule est un peu moins dense mais les sourires sont là !

Aux Peupliers

Ce mardi matin, Béné, Camille et Lucien se rendent dans le quartier loin loin des Peupliers.

Ce sont trois immeubles de briques beiges qui se succèdent du plus grand au plus petit, dans l’ordre d’arrivée. La symétrie est jolie, Béné installe la caméra, et Camille danse, bien au milieu.

Nous rencontrons des promeneurs de chien, on tracte, on propose des pas-de-porte, mais personne n’est d’ici, c’est le papa, le frère, la belle-mère, alors tant pis. Et puis au moment où nous croyons partir, on apreçoit deux jeune hommes en train d’étendre leur linge sur le balcon, Camille les hèle, on leur dit que l’on souhaite faire des images et avant que l’on ait le temps de finir l’un des deux nous répond : « montez, mon ami travaille dans le cinéma ».

Au deuxième étage, on entre ainsi chez David et Mustapha. Ce dernier nous prépare du café pendant que David nous dévoile peu à peu sa carrière cinématographique ainsi que toutes les cartes et certificats qui attestent de son statut d’auteur.

David est kabyle, il vient d’Algérie. Il est auteur, doubleur de voix et a déjà réalisé quatre films documentaires. Actuellement il cherche à faire traduire un livre qu’il a écrit sur le suicide. Son travail documentaire, sur la culture berbère et l’Afrique du Nord, l’a emmené en Egypte et en Italie pour rencontrer des écrivains qui s’intéressent à ce sujet. Le problème, c’est que si l’Algérie lui a donné l’argent nécessaire à une réalisation, elle s’octroie ensuite un droit de censure qui ne lui permet pas de dire ce qu’il veut (en tant que chrétien kabyle notamment). Il en est de même lorsqu’il effectue des doublages de films étrangers qu’il réalise,  beaucoup de scènes sont coupées par la censure (un dénuement, un baiser, …) ce qui fait que les films passent de 1h30 à 45 minutes et deviennent parfois incompréhensibles. Il parle de dictature algérienne.

Il a actuellement en tête un scénario d’une série de 30 épisodes, mais il veut pouvoir créer librement et c’est pour ça qu’il a décidé de changer de pays.

On lui laisse notre mail pour qu’il nous envoie bientôt des liens pour regarder des extraits de son travail. Et puis on lui donne des pistes : on aimerait bien qu’il rencontre Marie et Marion du Cinéma l’Univers à Lille qui sont un lieu de projection de documentaires par les associations actives et/ou militantes de la ville.

 

84 ans et tout fringants

Nous sommes accueilli.e.s comme des prince.sse.s ce matin chez Gisèle et Noël qui habitent la maison rose en face du théâtre Massenet. On a beaucoup ri, il y avait de la bonne humeur dans toute la pièce (et un bouquet de gui accroché à l’envers sous lequel on ne s’est pas embrassé). Le café était très bon, Béné et Camille étaient sur un nuage qu’on leur propose enfin du lait. Une belle interview à retrouver comme vous le savez déjà ce samedi à 16h30 à la salle des fêtes de Fives.

Gisèle nous montre l’aquarelle représentant l’Eglise Notre-Dame de Fives en affirmant : « Voilà où j’ai fait ma communion, où je me suis mariée, et où l’on fera mon enterrement ». Ce à quoi Noël répond : « Enfin s’ils veulent bien de nous ! ».


La dame aux chats

Rue du Pont Noyelles, il y avait beaucoup de volets tirés et pas beaucoup de gens. Bon en même temps c’est une impasse, c’est pas le genre de rue qu’on traverse.

On a vu une dame qui a déjà été filmé par un magasin de bricolage, c’était une blague alors elle avait pas vraiment envie de recommencer. On a vu une famille qui partait en voyage en Roumanie. On a vu un barman avec une super barbe rousse. On a vu un étudiant qui travaillait aussi dans un laser-game le week-end et qui fait du rugby à haut-niveau (il serait peut-être même en pro s’il ne s’était pas fait les croisés).

On a vu une dame qui vivait dans la rue depuis 58 ans avec son mari. Elle est arrivée de Kabylie quand elle avait 5/6 ans parce que ses parents avaient de la famille à Lille. Elle a travaillé pendant 42 ans dans des usines textiles. Aujourd’hui elle a 81 ans, alors passé cet âge là, la caméra, c’est pas son truc. Elle n’aime pas trop les humains « on leur donne ça, ils prennent ça ».  Par contre, elle aime les chats. On aperçoit derrière elle un gros chat, le museau plongé dans un bol de croquettes. Elle en a 5 chez elle, et puis elle s’occupe un peu de ceux qui passent devant chez elle. Elle va aussi donner à manger aux chats dans Fives : sur la place à côté, devant l’église Saint-Louis puis sur le banc à côté de l’école. Elle leur donne des croquettes, de la pâtée mais aussi du saucisson et de la vache-qui-rit. « C’est presque toute ma retraite qui y passe! ». Même si elle n’aime pas trop les humains, sa porte est toujours ouverte pour qui a besoin d’elle : garder un chat, un peu de sel, de l’huile, ou un bout d’aluminium, c’est toujours avec plaisir.

Premier déjeuner à EPHATA

Ce midi, nous avons été en nombre déjeuner à EPHATA, au bout de la rue Pierre Legrand : les sept veilleur.se.s et Raphaëlle et Marie qui travaillent au théâtre Massenet. L’EPHATA est un lieu de rencontre et le midi, il y a un repas solidaire qui est partagé avec toutes les personnes qui viennent pousser la porte. Marie-Pierre était la cheffe du jour (tous les jours ça change) et nous nous sommes régalés d’une salade avec 5 fruits et légumes en entrée, de poulet fermier avec petits-pois-carottes-pommes-de-terre pour plat principal.

On entonne très vite (pour la sixième fois aujourd’hui, au moins) un « Joyeux anniversaire » à Martine qui fête aujourd’hui ses ?? ans (oui deux jours après Marie !). Les personnes qui nous accueillent regrettent de ne pas l’avoir su avant pour préparer un dessert d’anniversaire, mais comme on reviendra tous les jours, une tarte sera préparée demain. Abdel semble se poser en chef de cette mission.

Abdel est assis à la gauche de Marie, il a l’air ravi de voir tous nos nouveaux visages. Quand Marie lui dit que nous allons sûrement le filmer demain, il répond que ce sera « le plus beau cadeau de sa vie ».

Yves nous présente l’association qu’il préside, assis comme il se doit en bout de table. On sent qu’il aime ce lieu, ses activités (même si d’accord, c’est peut-être un peu trop petit quand il faut circuler à 20 en même temps tout autour de la table). Il nous parle des différents espaces : la salle Internet, la salle de bains avec sa machine à laver, la terrasse pour fumer (Jean-Pierre si que c’est l’endroit ou l’on doit fumer : « même si vous n’êtes pas fumeur, vous devez ! ») et puis au rez-de-chaussée un endroit où l’on vend des habits de seconde main à tout petit prix. Le lundi après-midi, le groupe est de sortie : aujourd’hui ils ont choisi un musée, vu le temps, mais ils hésitent encore entre le LaM et le Musée des Beaux-Arts. Nous on préfère le premier et on croit bien qu’à force de le répéter on a pu influencé un tant soit peu la décision d’Yves.

Quand on se dit d’où l’on vient, Jean-Pierre connecte avec Béné, tous deux de Bois-Blancs, il a participé à l’organisation de la fête des allumoirs, et oui Béné y était ! On reparle du portrait de Saint-Julien-en-Genevois (on fait ça souvent, des anecdotes nous remontent à chaque nouveau Portrait, alors on les raconte aux gens qu’on rencontre) et là Aly nous dit qu’elle vient justement de Haute-Savoie. Elle a travaillé pendant longtemps auprès d’un public en situation de handicap mais sans le bac en poche, alors quand elle a décidé de changer de voix, elle a rejoint une amie qui était arrivée à Lille faire ses études, et elle s’est inscrite à la fac qui permettait de passer le bac en même temps.

Abdel compare Aly au Prince Harry, on ne voit pas trop le rapport, la rousseur d’accord, mais les longs cheveux bouclés et le visage allongé nous éloignent de cette ressemblance.

Cet après-midi, à l’EPHAD les Camanettes, on a rencontré Mr Chuin-Fleury qui nous a raconté des histoires extraordinaires…

Mr Chuin-Fleury porte bien son nom, il a plein d’anecdotes fleuries à nous raconter. Nous avons traversé avec lui l’histoire des fonctionnaires de Fives dans les années 80 (ceux du service nettoyage, ceux du service des fêtes, ceux des maisons de retraite). Mr Chuin-Fleury a un projet gigantesque pour dynamiser les Ephads de toute la métropole. Parce qu’il nous dit que même si on arrive en maison de retraite, on a quand même un cerveau qu’il faut entretenir et que si les vieilles personnes avaient des animations intellectuelles, sportives et dynamisantes, elles auraient moins envie de mourir. Alors il veut (accrochez-vous bien) faire des tournois de rugby, du vélo électrique, de la danse, du chant, des activités pour la mémoire. Tout cela synchronisé entre toutes les maisons de retraite.

Mr Fleury est étonnant! Après nous avoir chanté quelques chansons d’amour, il nous raconte que, quand il travaillait pour la ville et son service des fêtes, il a organisé une exposition de manteaux polonais en mouton (300 balles le manteau, c’était de la bonne qualité), que dans cette exposition se trouvait des tapis, que durant cette exposition il pleuvait et qu’il a décidé de se mettre sur les tapis et de convoquer Vishnou afin qu’il arrête de pleuvoir. Figurez-vous que, selon les dires de Mr Chuin-Fleury (« Un fait historique Madame, c’est marqué dans les annales de Lille »), ça a marché. Et qu’il a même, dans le cadre d’un autre événement festif de la ville de Lille où il faisait trop chaud, réussi à convoquer ce dieu hindou pour, cette fois-ci, demander à l’eau de bien vouloir tomber. Et bien, je vous le donne en mille, ça a marché. Lucien et Marie lui ont donc demandé de bien vouloir faire sa petite incantation pour qu’il arrête de faire ce temps de novembre pour leurs séances de porte-à-porte…on verra si le charme sera effectif demain…

Vishnou est souvent représenté en homme bleu avec une parure royale et quatre bras, tenant généralement une roue ou chakra, une conque ou shankha, un lotus (padma) et une massue (gada) dans les mains. Il porte sur sa tête une tiare dorée, appelée kirita-mukuta. Il est dépeint également se reposant sur le serpent Shesha, un lotus sort alors de son nombril ; Brahma sort lui-même du lotus2 ; cette scène se reproduit à chaque nouveau grand cycle temporel ou kalpa, période liée à la cosmologie hindoue; Vishnou et Brahma recréent ainsi l’univers. Sa parèdre est Lakshmi, la déesse de la richesse et de la bonne fortune, sa monture Garuda, l’aigle. Il est le fils de Dharma et de Ahimsa3.