Moments d’écriture

Il y aura toujours des personnes contre les noirs, les homosexuels, parce que ça existe depuis toujours. On ne peut pas changer les personnes qui pensent comme ça, c’est transmis par les parents. C’est les liens avec les amitiés qui peuvent aider à se remettre en questions pour éviter que les parents transmettent le racisme ou l’homophobie.

Je ne supporte pas les enfants qui pleurent parce que ça me fait mal pour eux.
Je ne supporte pas les enfants qui pleurent parce que ça me fait mal pour eux.
Je ne supporte pas les personnes qui jugent trop vite parce que on ne peut pas connaitre réellement une personne rien qu’en la regardant.
Je ne supporte pas  les personnes trop tactiles dès le départ parce que il me faut du temps pour connaitre quelqu’un.
Je ne supporte pas les gens qui se moquent des autres parce qu’ils peuvent les blesser.

Une danse et ce qu’on en fait.

On arrive avec une danse, et on fait autre chose de cette proposition. On arrive avec une danse collective, et puis on la fait sans musique, puis plus lentement, ou plus vite, ou dans un autre sens, ou avec certains qui dansent de dos, et d’autres qui dansent de profil. On cherche. On danse la même chose en changeant la musique, et là on dirait une presque autre danse.
Et aussi : la danse comme on la fait d’habitude, on va dire que c’est niveau 10. La danse, quand on la marque juste pour soi, pour la mémoire, on va dire que c’est le niveau 1. Et maintenant, on va danser niveau 20. Et maintenant on va faire deux groupes. Quand Lucien dit « 10 », on danse tous au niveau 10. Quand Lucien dit « TOP », un groupe danse au niveau 1. L’autre au niveau 20. La danse devient autre chose.
On travaille, on ne sait pas encore ce qu’on ce qu’on va en faire pour le spectacle du 12 avril, on cherche.

Bonjour, Bonsoir. (mercredi après-midi)

Le porte à porte. Sonner. Demander au gens s’ils veulent bien répondre à la question, qu’est ce que c’est pour vous le vivre ensemble ? Leur proposer de répondre devant la caméra.
Trois groupes « Close to Me » sont dans la cité des Provinces.
Dans notre groupe, ça commence comme ça, tract à la main : Bonjour, on vient de Culture Commune, juste à côté, on est quinze jeunes du CAJ d’Annequin, on fait un spectacle sur la question du vivre ensemble, ce sera le 12 avril à Culture Commune, c’est un film spectacle où il y aura plein de choses, du théâtre, de la vidéo, de la danse, de la musique. Et du coup, on voudrait vous demander si vous acceptez d’être filmé ? ​ ​- Ah, non désolé, je n’ai pas le temps.
On se dit qu’il faudra peut-être, à la prochaine porte qui s’ouvre, poser la question avant de parler du fait qu’on voudrait filmer, pour essayer d’éviter qu’on nous dise trop vite « Non, merci ».
Aux portes suivantes, malgré les ajustements de présentations à chaque fois, c’est toujours non pour la caméra. On a quand même, en off, des quelques réponses à la question. Mais ce n’est pas toujours réjouissant : – Avec les voisins c’est Bonjour-Bonsoir et c’est tout et c’est tant mieux, je ne cherche pas autre chose. – Avoir les voisins, c’est compliqué. Faudrait déjà se respecter dans le quartier. Allez, bon courage. – Depuis que tout le monde a déménagé, c’est plus comme avant. C’est juste Bonjour-Bonsoir, mais on peut plus compter sur les gens. Ce n’est plus soudé comme c’était avant, on ne peut plus se demander de l’aide. – J’ai 92 ans, quand j’avais ton âge c’était la guerre, mais c’était mieux, vous vous avez une très vilaine vie avec le monde d’aujourd’hui. – Oh, ben c’est dommage, mais c’est Bonjour-Bonsoir et c’est tout.
Et là, il y a quelqu’un qui va changer tout changer, quelqu’un qui va changer le sens du « Bonjour-Bonsoir », quelqu’un qui va porter un autre regard sur le « Bonjour-Bonsoir » de la cité des Provinces. C’est en plus, la (seule) personne qui a accepté d’être filmée. Sa réponse sur le vivre ensemble sera dans le film-spectacle. Et quand on part, elle ajoute : « – C’est chouette. Quand je vais par là-bas, pour faire mes courses (je suis nouvelle dans le quartier), à chaque fois les gens dans les maisons disent « Bonjour » ou « Bonsoir ». Et ça, ce sont des petites politesse qui font du bien. »
Merci​ Madame​. Et merci d’avoir répondu à notre question dans la caméra. Et à bientôt, au 12 avril à Culture Commune.

Recevoir une lettre des jeunes du CEF


« Close To Me », c’est la construction d’un film-spectacle qui aborde le « vivre ensemble ». Comment les jeunes du CAJ d’Annequin pourraient évoquer la question avec les jeunes du Centre Éducatif Fermé ? Les rencontrer ce n’était pas possible, ni les filmer, ni même faire un enregistrement audio. Pour rendre la chose faisable, on a imaginé un échange de lettres.  
Le lundi en fin de journée, le premier jour du « Close To Me » à Culture Commune, on reçoit la première lettre des jeunes du CEF. Le mardi matin, on avait partagé les jeunes du CAJ en  trois groupes pour la préparation des trois interviews de l’après-midi, alors on décide de rester en petits comités, pour prendre connaissance de la lettre.
Léa, Victoria, Mattis, Matys, Théo sont dans la salle de spectacle, Clara, Lauryne, Lukas, Alexandra, Claudia sont à la ressourcerie  et Flavien, Kylian, Safia, Camille,  Justine dans la nef.
Dans chaque groupe, ce sont eux, les jeunes, qui se partagent la lecture à haute voix. On laisse le temps à chacun de réagir.
Certainement, selon les groupes, la parole arrive différemment. Dans celui dans lequel j’étais, il y a d’abord du silence, puis beaucoup de questions, et parfois, du silence entre les questions. La lecture de cette lettre remue. Chacun réfléchit pour soi. Les jeunes du CAJ d’Annequin font d’emblée un chemin dans leur tête pour s’imaginer à la place des jeunes du CEF. Ils essaient de définir ce qu’ils pourraient ressentir dans une situation d’enfermement. Ils ont envie que les jeunes du CEF s’en sortent, ils essaient de trouver comment ils pourraient les encourager, avec quels mots.
. Moi je serais triste, je m’en voudrais à moi-même, parce que si on est là c’est qu’on a fait une bêtise, et aussi j’en voudrais à mes parents parce qu’ils m’ont laissé aller là-bas. Et au début j’en voudrais à tout le monde : la famille, les autres responsables de mon erreur, j’aurais l’impression qu’ils m’auraient entrainé, et j’en voudrais au personnel du CEF de participer à mon enfermement.
. En lisant la lettre, on a l’impression que l’on pourrait les connaître.
. Si on se retrouve là, c’est qu’on a fait une bêtise, une erreur. Et en général quand on fait ça, c’est quand on déjà un manque dans sa vie. Alors se retrouver en plus enfermé, déjà qu’on a un manque, ça doit être étrange.
. Il faut qu’ils continuent à se battre pour sortir le plus vite.
. Quand ils expliquent que, dans le centre, pour certaines activités, si une personne ne veut pas la faire, l’activité peut être annulée, je me suis dit que je trouvais injuste qu’une personne puisse pénaliser tout le groupe. Mais, ensuite, je me suis dit que ça entraîne chacun à faire aussi les choses pour les autres, à penser aux autres. Ça entraîne à comprendre qu’en fait on ne peut pas définir ses propres lois, il faut prendre tout le monde en compte. Et finalement, c’est bien de réfléchir à ça. 
. On ne vous juge pas. Votre acte c’est du passé. Maintenant vous tentez autre chose, on vous soutient.
Aujourd’hui mercredi, on a mis en commun la réflexion des trois groupes, la lettre est écrite et sera envoyée demain matin, et déjà les jeunes de « Close To Me » attendent avec impatience une réponse des jeunes du CEF.

Rencontres à NEUF DE CŒUR (II)

Pour « Close To Me », Léa, Victoria, Mattis, Matys et Théo, un groupe des jeunes du CAJ d’Annequin, ont rencontré et interviewé Théofilo, Enzo, Chloé, Théo, Soni,  Boro, Natacha et Fernado, des jeunes de « 9 de cœur » à Lens.
Léa, Victoria, Mattis, Matys et Théo reviennent ensuite à Culture Commune et reparlent des rencontres de cette après-midi.
Cette après-midi, nous étions à « 9 de cœur », c’est une association qui aide les personnes qui ont des problèmes de logement. Les gens qui sont ici viennent pour quelques semaines ou parfois plusieurs mois ou plusieurs années. Il y a des gens seuls et il y a aussi des familles entières qui ont des appartements.
Pendant les interviews, il y a des questions qu’on n’a pas osé poser.
Par exemple au garçon qui disait qu’il vivait dans sa famille d’accueil et que le week-end il venait voir sa mère qui habitait à « 9 de cœur ». On se demandait pourquoi il ne vivanit pas avec sa m ère, si c’était parce que l’association ne pouvait pas l’héberger ou c’était pour une autre raison. Et aussi il y avait l’autre garçon qui lui habite à ici « 9 de cœur », avec sa famille, et qui a une heure et demie de trajets, en prenant deux bus, pour aller au collège tous les jours. Pourquoi il ne change pas de collège ?  Et aussi on n’a pas osé demandé ce qu’il s’était passé pour qu’ils arrivent dans cette association.
On n’osait pas poser ces questions parce qu’on avait peur de paraître indiscrets. Et ce n’est pas bien de s’immiscer dans la vie privée des gens parce qu’on peut frustrer la personne et elle risque de vouloir arrêter complétement l’interview. A priori, c’est bien de tout dire, mais faut faire attention à la manière de le dire, parce qu’il ne faut pas blesser les gens, on ne sait pas ce qu’ils ont vécu.
C’était étrange d’interviewer des gens qui ont le même âge que nous et de voir que nous avons plus de chance qu’eux. Eux aussi ils mériteraient d’avoir la même chance que nous.
Après les interviews, on a discuté, ils nous ont posé des questions. Ils voulaient savoir ce qu’était le CAJ, alors on a racontait ce qu’on y faisait, et là, ils ont eu envie d’y venir aussi. Ça nous a fait mal au cœur quand un des jeunes nous a demandé vraiment comment faire pour venir au CAJ d’Annequin, parce qu’on a dû lui dire que ce n’était pas possible pour lui, qu’il ne pouvait pas venir avec nous, parce qu’il fallait habiter Annequin, parce que ça passait par la mairie d’Annequin. Et comme il habitat Lens, il fallait qu’il se renseigne dans sa ville. Ça nous a fait mal au cœur.
Mais quand on leur a parlé du « vivre ensemble », ils nous ont tous dit qu’ils arrivaient bien à « vivre ensemble » dans l’association, qu’ils arrivaient à bien s’entendre, que les malentendus étaient vite réglés. Et même que le fait de vivre presque en « co-location » ou en « commun », ça créait des liens d’amitié plus forts qu’ailleurs.

RENCONTRER NEUF DE CŒUR (I)

D’abord, l’entrainement à l’interview, pour les jeunes du CAJ d’Annequin. Culture Commune (Loos-en-Gohelle).

Ensuite, les vraies interviews, à l’association « 9 de cœur » (Lens).

Puis, toujours à « 9 de cœur », on s’attable. Les jeunes interviewés posent des questions aux jeunes intervieweurs.

Et, retour à Culture Commune, les intervieweurs reviennent sur les rencontres de cette après-midi.

« Vivre ensemble », le débat

Ce qu’on en dira le soir :

Le débat sur « vivre ensemble »,  c’était long.  – Le débat c’était bien parce ça nous permettait de mettre toutes nos idées en commun. – C’est bizarre, quand on est au collège, un débat, ça ne marche jamais. Ici ça a marché, on était entre nous et du coup, on était à l’aise, c’est ça qui était super. – Mais le débat était long. – Oui, mais on cherche ensemble. Ça arrive que ce soit long, mais c’est intéressant. On est en train de chercher ensemble. C’est volontaire un débat long, parce qu’au bout d’un moment on se creuse la tête pour aller quelque part.

Quelques moments du débat de l’après-midi dans la salle des ressources :

Vivre ensemble ? – Tous unis, tous solidaires. – Respecter, accepter les différences culturelles, religieuses, physiques, ne pas avoir de préjugés. – Vivre ensemble, c’est passer des moments ensembles, bons ou mauvais. – On peut ne pas aimer une personne, ce n’est pas pour autant qu’il faut la critiquer ou lui faire mal. – À l’école, on apprend à partager, à ne pas se moquer, à mettre des limites, à respecter les règles quoi. – Le problème c’est le harcèlement, le jugement de l’autre qui revient tous les jours, ça devient du harcèlement. On ne s’en rend pas compte tout de suite. Faudrait faire vivre aux harceleurs ce qu’ils font vivre aux autres. – Non, faut pas faire ça, ça fait très mal, il ne faut pas le faire à une autre personne. – Les harceleurs, ils s’en prennent à des plus faibles pour cacher une souffrance qu’ils ont. Se moquer d’une personne plus faible, ça les rassure, ils se sentent plus forts, ils se sentent mieux. En fait, ils ont eux-mêmes des problèmes. – Il faut essayer de ne pas juger.

Vous jugez sur quoi ? – Au premier abord, on va tous se dire des choses, on a tous une manière de juger. On fait tous ça. – On juge sur l’apparence, le physique, la façon de s’habiller, la façon de parler. – Alors, si on a des critères de jugement,  c’est qu’on est aussi concerné par cette histoire-là. – On a tous un côté noir. La méchanceté. Ça se réveille quand on ne se sent pas assez aimé. Ça vient de la jalousie – Un monde harmonieux, ce n’est pas possible, on est tous différents.

Est-ce que réussir à vivre ensemble, c’est réussir à ne pas être d’accord ? – Vivre ensemble, c’est faire un débat sans violence, que tout le monde puisse donner son avis sans être jugé. Un débat ça permet de dire ce qu’on pense, de ne pas cacher ce qu’on ressent, et ça, ça évite de créer des tensions. Faut accepter l’avis des autres.

Qu’est-ce qu’on ne supporte pas chez l’autre ? – Je ne supporte pas qu’on me prenne de haut. Souvent c’est les riches. Ils nous jugent avant de nous parler. – Je n’aime pas les sociétés où on n’a pas tous les mêmes droits. – Je n’aime pas les gens qui veulent toujours avoir raison. – Les riches, ils nous regardent de haut. Ils étalent leur argent. Ils nous méprisent parce qu’on est pauvre. – Ils ont le droit d’avoir de l’argent, mais ils ont pas le droit de s’en venter. – En faisant ça, ils nous méprisent. – Ce n’est pas une histoire de catégorie. C’est une histoire de respect ou une histoire de mépris. – Oui, mais les catégories existent et les riches vivent dans un monde de riches, et ils ont du mépris pour les autres. – Ces catégories on peut décider de ne pas y adhérer. – Oui, mais quand même.