N.B -carnets de route-

On s’active fort. On prépare l’Instantané au lycée Béhal à Lens. La semaine prochaine. Notre professeur référent au lycée est Nathalie Baraka. La belle soeur de Kader Baraka qui a travaillé à HVDZ  pendant des années. Kader est mort en juillet 2003. On s’en souvient comme si c’était hier. On avait joué le spectacle « j’m’excuse », quelques jours avant sa disparition, à la bourse du travail à Lille en soutien aux travailleurs sans papiers en grève de la faim. On avait diffusé aussi le film « Oh Mamie », un documentaire qu’avait réalisé Sophie Oswald sur la lutte des exilés à Calais. On avait diffusé ce film sur le mur de la maison folie à Wazemmes. A Lille. Le bâtiment était encore en construction. On s’en souvient comme si c’était hier. Quand on est allé à Mostaganem pour travailler avec Hamid Ben Mahi en Algérie, on est allé visiter la tombe de Kader à Bou Sfar au cimetière Sidi Bou Amar. A la périphérie d’Oran. Il pleuvait des cordes. Oran était noyée dans le brouillard.

armoire -carnet de route-

Dans la nuit,quand on est rentré de Paris, le train avait beaucoup de retard parce que des personnes avaient jeté une armoire sur un TGV du côté de Bapaume. Tous les trains étaient déroutés sur une ancienne ligne qui passe par Creil. Quelqu’un derrière nous s’impatientait. Il a téléphoné. Il a dit, au téléphone, je ne sais pas quand je vais arriver, pour l’instant je roule dans la pampa entre Longueau et Arras.

tremblay -carnets de route-

Hier on est allé à Tremblay. On a vu Emmanuelle, Delphine et Jamal. Quelle chance on a de les connaître! Ils font un travail formidable au théâtre Aragon à Tremblay. Et c’est toujours plein. Tout le temps, tous les jours, le théâtre Aragon organise des rencontres entre des habitants de Tremblay, de Villepinte et des artistes de Villepinte, de Tremblay et de partout. Au théâtre Aragon, on réenchante le monde. Sans jamais rien lâcher. Hier une dame qui vient faire de l’aide aux devoirs à la médiathèque disait à Delphine, tous les samedis mon fils me demande si on va au théâtre. Elle dit j’aurais jamais pensé avoir des enfants qui s’intéressent au théâtre. Jamais j’aurais pensé que moi aussi un jour j’irais régulièrement au théâtre. On a demandé à Jamal si on pouvait utiliser la vidéo qu’on a faite avec lui quand on a réalisé la veillée à Tremblay. On a beaucoup parlé des actions du théâtre sur la ville. Dans le théâtre, les écoles, les centres sociaux… On a beaucoup parlé d’Hamid Ben Mahi, de Hassan Razak, de Hervé Sika…. Des artistes familiers d’Aragon et d’HVDZ. On a beaucoup discuté des Atomics. On a hâte de retourner à Tremblay.

communistes -carnets de route-

Il y a des gens qui nous ont  particulièrement marqué sur la veillée de Guyancourt. Deux communistes. Des montagnes de questions.  Ils ont tous les deux quitté le parti communiste parce qu’ils ne croient pas à la social-démocratie et l’alliance avec le parti socialiste. Leur parti s’appelle aujourd’hui, Communistes. Elle, elle donnait l’impression d’avoir toujours le cœur au bord des lèvres.  Ce sont des gens immensément cultivés. Qui savent tout des luttes ouvrières et de l’histoire du mouvement ouvrier. On n’arrivait pas à partir. Toujours il nous disaient quelque chose. Nous parlaient de quelqu’un, nous montraient une photo. Lui, il peint. Elle, elle s’occupe beaucoup de généalogie. Elle est remontée dans sa famille jusqu’au début du 17ème siècle. A les écouter toujours on était saisi par l’émotion. Les histoires personnelles se mélangeaient à l’histoire du parti communiste. Ils nous ont dit tant de choses de leur vie, de leur amour, de leur engagement… De leur trop plein de tout qu’ils n’auraient pas assez de mille vies.

palimpseste -carnets de route-

On se rappelle quand on est arrivé à Liévin au théâtre Arc en Ciel. Avec le Ballatum Théâtre.  A l’époque la grande porte de garage qui barre l’accès à l’entrée des artistes n’existait pas. Le théâtre venait d’être construit. On avait été installé là par la DRAC (direction régionale des affaires culturelles). On est resté six ans à Liévin. Après on pensait s’installer au 11/19. On avait écrit un projet. Quelque chose qui ressemblait à ce que faisait J. Grotowski à Pontedera. Mais avant d’arriver au 11/19 on est passé par Caen. Et Culture Commune a pris les rênes de la Fabrique du 11/19. On n’est pas resté longtemps à Caen. A Douai cette semaine il y avait un spectacle, Hamlet à l’hippodrome mis en scène par D. Bobé qui a été l’assistant d’Eric Lacascade qui dirigeait le Ballatum théâtre à Liévin. Dans ce spectacle jouent plein de gens qui faisaient partie du Ballatum… Sentiment de la vie en palimpseste comme dit Annie Ernaux dans Les Années. Des couches de papiers qui se décollent quand on retapisse.

tourner. ne pas tourner.

On est à la veille de créer ce spectacle performance, Les Atomics. Les répétitions démarrent dans deux ou trois semaines. On est sur le pied de guerre. Howard Richard nous rejoindra dès la fin du mois. On se pose plein de questions. Comment faire et tout… Tourner. Ne pas tourner Les Atomics. En avoir la possibilité. Ne pas en avoir la possibilité… On va faire ce qu’on n’a encore jamais fait. On travaille une quinzaine de jours et on fait dix représentations dans la petite salle (salle 2) de la fabrique. Et après on repart d’un lycée à l’autre. D’une ville à l’autre. Les Instantanés, les Portraits de villages, les Veillées… La semaine prochaine avant le démarrage des Atomics, on intervient au Lycée Behal à Lens. Instantanés.  Et puis il y a deux jours de formation à la conférence gesticulée avec Le Pavé. Toute la compagnie y participe. Ensuite, c’est les Atomics…

le metteur en scène est un dictateur – carnets de route –

On a demandé à tout le monde de la compagnie HVDZ ce que serait une compagnie « idéale » de spectacle vivant . Comment ça pourrait fonctionner et de quoi ça parlerait?  Quand on avait fait le stage avec les gens du Pavé, ils nous avaient demandé ce que pourrait être pour nous une société idéale? On avait tous dit dit que ce serait une société autogérée, à peu de choses  près. On aimerait tellement que tout ce qu’on appris avec le Pavé ne reste pas lettre morte. Que ce soit réactivé d’une manière ou d’une autre. On s’était promis une réunion en novembre sur les tenants et les aboutissants de la compagnie et Olivier a eu cette idée de nous demander à chacun de dire ce que serait une compagnie idéale. Et de raconter une anecdote qui a trait à un moment vécu dans la compagnie. On a parlé de la soirée des Molière en 2005 qui s’est terminé en poulet frites à la gare du nord à Paris. D’ Anthony du Pavé qui dit que les metteurs en scène de théâtre sont des parfaits dictateurs. Et de Lucien Suel et Stella Bommel dans la cuisine du 11/19. Lucien Suel a dit, je ne savais pas que t’étais à ce point un autocrate. Stella Bommel a quitté la compagnie en 2005. On se dit souvent entre nous que les gens qui quittent les compagnies de théâtre ou de spectacles vivants en général n’y reviennent jamais. C’est que les réputations des metteurs en scènes ne sont pas usurpées. Il y a un travail sociologique qu’il faut avoir lu là dessus, de Cécile Offroy qui s’appelle, le déni en jeu. On a entendu parler hier à la radio  de Fanny Chiarello qui a écrit aux éditions de l’Olivier un nouveau livre, l’éternité n’est pas si longue; ça remonte à loin. Fanny Chiarello a suivi l’atelier du Ballatum Théâtre à Liévin avant la fin du Ballatum à Caen (1997) et son centre dramatique.

bail bail -carnet de route-

Bientôt Les Atomics, ce spectacle éphémère présenté dix fois à la Fabrique à Loos en Gohelle. Répétition en décembre et on joue en janvier. Comme un retour sur les Veillées. Les habitants qu’on a rencontrés. Le rapport au Louvre Lens. On a entamé en septembre notre huitième année de veillée. C’est pas étonnant qu’on ait trouvé cette forme de travail. On est resté si longtemps enfermé dans les théâtres, coupé du monde. Sans voir la lumière du soleil. C’est pas une vie. Fallait absolument qu’on trouve une ouverture sur l’extérieur, quelque chose à raconter aux gens. Les théâtres ont longtemps représenté dans beaucoup de pays des lieux où les gens venaient voir des spectacles  mais aussi se retrouver, dialoguer, refaire le monde. On allait dans certains théâtres plus que d’autres parce que c’était des lieux différents où la parole semblait plus libre et partagée. Nous, en majorité, on a connu que les théâtres de spectacles tous mieux les uns que les autres. Tous plus beaux les uns que les autres. Point barre. Le reste, en ce qui concerne  la relation aux gens, aux habitants, la communauté, la politique au fur et à mesure, c’est passé à la trappe. Sauf au Prato au début avec des spectacles comme Silence on détourne où Bail Bail avec Jacques Motte et Françoise Azaïs.

à quoi bon rêver – carnet de route –

Hier, on est allé distribuer des questionnaires dans les cités autour de La Fabrique à Loos-en-Gohelle. Un questionnaire imaginé par Le Pavé, nos camarades de l’éducation populaire. Un questionnaire dont on discute chez soi ou au travail, au bar, en marchant, en faisant le tour des terrils, en voiture, dans le train, au restaurant…
Quelqu’un dans le quartier nous a dit, faut vous le renvoyer tout de suite ? – non c’est  un questionnaire à discuter entre vous. Un questionnaire sur la réforme des retraites, les vrais problèmes, le mouvement social, l’image de ce mouvement social, les manifestations, les modes d’actions, le rapport à la violence, et vous ? C’est toujours agréable de passer du temps dans le quartier. On pensait faire un journal. On n’a pas fait de Veillée cette année dans le quartier. Ce serait l’occasion encore de déambuler dans ces rues si particulières de la cité du 11 et du 19. Pour distribuer le journal nous-mêmes et donner de nos nouvelles et prendre des nouvelles des habitants. Hier, on a parcouru la rue Saint-Pierre. A l’heure (quand la vie se tait doucement) où le soleil semblait se poser juste au bout de la rue. Sur la ligne de chemin de fer. Faut sortir dans le quartier. Ou La Fabrique deviendra étrangère aux habitants des environs. Le site du 11/19 et La Fabrique ont pris de l’envergure. On y vient travailler d’un peu partout. Mais on n’y habite pas. Faut pas co-exister sans n’avoir rien à se dire. A quoi bon sinon rêver de plus d’écologie et de justice sociale ou de démocratie participative?

grand bleu et apprentis – carnet de route –

Hier, on est allé au Grand Bleu à Lille et puis au centre de formation professionnelle du Nord-Pas-de-Calais pour mettre en place des interventions-Instantanés dans quatre lycées avec le Grand Bleu, Culture Commune et La Condition Publique et imaginer l’organisation d’ une Veillée particulière avec les CFA, (Centres de Formations d’Apprentis) de toute la région, si cette proposition est retenue.
Au Grand Bleu aura lieu au mois d’avril, un temps fort de deux ou trois jours qui réunira les différents lycées où nous serons intervenus. Nous avons pensé à des installations de photos et de vidéos mais aussi des actions comme les porteurs de paroles ou les conférences gesticulées pour transmettre des pratiques d’éducation populaire apprises avec Le Pavé. Qu’on retrouve sur le site du pavé: http://www.lepavé.org. Notre agenda se remplit considérablement. Tous les Veilleurs seront-ils disponibles tout le temps?  Si on avait les moyens on pourrait engager tout le monde à temps plein. Nous serions plus présents encore sur le terrain. Il faut du temps pour chacun. Hier, on a lu Ph. Henry, « Arts de la scène » : un tournant nécessaire. Il y dit que « les mondes de l’art pourraient trouver de nouveaux développements en passant de de la convention d’originalité à une convention d’identité. Désormais ils auraient en particulier pour fonction d’aider les individus à se trouver, à s’inventer, à se distinguer… »