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répétitions dans l’après-midi

Le film-spectacle, le Portrait du Douaisis, c’est à 19h, dans la très belle salle du château de Bernicourt. Là, c’est l’après-midi, on répète, on passe les vidéos, on répète les danses, la chorégraphie des mains de Cathy, l’adage devant les interviews à l’Episol. On sait que le château de Bernicourt, à Roost-Warendin, c’est loin et pas facilement accessible. Mais on espère beaucoup voir du monde ce soir, et retrouver aussi, parmi les spectateurs, les personnes que nous avons rencontrées pendant toute la semaine.

 

Tomber !

La rencontre avec les personnes qui travaillent sur la précarité, qu’il s’agisse des épiceries solidaires, du secours populaire ou encore du secours catholique, nous plonge dans les réalités des parcours de vie. Les personnes précaires leur témoignent souvent « Ça fait du bien d’être écouté ! ». Cette écoute sans jugement est un premier besoin.
Ces humains qui accueillent les personnes en grande difficulté sont toujours étonnés par la fragilité des parcours de vie. « Ces personnes en précarité ont parfois un emploi, c’est absurde ! ». Et pourtant ! le reste à vivre est de moins de 10 euros par jour, par personne et par foyer. Ils nous expliquent leur surprise de la banalité d’une dégringolade : un divorce, la perte de leur emploi… Et parfois, il suffit de pas grand-chose, la perte d’un permis de conduire, un passage à la retraite pas raccord et des agios qui s’accroissent inexorablement.
Ces personnes qui accueillent, témoignent « Ces accidents de la vie sont rarement liés aux personnes, mais sont bien souvent causés par des dysfonctionnements de l’organisation de la société ».
La période du covid et l’inflation ont aggravé la situation.
Ces humains qui accueillent et nous accueillent sont souriants, rayonnants, chaleureux. Ils sont là où ils veulent être et font ce qu’ils ont à faire. Faire que des gens ne tombent pas, pour que notre société ne s’écroule pas !

La grève des mineurs de 1963

Cette grève des mineurs de 1963 n’a rien à voir avec l’alimentation ! Pourtant, au gré de nos rencontres, cette grande histoire nous est contée. Le courage, l’abnégation de ces mineurs qui ont souhaité conquérir leurs droits. Ces travailleurs qui ont milité pour une vie digne fait écho à cette société actuelle qui ne permet plus à des personnes avec un emploi de vivre dignement.

L’Histoire, ils nous la racontent pour nous dire la régression et la dégringolade du système social d’aujourd’hui. Les personnes en difficulté ne sont pas un chiffre, un simple constat, ce sont des Humains, des familles, des enfants, des réalités quotidiennes qui sont inacceptables dans un pays comme la France.

Alors, la grande histoire, ils nous la racontent comme un rappel, une alerte qui encourage à ne pas baisser les bras. Ils nous racontent la solidarité à l’échelle nationale pour que ces mineurs tiennent le coup d’une grève qui leur coute leur salaire, leur capacité à nourrir leurs enfants. On nous a raconté : « Imagine ! Ces mineurs ont mis leurs enfants dans des cars sans savoir où on les envoyait. Ils savaient seulement qu’ils seraient accueillis, bien nourrit par des familles non mineurs qui les soutenaient pour que eux tiennent le piquet de grève ! »

Une solidarité qui n’avait pas de frontière géographique, pas de frontière culturelle, pas de frontière sociale. Un élan de solidarité, un moment dans l’histoire où nombreux sont ceux qui ont souhaité créer un monde juste.

On lâche rien

Ça y est on a terminé les interviews
des jours intenses, ces jours où on est là – entièrement
Dans nos têtes sont ancrées les paroles les regards
Ce qu’on a vu
Ce qu’on a vécu

Il y a quelque chose là, dans les murs, dans la ville, dans les endroits dans lesquels on entre, les trottoirs qu’on arpente, les portes auxquelles on sonne
quelque chose qui résonne
Ici c’est la merde nous a dit quelqu’un
Mon quartier si c’était une chanson, ça serait les portes du pénitencier a dit un autre
Oui on va pas se mentir c’est pas tout le temps facile
et pourtant ici il y a beaucoup de sourires
Ici on regarde les choses en face
On regarde les gens dans les yeux
Ici on part pas
On s’accroche
Ici on lâche rien
Ici on peut pas lâcher
Ici
ici il y a celle qui a osé pousser la porte du local et c’était difficile la première fois et puis elle est restée
il y a celle qui n’arrivait plus à manger parce que c’était trop dur la solitude, et qui a remonté la pente, lentement
Il y a des gens qui font avec rien et c’est pas normal, en vrai c’est pas normal
Il y a celle qui a arrêté de travailler parce qu’elle préfère aider les autres, et si c’est pas reconnu eh bien tant pis
Il y a celui dont les parents voulaient qu’il fasse autre chose et il a repris l’activité même si c’était difficile
Il y a celle qui te dit que ce soir elle aimerait rentrer tôt mais en fait on parle encore ensemble sur le pas de porte parce que c’est passionnant, et qu’il y a tellement à apprendre
Et elle, qui te dit que bien sûr elle a aussi ses problèmes, que bien sûr elle ne compte pas ses heures mais que le soir elle dort bien, la conscience est tranquille et le corps fatigué
Il y a celles et ceux qui font les permanences, les dossiers, l’accueil, ça leur prend du temps mais ils ne s’imaginent pas ailleurs
et ils te disent faire autre chose pourquoi faire puisque c’est ici qu’il faut être

Il y a celles là, ceux là qui sont d’une justesse pas possible dans leur gestes leur regards leurs mots, qui te donnent des frissons rien qu’à les écouter
Et on aurait envie que tout le monde les connaisse, que tout le monde les entende parce qu’ils disent qu’il faut garder le sourire, et c’est pas une posture, parce qu’ils et elles l’ont, le sourire

Ceux là et celles là – en vrai c’est vous qui la tenez, la société qui se fissure de tout côté
C’est vous qui lâchez rien
c’est pas normal mais c’est comme ça

On lâche rien
On peut pas lâcher

ÉCOLE, seconde partie

Dans les Veillées, on fait des « protocoles ». Un protocole, c’est une action courte qu’on propose aux gens qu’on rencontre et qu’on filme. Pour permettre à tous et toutes de faire partie de notre film spectacle.
Ce matin, on propose aux élèves de Pascaline deux protocoles qu’on adore faire avec les enfants. « Godot » et « Les Bêtises ».

Les bêtises, ce sont celles faîtes en classe par les enfants. D’abord, il faut les écrire au tableau et choisir les meilleurs. Puis, on les rejoue à notre façon, avec les élèves et la maitresse. Bénédicte fait quelques fautes, heureusement que Pascaline a sa craie rouge pour corriger ça.

 

Isabelle à la colère. Dorothée à la caméra.

Godot, c’est un grand même de théâtre… Et de dispute ! Isabelle joue avec les enfants une scène de « En attendant Godot ». Pas facile de se mettre en colère sur commande, devant la maitresse et les copains. Pourtant, Isabelle est un bon modèle !

ÉCOLE, première partie

Le potager de l’école Denis Papin
Pour faire la soupe de potiron

À l’école Denis Papin, les enfants travaillent toute l’année autour de l’alimentation. La recette phare de l’année, c’est la soupe au Potiron ou au « Petit-ron », on ne sait pas toujours très bien. Ils nous disent qu’ils ont refait la recette à la maison, avec leurs familles.
Comme la cuisine, ça se partage, on vous transmet à notre tour la recette !
Pendant l’année, les élèves ont appris à classer les aliments par catégories, réfléchi à leurs aliments préférés, appris d’autres recettes, cuisiné en classe, fait des dégustations. À l’école, il y a même un potager. C’est encore un peu tôt, il faut patienter encore un peu pour récolter les premiers légumes de l’école.

ÉCOLE, INTRODUCTION

Aujourd’hui, on fait la rentrée en même temps que les élèves !
Trouver une école et des enseignants disponibles pour pouvoir échanger pendant les vacances scolaires, pour organiser et nous accueillir dans leur classe… c’était assez incertain !
Heureusement, Pascaline et Nathalie ont répondu présentes, se sont démenées, ont envoyé les infos et appelé les parents pour prévenir de la venue de la compagnie HVDZ.

On débarque à 8h30 à l’école Denis Papin, elles nous donnent les autorisations de droit à l’image pour chaque élève et nous présentent leurs classes : les CP/CE1 pour Pascaline, qui est aussi la directrice de l’école, et les moyennes et grandes sections de maternelle pour Nathalie.

On a plein de jeux à proposer aux enfants. Toute la matinée, ils deviennent comédiens et comédiennes, danseurs et danseuses.
Même pendant la récré, on ne s’arrête pas. Mourad offre une danse aux élèves de primaire, Dorothée aux élèves de maternelle.

Rencontre en visio avec Antoine Demailly de l’association Les sens du goût

D’habitude, on rencontre les gens pour de vrai, mais là, le « Portrait » a pour thème l’alimentation, alors, même si le territoire est grand, « Les sens du Goût » on ne pouvait pas les rater. Mais on n’était pas au même endroit au même moment. C’est en visio qu’on rencontre Antoine Demailly, coordinateur pédagogique de l’association Les sens du Goût. L’équipe s’adapte à de nouveaux protocoles.

Antoine Demailly travaille depuis plus de 20 ans sur l’éducation alimentaire auprès des enfants et des adultes. Il nous raconte :

« Les sens du goût est une association qui milite pour le plaisir de manger. Un plaisir qui est central pour notre santé et notre bien-être. On trouve que venir les voir en leur parlant de plaisir, c’est un super outil pour aller à la rencontre des gens et mettre les personnes en mouvement.

« On fait des ateliers avec des habitants de tout âge, des formations autour de l’éducation au goût et de l’accompagnement de projet pour créer du lien entre différents acteurs d’un territoire. L’alimentation sur un territoire implique de créer du lien, car c’est un sujet très transversal qui implique beaucoup de gens. L’idée est de créer la rencontre, de créer un contexte joyeux, décontracté et convivial pour aider à la coopération.

« Ce qui nous importe le plus est que les gens repartent de nos ateliers avec de jolis souvenirs sur ce qu’ils ont gouté, sur les personnes qu’ils ont rencontré et sur ce qu’ils ont fait ensemble. Pour nous, intervenants de l’éducation à l’alimentation, c’est la meilleure façon de faire découvrir d’autres aliments, d’élargir sa culture alimentaire et de la partager avec d’autres.

« Par exemple, si on découvre la bouillabaisse chez des amis lors d’un repas super sympa, on aura beaucoup plus envie de la refaire à la maison que si notre médecin nous dit il faut que tu manges de la bouillabaisse, c’est important pour ta santé.

« On n’aborde pas les gens avec un message frontal nutritionnel. Cette méthode, on n’y croit pas. Il faut apprendre à s’effacer. Notre envie principale est de créer auprès des gens des moments où ils se sentent bien au sein d’un groupe, où ils découvrent des recettes, les nôtres ou celles des autres participants. Notre vigilance principale est de ne pas être normatifs et de ne pas dire ce qui est bon à manger ou ce qui ne l’est pas. Finalement notre avis compte très peu, car il n’y a pas de raisons que moi, en tant qu’animateur, j’ai de meilleures solutions que les autres.

« Concrètement, on fait un mixte entre des ateliers cuisine, parfois avec de fiches recettes et d’autre fois pas. Ils peuvent décider de cuisiner autrement que ce qu’on propose. On propose des ateliers sensoriels pendant lesquels on essaie d’être attentifs aux couleurs, aux odeurs, aux textures, aux saveurs des aliments… Puis, on prend un temps pour décrypter les sensibilités de chacun. Ce qui est chouette est qu’on a tous des sensations différentes, des évocations de souvenirs différents autours des couleurs et des saveurs. Ce partage crée des moments conviviaux où chacun se sent écouté et respecté autant que les autres.

« Nous intervenons aussi auprès des enfants. C’est à cet endroit que je parlais d’éducation alimentaire. Pour moi, ce qui est important sur l’éducation alimentaire auprès des enfants, est de sortir du discours et de leur faire vivre des expériences. Simplement, être attentif aux regards sur une rondelle de carotte, le bruit que fait la pomme quand on la croque, la texture d’une mie de pain. Ensuite, vivre l’expérience de cuisiner, ou rencontrer des producteurs. Puis, partager un moment à écouter ce que chacun a vécu et ressenti. Ces échanges créent des moments apaisés autour de l’alimentation. C’est dix mille fois plus efficace d’avoir ces temps en faisant découvrir les aliments que de leur expliquer la nutrition. On éveille leur curiosité, on leur apprend à découvrir de façon très simple chaque aliment. J’espère que cela les outillera pour la vie. En tout cas ces moments créent de belles rencontres.

« L’essentiel pour nous est de bien comprendre que nos comportements alimentaires sont construits de manière complexe par notre histoire familiale, régionale, individuelle et reposent sur des questions économiques, de santé… Quelle est l’accessibilité de chacun à tel ou tel aliment. Face à cette complexité, plus on abordera l’alimentation avec des discours sur ce qu’il faut faire, des injonctions, des propositions normatives, plus on se confronte au risque d’avoir des personnes qui nous disent « je ne peux pas » ou « ce n’est pas ma culture » ou « je n’ai pas envie, moi ce que j’aime, c’est autre chose ». Donc, il faut sortir au maximum du discours et installer les conditions pour créer la rencontre, créer l’écoute, que ce soit pour les enfants et surtout les adultes, qu’ils puissent se sentir respectés et non jugés. »

Quel est ton plat rêvé ?

« Depuis longtemps, je rêve d’un repas, je ne sais pas de quoi il serait composé exactement, mais il serait composé de nombreux aliments qui nous entourent. Au préalable, les endroits où ils poussent seraient filmés en plan fixe. Tout en préparant le repas à plusieurs, sinon ce n’est pas marrant, et en le mangeant, nous serions entourés d’écran qui nous plongent dans les endroits où les aliments ont poussé. »