Dorine est là, penchée sur la table, absorbée par les images de la journée. Elle sélectionne, elle trie, mais surtout elle regarde. Cette manière qu’elle a de se pencher légèrement, d’approcher son visage de l’écran pour mieux saisir ce qui échappe aux yeux trop pressés, dit déjà beaucoup. Son geste est précis, mais jamais brusque. Elle avance d’un doigt, revient d’un autre, et l’image qui défile devant elle semble se calmer sous son attention.
Son poignet tourne doucement, le bracelet tressé suit le mouvement, presque timide. Elle écrit une note, un mot, une flèche. Elle le fait comme on trace quelque chose dont on veut se souvenir longtemps. La lumière venue de l’écran éclaire sa main, puis remonte sur son bras, et dans cet éclairage-là, on sent ce qu’elle met dans son regard: une patience rare, une justesse sans calcul, une écoute silencieuse des gestes des autres.
Autour d’elle, le désordre des outils raconte sa journée: une paire de lunettes laissée de côté, une carte SD encore ouverte, un clavier trop sollicité, une feuille blanche devenue refuge pour quelques mots au stylo bleu. Mais elle, au milieu de tout cela, reste étonnamment tranquille. Elle fait corps avec ce qu’elle voit, avec ce qu’elle choisit.
Je la regarde travailler et quelque chose en moi se pose aussi. Peut-être parce qu’elle sait trouver ce qui résonne, ce qui respire, ce qui tient debout dans une image. Peut-être parce qu’elle n’a pas besoin de beaucoup de mots pour comprendre ce qui compte. Peut-être parce que, dans la manière dont elle observe le monde, il y a quelque chose qui donne envie de rester un peu plus longtemps à côté.
Elle poursuit sa sélection, sans se douter de la douceur qu’il y a à la regarder faire. Et l’image suivante apparaît déjà sur son écran, accueillie par son regard, comme si chaque photo trouvait naturellement sa place entre ses mains.










