Rexpoëde
Éco’Rex’Ponsable
Ysabel et Catherine s’occupent de l’école des consommateurs. Elles ont déplacé la séance du jeudi matin à aujourd’hui exprès pour que nous puissions rencontrer le groupe, mais du coup, il n’y a personne. Pas grave ! On échange quand même sur leurs idées, autour d’un café.
À l’initiative de la CAF et financé par la région, elles ont ouvert un atelier hebdomadaire de consommation responsable. Ce sont surtout des mamans qui viennent, des mamans isolées. Les séances commencent toujours par un échange tranquille autour d’un café et de gâteaux. Ces moments sont importants parce que les dames racontent ce qu’elles vivent, et Ysabel et Catherine y trouvent les idées pour préparer les thèmes des séances suivantes. Là, elles prévoient un atelier de confiance en soi, avec une thérapeute et une conseillère en esthétique. Dernièrement, elles ont fait plusieurs séances autour des économies d’énergie, avec des intervenants d’EDF ou d’associations de consommateurs. L’important, c’est de parler à un niveau que tout le monde comprend. Elles sont aussi allées visiter un appartement témoin à Grande-Synthe. Sur les tables, elles ont étalé tout un ensemble d’outils de travail, qu’elles ont conçu avec d’autres écoles de la consommation : jeux de plateaux pour apprendre à remplir son frigo en fonction de son budget, grands tableaux pour savoir quels sont les légumes de saison et de région, petites recettes pour confectionner soi-même ses produits ménagers écolos.
la représentation du portrait a lieu, salle Colette-Bel La Source, samedi 23 mars 2013 à 17h et 20h30
Le Porte à Porte pendant les Veillées et les Portraits est une occupation particulière. Il est surtout pratiqué par Jérémie pour réaliser les Pas de Porte. Ça peut prendre des heures. Comme cet après midi. On est parti à quatre équipes parcourir Rexpoëde pour recueillir des Portraits Chinois, des objets pour notre musée des objets qui ont de la valeur pour les personnes de Rexpoëde et des citations. On ressort le même topo à chaque fois mais c’est quand même un peu différent. Et puis surtout ça dépend des gens qu’on a en face de nous. Les gens, la plupart du temps sont surpris de nous voir débarquer avec nos tracts, nos citations et nos caméras et l’ambiance se détend en général très vite. On réfléchit alors ensemble à comment faire de cet instant un moment marquant qui donne envie de venir à la représentation du Portrait ou de la Veillée. Il faut être patient et optimiste. Aller d’une maison à une autre. Jusqu’au bout du village. Persuadé et convaincu qu’on va trouver notre bonheur !
En passant

Les trois grâces

Madame Denayere est venue nous dire quelque chose
Quand on aime son village, on le fait vivre. Bien sûr on a une boucherie, une boulangerie, une pharmacie, un docteur, un vétérinaire, un ostéopathe, mais on a plus de marchand d’habits, ni de marchand de chaussures. Bien sûr, on a la supérette, et on y trouve de tout, mais quand il n’y a pas ce qu’on veut, et qu’on a pas de voiture, alors comment on fait. Moi je suis venue vous dire ça, il faut pas que plus de commerces ferment à Rexpoëde, le commerce, c’est la vie du village. À une époque, y’a eu jusqu’à soixante bistrots, ici.
Madame Denayere est venue avec un sac, lourd, sous le bras : des articles de journal, des photos, des plans, tout un tas de documents – son trésor, conservé au fil du temps : événements sportifs et politiques, faits divers (comme cette dame qui vivait chichement et qu’on a retrouvée morte sur un tas de louis d’or ou ce hold-up à l’ancienne poste), inaugurations, départs en retraite, célébrations des anniversaires de centenaires, pose du tout-à-l’égout, récompenses, décorations, affiches de liquidation des stocks avant la fermeture définitive de tel ou tel commerce – tout est là, une histoire de Rexpoëde faite par une de ses habitants.
Dans la grande histoire, il y a la petite histoire : Madame Denayere a commencé par travailler chez ses parents, à la boulangerie-café-confiserie, puis elle a ouvert son épicerie, et enfin une papeterie. Son mari était garde-champêtre, oh, ça n’existe plus, ce métier-là. Elle se replonge dans ses souvenirs d’enfance, les trois bombes qui sont tombées sur Rexpoëde pendant la guerre : une sur le garage, une sur la maison à côté de la boulangerie et une sur la boulangerie. Alors Maman était descendue à la cave, et nous, on s’était cachés sous le pétrin. Maman a réussi a remonter pour nous faire ressortir, c’est comme ça qu’on a été sauvés. Après on s’est réfugiés chez nos grand-parents. Mais il valait encore mieux être chez les grand-parents que chez des inconnus. Chez nous, comme la maison était assez grande, on a dû héberger des officiers allemands, et puis après la guerre, des réfugiés d’Dunkerque. Madame Denayere repense aux soirs de bal, aux jours de ducasse.
Et la vie, aujourd’hui, vous en pensez quoi, alors ? Oh, la vie, pour les jeunes, elle est fort changée, mais pour nous, ça nous dépasse.
malcom X
Après-midi de travail intense dans tout le village. On a fait du porte à porte dans tous les coins du village. On devait se rendre au terrain de foot pour demander aux footballeurs de nous dire des citations mais le match a été annulé. C’est la première fois à Rexpoëde depuis qu’on fait des Veillées et des Portraits qu’on fait l’objet de remarques racistes. Il nous est arrivé de subir des paroles sexistes, à l’endroit des danseuses mais c’est la première fois qu’on s’adresse à nous de façon raciste. On a rencontré beaucoup de monde cet après midi et plein de gens ont eu la gentillesse de jouer le jeu de nos Portraits Chinois. On pose quatre questions en porte à porte : Si Rexpoëde était une recette de cuisine, qu’est ce que ce serait ? Si Rexpoëde était une chanson ? Si Rexpoëde était un sentiment ? Si Rexpoëde était une oeuvre d’art ? Au café le Longchamp, on nous a répondu la naissance du monde de Courbet. On se disait entre nous ce midi que la réponse radicale est la seule réponse efficace au racisme parce qu’il est systémique, tout comme le sexisme et l’homophobie.
Der Himmel über Rexpoëde (Traduction : Les ailes du désir)

Porte à porte dimanche 17 à Rexpoede
C’est toujours au détour d’une rencontre qu’on prend pretexte pour échanger découvrir et souvent se questionner sur nous-mêmes. Le porte à porte permet de se présenter et de présenter la démarche de la compagnie. ça peut être magique, violent et formidable, de porte en porte on parle de nous, des autres, de ce que l’on est, de qui on est et de qui ils sont. Et c’est plus que jamais important de continuer à être là et à proposer ces rencontres.
Parfois se confronter aux portes fermées, aux portes qui claquent, aux portes où l’on entend de la vie derrière mais qui ne s’ouvrent pas. Derrière une porte qui s’ouvre on découvre un amour de 40 ans de fidélité toujours aussi fort, derrière une autre porte une famille formidable, ou encore un homme qui accepte d’être filmé mais qui ne trouve pas grand chose à nous dire là dans l’instant. On essaye de lui proposer des protocoles, des questions, un portrait chinois, mais il ne trouve pas de réponse, alors on n’ insiste pas. Il fait une citation et c’est déjà bien.
Et derrière cette autre porte, la personne rencontrée ne veut pas être filmée, on ne filme pas mais on continue a échanger, à se parler à rencontrer les habitants de Rexpoede le temps d’un instant. C’est bien là le problème, parfois, il ne s’agit que d’un instant et dans cet instantané de partage on privilégie le respect de l’autre et le bien vivre ensemble mais ce n’est pas le cas de tout le monde. Parfois il n’y a pas besoin de porte et là dans la rue on croise une violence gratuite et méchante, on se demande pourquoi et surtout comment réagir On n’a pas forcément le temps de relever, d’analyser, de prendre assez de recul pour répondre à cette violence, inconsciente, gratuite, culturelle, ignorante, mais pas innocente. Alors pour seule réponse on continue à avancer de porte en porte ne sachant pas ce que l’on va découvrir ou rencontrer mais on continue à être là. Il faut encore plus être là dans ces endroits où on manque de temps et continuer à être là, et bien là et espérer que cette violence que l’on croise parfois finira par s’atténuer au fil du temps.
Nous, on avait la menuiserie : c’est nous qui avons fabriqué la porte


