Dessin, théâtre, Cinéma, Usine

Marie Bouts a demandé aux jeunes de dessiner leur parcours, de chez eux au théâtre, de chez eux aux usines qu’on va visiter dans les jours à venir. Ils ont fait de magnifiques oeuvres, constellées de mots, d’interrogations sur la vie et le monde du travail. Par groupes de cinq ou six, ils ont projeté sur la feuille blanche des directions, des point d’interrogations, des croisements mais aussi des impasses. Et des envies de toutes les couleurs. Ces travaux sont exposés dans la salle de pédagogie, notre quartier général pendant tout le temps de notre présence au Phénix.
Dans la soirée de mardi, à l’heure du debrief, on a projeté un petit film pour expliquer notre démarche sur la base d’images de Portraits ou de Veillées. On a ensuite regardé ce qu’on a filmé entre nous dans la journée.

Hier,on a consacré la journée à la construction in vivo d’une interview, ou encore, d’ une conversation filmée.

La séance démarre. On butte sur l’enregistrement, à savoir que K. ne voudrait pas qu’on le filme comme nombre d’entre eux. K. ne voudrait pas qu’on voit sa tête. Béné choisit un endroit pour filmer (le mur rouge). D. se place derrière la caméra. Béné lui met un casque sur les oreilles. Martine se place jute à côté de D. Béné est derrière D. K. parle une dizaine de secondes. K. voudrait que nous passions (les membres de la compagnie Hvdz) devant la caméra. On prépare tous un petit texte qu’on apprend par coeur. K. filme B. qui parle presque trente secondes. J. filme depuis le début de notre rencontre tout ce qui se passe dans notre pièce de travail (salle des pédagogies, au quatrième étage du Phénix). Marie K. du Phénix, qui, dans le passé, a travaillé longuement avec Hvdz, passe devant la caméra pour montrer son savoir faire cinématographique. Puis, c’est D. qui joue à son tour devant la caméra. La contrainte de la séquence est parfaitement respectée. On avance bien. Ensuite, on passe à Y. et J. qui ont formé un autre groupe. Y est derrière la caméra. J. est devant.  Béné indique à Y. comment régler la netteté de la caméra et le cadre. C’est parfait. On filme  et refilme J.. J. dit qu’il n’a rien à dire pendant trente secondes et qu’il trouve ça long. Et on inverse, c’est Y. qui parle et J. qui filme. Ça marche bien. On est arrivé au bout de l’exercice. Maintenant, Marie Lies propose que chacun développe un texte à partir de mots, qu’elle a notés et qui reviennent souvent dans les prises de paroles des un-e-s et des autres.

It’s training, man!

Troisième jour du projet Nickel. On est là, dès potron-minet, on commence tous les jours par un training dynamisant qui a pour but de souder notre nouveau groupe de 20 personnes et, surtout, dérouiller nos esprits et nos corps et cela, ce n’est pas une mince affaire. Il faut bien une bonne heure pour que cela commence à fonctionner. Donc, on y va, tout de suite, maintenant.

Travail obligatoire

A partir des années 80 ça a commencé à décliner mais le dernier puit de mine c’est en 92 : « Mais t’étais obligé d’aller travailler dans le puit, en 92, avant que ça ferme – Si le puit de mine était ouvert les gens gardaient leur travail – c’est obligatoire ou c’est les gens ? – Est-ce que c’est obligatoire de travailler ? – Une seule grosse entreprise qui était les mines et tout le monde travailler pour eux d’une façon ou d’une autre, le garde des mines qui passait dans les corons et qui disait ton garçon de 14 an qui parait costaud c’est le moment de la formation – elle durait 6 mois – on vous propose ça, vous faîtes quoi ? – trop dangereux avec le grisou – et puis la poussière de silice dans les poumons et dans la peau – comme tout le monde était mineur on pouvait pas être autre chose, on était regardé de travers sinon, ça voulait dire qu’on avait pas le courage d’aller au fond – dans la tête c’est assez bête de se dire je vais travailler pour être malade ou mourir – mais est-ce que tu  savais ça avant ? – Et puis est-ce que tu pouvais faire autre chose, osé quitter ce métier ? – Par exemple aujourd’hui on ne pourrait pas dire je vais à la mine ? Si ? On pourrait choisir ? Non ? – Moi je peux faire quelque chose qui me convient pas, qui est dangereux si c’est bien payé –  c’est quoi bien payé ? – un métier qui te plaît avec un petit salaire ou un métier qui te plaît moins mais qui gagne mieux ? – moi là aujourd’hui je m’en fous mais pour moi le plus important faut que je sois bien payé – un métier qui me plaît sinon il n’y a pas de motivation – c’est bien l’oseille – un métier qui paye comme ça tu peux faire ce que tu veux – l’argent y’en a partout – vas y, y’en a partout mais comment tu fais pour l’avoir» – RIRE –

Allô La brique ?

Hier soir à 19h, une représentation de La brique et ce matin à 9h00 soit 14h plus tard, on échange sur ce qu’on y a vu dans cette brique. Est-ce que ça parle pas plus au plus âgé ? Qui se sent concerné ? Qu’est-ce qu’on apprend ? « On cherche plus trop à savoir le passé, on vit dans un autre monde. Les mines on en parle plus trop, peut-être à l’école pour apprendre l’histoire. En tant que jeune si t’es là tant mieux mais c’est plus pour les plus âgés », mais peut-être quand même un peu, ça parle encore aujourd’hui « L’histoire me concernait j’ai grandi dans les corons. Mon père s’est fait écrasé par un train de mine et il a une jambe en moins. Ça m’a parlé de ça, de ce temps là, de ce que mon père a vécu. »

Le travail, c’est la santé ; rien faire, c’est la conserver !

Nickel, deuxième jour, on est passé par mille expériences en une journée et demi. Filmer, écrire, jouer, battre la mesure, danser, courir, rire, aller au spectacle et discuter, prendre le temps, expliquer, partager. Demain, on ira visiter des usines et faire des conversations filmées avec les gens qui veulent bien nous répondre. On a deux super vans noirs fumés Mercedes. On ne va pas passer inaperçu et c’est bien le but de Nickel.

Première journée Nickel

Pas de formalités ni de courbettes. Ce qui serait bien c’est de commencer par se tutoyer. Et puis si on se présente et qu’on dit notre prénom on pourrait raconter pourquoi comme ça et pas autrement, non ? Et ensuite on enchaîne sur le pourquoi ici et pas ailleurs ? Dylan et le tour du monde, Julien, Farouk, Marie et Angéla, Marie-Lis et Myosotis, Steven, Natacha, Yacoub, Bénédicte et son collier de perle, Mourad, Martine et Marie-Jeanne, Guy et Baptiste ou Jean, Aubin et Marie, Mathieu B. et Mathieu J., Kevin, Didier et son chien, on se lance des fruits pour retenir tout ça ?Qu’est-ce qu’une pratique artistique peut apporter dans l’approche d’un métier de l’industrie ? Échauffement rythmé d’un  Mourad déchainé qui nous fait faire des machines à 9 axes à 3, ou 12 axes à 4 ou  42 axes à tous sans discuter. Matière brute + programme = enlever et non rajouter : – « C’était 42 et pas 43 qui enlève quoi ? » – « moi je lève le pied »-  « Nickel ». Fondre pour travailler, fondre pour lier, fondre pour plier à 1800°, les hauts fourneaux, se détendre pour entendre le rythme des pieds, des mains, des cuisses, du torse, des avant- bras et du reste, ça circule, ça chauffe… Pause repas grâce à Dorine qui a usiné dans la cuisine du cinquième. Après-midi en trois temps autour de la découverte des caméras (être devant et être derrière), d’un dessin à l’aveugle de ce qu’a été notre trajet matinal et de l’Abc des percussions corporelles et un, deux, trois, quatre…

Dans 14 heures, ce sera Nickel !

On est dans les starting-bloks, puisque le rendez vous a lieu  au Phénix à 9h, demain matin. Ce soir, les veilleurs de loin sont arrivés à Valenciennes, Marie S. est allée les accueillir au train de Paris et de Nantes. Il s’agit de Marie Lies et de Mourad. Marie S. nous a concoctés avec Natacha du Phénix et Marie K. (aujourd’hui du phénix mais qui fut longtemps à Hvdz) un planning aux petits oignons. Elle a prévu de nombreux temps de bilan, au fur et à mesure des journées aux multiples actions, pour pouvoir adapter au plus juste nos interventions, en fonction des jeunes avec lesquels on va travailler, ces deux prochaines semaines.

Et demain soir, on n’oublie pas qu’il y a la Brique au Phénix et que c’est ouvert à tout le monde. C’est la première fois qu’on joue dans ce coin-là du territoire des Hauts de France. Les prochaines représentations de la Brique auront lieu dans la région de Tulle. Avant de revenir, une autre fois, à Valenciennes pour la deuxième partie de Nickel. On sera, alors, déjà , en juin.