Mercredi au CCAS de Loon Plage (1)

Ce mercredi matin, rendez vous à Loon Plage à l’appartement de la résidence à 9h15, ça court dans tous les sens pour mettre au point le programme de la journée et répartir le matériel (caméras, pieds de caméra, appareils photo, micros, citations). Au bout d’une demi-heure, chacun sait ce qu’il fait et où il doit aller. On se divise en trois équipes et à dix heures, on est sur le pied de guerre. Un groupe part à la rencontre du club des aînés au CCAS, animé par Sylvie qui ne manque pas de ressources. Il règne dans cet atelier une atmosphère de franche camaraderie. Nelly Navaro  qui est très active, assiste Sylvie pour l’organisation de jeux collectifs, jeux de relooking intergénérationnel ou partie de basket ou de baby foot, projection de film hebdomadaire. Les séniors partent en vacances au mois de mai. Cette année, secret défense, on ne sait pas où on va aller. Il y a l’élection du papy et de la mamy de Loon de l’année, le 5 mars. Tous les mois, on fête, lors d’un repas, toutes les personnes qui ont eu leur anniversaire, dans le courant des 30 derniers jours. Toutes les semaines, il y a la chorale des refrains de nos vingt ans avec la classe d’accordéon. Nelly Navaro, par ailleurs, est peintre depuis toujours.

Mercredi matin à Loon Plage (2)

On a rencontré beaucoup de monde au CCAS de Loon Plage et nous y avons été très bien accueillis par Sylvie et tous les adhérents, ainsi que le directeur du lieu. Nous avons discuté avec Elisa Dalmasso qui vient là en tant qu’écrivaine. Elle a enseigné à Loon Plage pendant 14ans et elle a publié plusieurs livres dont des ouvrages d’histoire sur la ville. Elle anime un atelier d’écriture au CCAS auprès des personnes âgées pour garder la mémoire qui se perd. André Delattre  a 88 ans et dit on est à la retraite et on se laisse vivre quoi. Il a travaillé dans les années 10 à Vendin le Viel dans le Bassin minier du Pas de Calais. Il était boucher. Ensuite il est revenu à Loon Plage et il est devenu ambulancier et cafetier. Puis il a monté en m^me temps que tout le reste une entreprise de taxi. Il a ouvert quelques années plus tard un café-routier. Aujourd’hui, dit il, je joue aux cartes et je fais de la peinture. Jean Bancart habite Loon Plage depuis 86 ans. Là où se trouve aujourd’hui le CCAS, il y avait à l’époque son garage de réparation automobile. Il a été longtemps pompier volontaire. A ce moment là, il y avait beaucoup de fermes et de feux dans les granges. Jean Bancart nous a ensuite raconté l’histoire de Loon-Plage depuis la nuit des temps. Dans les années 50, il y avait un médecin qui accouchaient les femmes, arrachait les dents… Il y avait plus de 22 cafés dans le village et chacun accueillait un public spécifique, un cinéma et un bal avec les frères Bayeux. La plage était la plus belle du monde, avec un magnifique hôtel. Les gens venaient de Lille, Roubaix, Tourcoing.

On devrait par exemple pouvoir comprendre que les choses sont sans espoir, et cependant être décidé à les changer

Toutes les personnes nous disent que Loon-plage est une ville calme, dynamique, où il fait bon vivre. La ville offre à tou-te-s de nombreuses activités artistiques, sportives, éducatives. Les personnes âgées sont très bien prises en considération à Loon-plage également. Un point de vue que l’on ne peut que partager de part nos rencontres et nos interviews.

Cependant, avant de partir, nous avons reçu au siège de la compagnie une lettre anonyme nous mettant en garde qu’à Loon-plage, nous ne voulions pas de nous, pas de la culture et pas des personnes réfugiées. Nous voyons bien également le soir, les personnes réfugiées sur le parking de DIA seules, dans le froid. Nous entendons aussi, par ci, par là, des propos anti-migrants. Que faire de cette parole dans un projet artistique comme le notre? Un portrait de village qui se veut positif, de mise en valeur de l’autre, de mise en valeur des forces vives d’une ville, d’un village?

De l’écriture du passé et du présent.

Au CCAS, avec les personnes âgées, ont été mis en place des « Ateliers de la Mémoire ». Ce sont des ateliers d’écriture, une manière détournée de travailler sa mémoire grâce aux souvenirs, d’aller fouiller dans les recoins mal rangés de son cerveau. Et ça marche, on nous rapporte des noms, des traces de Loon-Plage d’avant, pendant et après la Seconde Guerre Mondiale.
Le point de départ sont des photos, une manière de convoquer les souvenirs par l’image. Des photos anciennes ou récentes. Et il y a l’objectif de rencontrer des jeunes qui écrivent sur le présent, toujours à partir de ces photos.
Il semble que cette recherche fait sens dans son ensemble, on est parfois effrayé par l’absence de conscience du passé par la jeunesse, ou l’indifférence du présent par les personnes âgées. Par ces rencontres intergénérationnelles, on créé du lien entre les vivants, et on laisse des traces pour ceux qui nous suivront.
Ecrire sur le présent ou le passé, c’est à chaque fois une manière de préparer le futur.

Mourad nous raconte une Histoire d’Arbres. Et tout cela s’éclaire en un instant.

Marie…

Marie a 73 ans, elle en fait 20 de moins.

Marie habite Loon-plage depuis des années, elle y a suivi son mari.
Elle vient de Bruay-en-artois, elle y a passé son enfance et elle est fière, extrêmement fière d’être fille de mineur. Elle a passé une enfance idéale nous dit-elle. Une enfance chiche, ils n’avaient pas grand chose, mais une enfance de solidarité, d’entraide. Personne ne connaissait la solitude…Quand elle est arrivée dans le dunkerquois, elle a eu du mal à s’y faire. Tout cela n’existait pas ici. C’est propre à la mine.

Elle a eu un manque.

Elle s’est mariée à 17 ans, a élevé ses 3 enfants puis a aidé ses enfants à élever ses petits-enfants. Elle a arrêté l’école à 14 ans.

Et là, encore, elle a eu un manque.

Elle a toujours un manque Marie, alors elle s’est plongée dans le théâtre. Maintenant, c’est pratiquement toute sa vie. Son mari est décédé en 2007, ses enfants sont grands, elle s’y consacre à fond.

Marie, elle adore lire aussi.

Elle lit le théâtre, elle lit pour elle mais elle lit aussi pour les personnes mal-voyantes. Elle est personne-relai à Loon-plage pour ces personnes.
Moi, c’est la lecture, tout autour de la lecture et le théâtre nous dit-elle. Ses enfants ont fait de la musique, à Loon-plage. Apparemment, ce serait une ville où le niveau de l’enseignement musical est excellent. Mais elle n’est pas musicienne Marie, c’est une comédienne.

Moi, c’est le théâtre…

Du bois tendre…

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Ils travaillent tous les styles de bois à l’atelier bois de Loon-plage: Le tilleul, le chêne, le merisier, etc.
Ils ont tous les styles à l’atelier bois de Loon-plage: animalier, abstrait, paysager, etc
Ils ont tous les âges à l’atelier bois de Loon-plage: 15, 52, 65 ans
Ils ont tous le sourire à l’atelier bois de Loon-plage.
Ils ont tous la passion du bois à l’atelier bois de Loon-plage.

Le Tour du Monde des cloches de Madame Henriette Valence

La première cloche lui venue de sa grand-mère qui tenait un bistrot au Clipon. La deuxième cloche de son fils, parti vivre en Suède. Et voilà, 2 cloches, c’est le début d’une collection. Et hop, c’est parti. De chacun de ses voyages, Henriette rapporte une cloche. Sa famille et ses amis s’associent à sa passion de campanaphiliste, et lui rapportent des cloches des 4 coins du monde. Aujourd’hui, elle nous montre plus de 300 cloches, qui viennent donc de Loon-Plage, de Suède, d’Inde, de Chine, du Vietnam, du Japon… Chez Henriette, on peut faire le tour du monde, sans bouger de Loon-Plage.les-cloches-loon

Nouvelles et Histoire

Elisa Dalmasso écrit des nouvelles. Elle a fait des concours d’écriture de nouvelles, ses textes ont circulé.
Un éditeur l’appelle, et lui propose de la publier.
Elle a écrit un livre sur Naples, son mari était d’origine italienne. C’est l’amour pour le pays et son mari qui l’a fait écrire, et la chaleur napolitaine, le patrimoine historique.
Elle écrit beaucoup de nouvelles sur la place des Femmes dans la société. Elle travaille actuellement sur les femmes migrantes et réfugiées, notamment grâce à l’association La Cimade, à Lille. Le livre devrait sortir à l’automne.

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C’est la médiathèque de Loon-Plage qui l’a contacté pour travailler sur la Mémoire de la ville. En ateliers d’écriture ils sont d’abord passés par la parole, et puis ils ont posé tout ça sur le papier. Pour Elisa, tout le monde a le talent nécessaire pour écrire son histoire. Une exposition photo, de Loon-Plage d’hier et d’aujourd’hui, à laquelle seront associés les textes de l’atelier est en cours de préparation.

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L’Histoire de Loon-Plage n’est pas laissé de côté. Des historien.ne.s se penchent sur la question, et peut être incluront-ils dans leur livre des extraits de l’atelier d’écriture.