Carnets de route
agnès soral
J’ai le souvenir de Lannion. D’une grève de train. De location de voitures. Nous y avons joué Les Sublimes et Base 11/19. Nous étions dans le même hôtel. Ibis. Il y avait une salle de billard. Nous avions été programmés deux fois par Roger Leroux avant qu’il ne prenne la direction du cirque théâtre d’Elboeuf. Lannion est une ville magique, petite ville de Bretagne au bord de la mer. Au bord de la côte de granit rose. Aujourd’hui c’est Philippe Legal qui préside aux destinées du théâtre de Lannion. Nous avions connu P. Legal à Hénin beaumont. Il dirigeait le théâtre de l’Escapade avant de le retrouver quelques années plus tard à Caen, puis à Angoulême. A Hénin Beaumont on avait répété les Trois Soeurs. Nous avions organisé trois temps de répétition de quinze jours avec une vingtaine de comédiens pour décider de la distribution. Avec le Ballatum. J’animais l’échauffement, l’entraînement physique. Entre le yoga et la gymnastique sportive. On aurait pu croire, comme on dit que j’avais fait ça toute ma vie. Le temps d’entraînement physique! Qu’est ce que je me suis battu pour qu’on le fasse tous les jours. Faut dire que c’était le seul moment où j’avais vraiment mon mot à dire. Jean Pierre Thibaudat, journaliste à Libération et aujourd’hui à Rue 89 était venu assister à une répétition. Il m’avait demandé comment on répartissait nos interventions entre E.Lacascade et moi. J’ai bégayé une réponse impossible. C’était une véritable torture mentale. Etre là pendant des heures et ne pas pouvoir intervenir. C’est complètement destructeur. Etre convaincu qu’on ne fait rien (à part l’entrainement physique) et qu’on ne sert à rien. On ne s’en remet jamais. Parmi les différents stagiaires il y avait Agnès Soral.
sur les routes du Pas-de-Calais (3) : éolienne
la brique (en préparation pour les journées du patrimoine au 11/19)
Je propose une courte conférence (qu’on pourrait aussi intituler la brique) d’une quinzaine de minutes sur la question de l’homme patrimoine. Est ce que je fais partie du patrimoine ? C’est la question que je me pose! Est ce qu’au même titre que le site on pourrait me visiter pour les journées du patrimoine. Est ce que je vaux une brique (ça représente à peu près un million d’anciens francs)? Ou plusieurs mais peu importe là n’est pas la question ? Je suis inscrit dans le patrimoine puisque je travaille au 11/19 depuis sa réouverture en 1998. Une brique ? On connaît l’expression, mets ta tête dans le mur il manque une brique. Mais ça ne peut pas être n’importe quelle brique puisqu’il s’agit d’un bâtiment (classé) du patrimoine. Qui fait partie de l’histoire. Faut avoir la tête du patrimoine. Comme on a la gueule de l’emploi. Correspondre au rôle ; ça tombe bien c’est mon métier (usurpé). Je me rappelle que quand j’étais gamin, j’avais laissé tomber une brique sur la tête d’un camarade d’école qui s’appelait Jannick Merlin que j’ai retrouvé il y a quelques années au café théâtre de l’Abattoir de Lillers. Qu’on pourrait classer aussi au patrimoine. L’Abattoir et Christian Legay. Mais en ce qui me concerne je peux être cité à l’ordre du patrimoine à double titre. 14 ans de compagnie associée au 11/19 et fils des corons. Je propose une conférence sur le thème du patrimoine qui pourrait démarrer par une brique que je tenterai d’interpréter…
sur les routes du Pas-de-Calais (2) : orge ou blé ?
mende
Des cahiers d’impro par dizaines sans oublier ceux que j’ai perdus. Durant deux années à Culture Commune, j’avais animé un atelier de théâtre pour les salariés de Culture Commune. Olivier (notre administrateur) avait participé à un de ces stages en 2005, l’année de son embauche. Aujourd’hui on est à un mois de son départ définitif de la compagnie. Dans les tournées qu’on a faites, il y a des endroits dont on se souvient plus que d’autres. Je me souviens de Mende dans les Cévennes. Une date isolée pour Les Sublimes. On nous a fait comprendre que jouer ce spectacle là, à ce moment là, c’était très important. Du point de vue collectif, de la ville et d’un point de vue personnel, pour la personne qui nous faisait venir. C’est la seule fois de toute la vie du Ballatum et de HVDZ où on est allé à Mende. On est venu, on a joué, on est reparti. On n’a jamais su ce qui se jouait à Mende, de si important avec Les Sublimes, ce jour là. Je me souviens d’une interview et du danseur P. James qui se déhanchait en caleçon autour de la table où avait lieu l’interview. Je me souviens d’un type qui me réclame une serviette blanche qu’on aurait volée au théâtre et qui me dit que ça ne va pas se passer comme ça. Je me souviens du voyage en bus et des routes de montagne, quand on a quitté Mende. Je me souviens de T. qui crie dans le couloir du dortoir parce que l’eau des douches est froide. Je me souviens de la manif dans les rues de Mende contre la réforme des retraites. En 2005 ou 2006.
sur les routes du Pas-de-Calais (1) : blé ou orge ?
la la la
Des impros, on en a fait des milles et des cents. Vraiment beaucoup. Dans la période la plus physique du Ballatum, on n’imaginait plus travailler qu’en improvisations. Et puis tout le travail sur les textes dans les premières adaptations de Tchékov était basé sur l’improvisation imaginée à partir de ce que le texte et les histoires nous suggéraient…
Ce que je ne supportais plus dans le théâtre, c’était d’avoir beaucoup de travail pendant le temps d’une création ou d’une tournée et puis d’énormes passages à vide. Des trous d’air. T’as le temps de te demander (si ça vaut le coup de la la la et la la la)… enfin de te poser plein de questions.
Et passer d’un théâtre ou t’es enfermé dans le noir à un autre théâtre où tu continues ta vie dans le noir. Sans jamais voir la lumière naturelle.
S’abrutir de travail, c’est ce qu’il faut. Quoiqu’on fasse. Parce que le malheur permet toutes les autojustifications. La douleur a ses raisons, et tout te ce qui ne la flatte point aiguise ses soupçons.
J’ai hâte que le stage démarre. Lundi 1 août 2011.
St Pol / café restaurant de la poste
les sublimes
Pour le stage on a réuni des documents. On revisitera des œuvres qui devraient nous permettre d’imaginer des nouvelles improvisations, des situations théâtrales, des images auxquelles on n’aurait pas pensé jusqu’à aujourd’hui . On ira voir du côté de Mauricio Catallan ou de Bob Flanagan (et Léo Ferré aussi)… Je me souviens qu’on avait précisément démarré ce type de travail en 2002 à l’époque d’un stage avec Les Chantiers Nomades dont j’ai oublié le titre. On avait fait du body art, travaillé sur des textes d’Olivier Py, parmi d’autres. On avait tenté des expériences, des situations de théâtre qu’on n’avait jamais osées jusqu’ alors. Suite à ce chantier on avait décidé de faire le spectacle Les Sublimes. Pendant les Sublimes on avait multiplié les thèmes d’impro mais pendant le stage on n’avait travaillé que sur un seul thème qui s’intitulait, coup de folie. Beaucoup de séquences de ce stage avaient été adaptées aux Sublimes. Un jour de répétition, des professionnels de théâtre se sont réunis dans la petite salle à côté de la Nef (la grande salle de spectacle du 11/19) et le soir ils nous avaient demandé d’assister à une répétition. Après la répétition aucun d’entre eux ne voulait plus m’adresser la parole. J’ai pensé, il y a quelque chose qui ne va pas. Alors j’ai pensé qu’il fallait que je vienne sur scène pour donner des explications. Les Sublimes ont beaucoup tourné. Au delà même de ce qu’on aurait pu imaginer.





