Blog

Retour sur le marché de Liévin (2)

Ne pas parler Ce matin au marché on croise une vieille dame. La doyenne du marché de Liévin nous crie un homme. La dame nous dit que pour être libre il faut pas dire ce que l’on pense, il faut garder les choses pour soi, il faut pas parler. Alors pour appuyer son propos elle dit la parole est d’or et le silence est d’argent puis elle reprend non la parole est d’argent et le silence est d’or….finalement on a passé une heure à discuter avec elle !

Retour sur le marché de Liévin (1)

Géographie intime Ce matin Marché de Liévin. Le plus grand du coin. Liévin c’est juste à côté de Loos-en-Gohelle, on a traversé la voie ferrée pour y arriver. C’est intéressant ici comme les villes sont proches et se côtoient, et en même temps il y a des séparations. Les gens de Liévin ne sont pas de Loos en Gohelle et vice versa. Ce serait intéressant de demander aux gens du 11/19 où selon eux s’arrête leur quartier, où s’arrête leur ville ? Ce serait intéressant de voir ce que  les frontières imaginaires ou symboliques racontent sur la vie des gens. Ça rejoint la réflexion sur la géographie entamée depuis le début de la Veillée. Jusqu’à quel point nous sommes le lieu où nous vivons, jusqu’à quel point nos limites ne correspondent-elles pas aux frontières géographiques que l’on se crée. Jusqu’à quel point pouvons-nous nous déplacer ?

de Bahia à Saint Nazaire

On se demande où sont passés les syndicalistes, les discours enflammés et les actes militants qui allaient de pair avec les mines ? On entend beaucoup parler des mines. La mémoire des mines est là, bien présente, mais on entend si peu de ce discours militant qui allait avec. Un discours militant mis au présent. On se rappelle de notre veillée à Saint Nazaire, sur les chantiers navals, où ce discours était à chaque porte, dans chaque bistrot, dans la bouche des ouvriers autant que des chômeurs, des profs autant que des commerçants.
On s’attriste un peu. On ne jette pas la pierre, on n’accuse personne de cet oubli, mais on se demande. On se demande ce qui l’a provoqué, comment y remédier. Comment crier qu’on peut changer les choses, qu’on a des droits à défendre, des causes pour lesquelles on peut se battre.
Jorge Amado, dans Bahia de tous les saints raconte comment un noir de Bahia découvre, en même temps que la grève et le militantisme, l’amour de ses frères et le respect de tous. Ne plus jamais courber l’échine, une nouvelle dignité.
Dans les films du groupe Medvedkine, on voit des ouvriers et ouvrières changer radicalement de vie au cours de grèves des usines de Besançon. Se découvrir, se libérer dans le militantisme. Retrouver un espoir et des objectifs dans la défense des ouvriers.
On s’est dit que quelque chose de fondamental est en train de disparaître. Que ça laisse de la place au fatalisme et à la résignation et que ça, il ne faut pas que ça arrive, il ne faut pas que ça revienne.

on se demande

on parle des claques de veillées. On rencontre beaucoup de misère et de détresse, on voit souvent comment cette misère se mue en haine, en racisme, en alcoolisme, en violence. On a pas de veillées sans claque.
On parle beaucoup de ça. De la nécessite, pour continuer à y croire, de ne jamais se blinder pour ne jamais être blasé. Rester ouvert à entendre cette violence et continuer à avoir besoin de « changer le monde » comme dirait Marx et « changer la vie » comme dirait Rimbaud. On se repose à chaque fois la question de à quoi on sert. On se répond en se disant qu’il faut donner une image positive de chacun, de la noblesse de chacun. Ouvrir une petite brèche vers l’amour propre et le respect de soi et des autres. Rester positif. Mais il y a de ces claques dans les veillées. On se demande si on ne tombe pas dans l’angélisme. Face à la misère, dans ces moments de veillées là, on se demande…

Mon Louvre à moi

On est allé au marché de Liévin. On est allé faire les portraits avec citations. On y est allé à plusieurs voitures. Le marché de Liévin est très grand et bien sûr on a eu du mal à se retrouver. Jérémie s’était installé au coin de la rue Défernez et de la rue Victor Hugo un peu après la boulangerie et un peu avant la pharmacie. On y était vers 10h30. On a démarré un peu difficilement. Et puis petit à petit les gens se sont prêtés au jeu. En fait on a remarqué que c’était plus tranquille quand les gens avaient fait leur marché. Ils sont plus disponibles. L’action consiste à discuter avec les gens, à parler de Culture Commune, à parler d’art, à parler des Veillées, du 11/19, un ancien puits de mines reconverti en écopôle et centre d’art. Ensuite on propose aux gens de choisir entre une vingtaine de citations et de poser devant la caméra avec la citation. Dans le cadre des Veillées, d’un film comme une installation vidéo dont la projection aura lieu jeudi et vendredi, la semaine prochaine. Martine et Caroline ont interviewé des gens aux quatre coins du marché. Caroline et Manu ont distribué des invitations et parlé avec les gens.

Hier soir on est allé au Colisée à Lens voir un film, un documentaire qui s’appelle mon Louvre à moi. Un documentaire où il est question d’artistes locaux et du Louvre qui va s’installer à Lens d’ici deux ou trois ans. On a passé un bon moment. Mais on s’est dit que ça ne parlait pas de la situation économique et sociale du territoire et des difficultés qu’éprouvent les gens au jour le jour pour s’en sortir. On s’est dit, à voir la crise économique, la défaite actuelle du capitalisme et tout ce que ça va entraîner pour les uns et les autres de difficultés supplémentaires quand déjà  beaucoup d’entr’eux sont dans la survie, c’est difficile de parler d’art, du Louvre et tout… sans parler de politique.