ruraux de la montagne

En répondant aux questions du portrait chinois, on raconte finalement beaucoup de choses sur son village.
– Si Chalmazel-Jeansagnière était un plat cuisiné, ce serait quoi ?
– Oh, quelque chose qui a l’air doux au premier abord, mais qui finalement est un peu amer ou un peu piquant.
– Ah bon ?
– Oui, ce n’est pas si facile. Au début on a l’impression qu’on est bien accueilli, et puis au fur et à mesure, on s’aperçoit que ce n’est pas si évident, on peut vous faire comprendre que vous n’êtes pas vraiment d’ici.
Il y a des gens, qui sont là depuis 40 ans et qui continuent à se définir comme des pièces rapportées.
Les gens de Chalmazel-Jeansagnière ont envie que des gens ‘de l’extérieur’ viennent chez eux, « parce qu’on n’est plus assez nombreux », « pour que les commerces puissent continuer à vivre », « pour que le services ne disparaissent pas ». Mais souvent ils rajoutent qu’il faudrait « un peu plus de monde, mais pas trop  trop quand même ».
On nous parle de la frontière du col du Béal, de l’autre côté c’est l’Auvergne.
On nous parle de la frontière entre les résidents à l’année et les résidents secondaires.
On nous parle de la frontière entre la plaine et la montagne. Quand on n’est de la plaine, ce n’est pas pareil. Et même si on vient vivre à la montagne, on reste ‘quelqu’un de la plaine qui est venu à la montagne’.
On nous l’a dit :
– Nous les ruraux de la montagne, on est un plus renfermés que les ruraux de la plaine, mais c’est comme ça.

 

Chalmazel-Jeansagnière, au croisement des idées

Des gens sont passés au Q.G , à côté de la bibliothèque, pour regarder les montages de différents interviews. La date fatidique approche ; demain, on rend la copie. On joue trois fois, demain matin à 10h et dans l’après-midi, à 14h et 19h30. On a chronométré le montage : une heure et trente minutes exactement. Quinze minutes sont consacrées au travail commandé par les architectes : on a posé deux questions à tous ceux et toutes celles qu’on a rencontré-e-s e dans le cadre du projet des architectes sur Chamazel-Jeansagnière : Quels sont les atouts du territoire ? Quels sont les liens entre la station de ski et le bourg ? Comme une démarche participative. On s’était mis d’accord avec les architectes, paysagistes et urbanistes pour établir des croisement dans nos démarches respectives.

Dans les commerces. Chalma – Jeansa

Ce matin, nous sommes allés dans les commerces, pour inviter au film-spectacle de demain, on explique ce qu’on fait, on donne des tracts et on parle du blog, Mourad propose une danse.
Demain vendredi 4 octobre, à la salle des fêtes de Chalmazel-Jeansagnière, à 14h et à 19h30.

Forestier. Marie-Louise. Et des charpentes.

Ce matin, après le marché, nous rencontrons Christianne, pour une conversation ‘non-filmée’. Nous avons arrêté de filmer, le montage est en cours, et même bien avancé, car demain nous répétons pour les représentations de vendredi.
Sur cette photo, l’église n’a pas encore de clocher. La maison à gauche, avec le balcon au premier étage, c’était la Poste.  Et la maison blanche, tout à gauche, avec ses trois étages, c’est l’actuel bar-tabac chez Marie-Louise.
Avant Marie-Louise, le bar-tabac, c’était « Le Café des Forestier ». C’est Christianne, l’arrière-petite-fille d’Antoine Forestier qui nous raconte l’histoire.
Antoine Forestier, né en 1828 à Saint-Georges-en-Couzan, est arrivé à Chalmazel en 1849 pour épouser une chalmazelloise. Antoine est le seul des Forestier à être venu à Chalmazel, ses frères et soeurs se sont éparpillés dans la plaine. Mais avec Antoine Forestier, qui se marie à Chalmazel, c’est 4 générations de Forestier qui restent à Chalmazel, avec aujourd’hui Christianne. Antoine, (l’arrière-grand-père) ouvre donc « Le Café des Forestier », que reprendra son fils (le grand-père) que reprendra sa petite-fille (la tante de Christianne). Cette petite-fille d’Antoine, s’appelait Lisa, c’était pour tout le monde « La Lisa de chez Forestier’.
Christianne explique que Lisa s’occupait du café, et que son oncle, le mari de Lisa s’occupait des vaches. À l’époque, il y avait 12 ou 14 fermes dans le bourg-même. Chaque ferme avait entre 3 et 9 vaches. Lisa n’a pas pu transmettre le café à quelqu’un de la famille. Le café à été vendu. C’est là que continue l’histoire avec Marie-Louise.

Cette après-midi, nous rencontrons Aymeric et Lucie. Nous sommes ravis de rencontrer enfin Aymeric, jeune charpentier de Chalmazel. Plusieurs personnes nous avaient parlé de lui, mais nous n’avons pas réussi à le rencontrer plus tôt.  Là aussi, une histoire qui se transmet de père en fils. Ayremric est fils et petit-fils de charpentiers chalmazelois. Il a quitté Chalmazel très peu de temps (juste pour finir ses études de charpentier, à Montbrison et au Puy). Il travaille là, dans l’atelier qui était à son père. Lucie, elle, vient de Vertolaye, en Auvergne (de l’autre côté de la frontière, de l’autre côté du col de Béal). On parle ‘charpentes’, approvisionnement dans les trois scieries de Chalmazel, des temps de séchage de plus en plus courts entre la coupe du bois et la pose de la charpente, on parle des essences qui poussent par ici et de celles qui ne sont pas adaptées au climat, on parle du bois qui joue à cause de l’humidité très forte la nuit et de la chaleur la journée, on parle de cette charpente à Fougères faite par le père d’Aymeric et refaite par Aymeric des années plus tard à cause d’un incendie.
Et on ne s’attend pas à reparler du bar-tabac chez Marie-Louise. Mais Lucie avait un projet, celui de reprendre le bar-tabac de Marie-Louise (86 ans). Mais pour l’instant la banque n’a pas accepté le dossier de Lucie parce qu’elle est trop jeune (pas encore 23 ans). Lucie aimerait que le bar-tabac se poursuive et elle voudrait proposer aussi une petite restauration le midi, type brasserie.
Depuis 8 jours que nous rencontrons des chalmazellois, nous avons entendu tellement de gens s’inquiéter de la suite pour le café de Marie-Louise, que nous sommes contents d’apprendre qu’une jeune repreneuse est là, avec plein d’envie pour un projet qui la passionne depuis toujours.

Souhaitons longue vie au café-bar-tabac-brasserie, peut importe le nom, longue vie !

Ce matin nous étions aussi allés voir Marie-Louise pour prendre un petit café mais elle refuse d’être filmée parce qu’elle ne voulait pas fausser l’appareil. Chez Marie-Louise, il y a toujours une ou deux photos qui trainent. Il y en avait une de la réfection du clocher. À un moment, elle part dans sa cuisine en disant :  » Bougez pas, je reviens. » Et elle revient avec une photo de Chalmazel qui date d’avant 1936 nous dit-elle parce qu’il ‘n’y a pas encore de clocher à l’église justement. Et elle rajoute, vous voyez, il n’y avait pas un arbre. Avant c’était cultivé.