Du village de campagne à la ville nouvelle

On a fait un repas de midi tous ensemble, avec les animateurs de la maison de quartier, avec Malika, avec Laurent, de Bel Ebat. Il y a une sacrée ambiance dans l’équipe de Renoir. Et les blagues de Didier. Et Guy, aussi, qui atterrit encore de l’interview d’hier, une rencontre de plus de cinq heures, avec un couple d’habitants, militants, communistes, qui ont vu toutes les mutations de la ville, depuis le petit village des Bouviers – isolé à la campagne – à la ville nouvelle.
Ils ont parlé de l’histoire du parti communiste, de solidarité, de lutte et tout, pendant des heures.

toucher les nuages du Machu Picchu

Isabelle habite à Guyancourt depuis neuf ans. Elle travaille à Renoir. Elle vient du Pérou. Elle dit : J’ai décidé de faire un grand voyage, je suis arrivée à Paris en touriste, c’était un voyage de courte durée qui dure depuis vingt ans. Je ne retourne pas régulièrement au Pérou. Heureusement, il y a internet pour rester en contact avec la famille.
Quand je suis arrivée à Paris, c’était un hiver très froid. Je suis sortie, j’ai marché sous la neige – c’était nouveau pour moi – et j’ai attrapé une bronchite.
Quand je suis arrivée, j’ai eu de la chance : j’ai rencontré mon mari. Il ne parlait pas du tout espagnol, et moi je parlais un tout petit peu anglais.
Dès que je peux, je pars, sinon, je voyage virtuellement.
Dans ma jeunesse j’avais toujours envie de voir ce qui se passe ailleurs.
Quand je retourne au Pérou, je me sens bien. Je retrouve mes racines. Mais au bout de vingt jours, j’ai envie de rentrer.
Je suis montée au Machu Picchu. Quand on arrive là-haut, on est fatigué ! On se demande comment les Incas ont pu amener ces pierres énormes. C’est tellement haut qu’on a l’impression qu’en levant le bras, on va toucher les nuages.

Sociolinguistique

Atelier sociolinguistique à la maison de quartier Renoir. Des femmes et des hommes, originaires du Cambodge, de Russie, de Chine , du Sénégal, du Maroc, d’Algérie, du Portugal, de Madagascar… Beaucoup sont venus rejoindre leur famille. Certains sont arrivés depuis longtemps, mais ne commencent que récemment à apprendre le français. D’autres arrivent tout juste. Dans leurs diversités, ils s’épaulent et sont complices. Ils s’entraident et rient beaucoup. C’est un moment agréable et joyeux.
Une dame nous raconte qu’elle vit en France depuis longtemps mais qu’elle parlait en portugais à la maison, et que c’est seulement quand ses enfants ont été grands, qu’ils ont eu eux-même des enfants, qu’elle a décidé d’apprendre le français, pour comprendre la langue de ses petits enfants.
Un monsieur et une dame vivent six mois de travail intensif en Russie et six mois auprès de leur fille, en France. C’est pour comprendre leur petite-fille et leur beau-fils qu’ils apprennent le français.
Pour raconter toutes ces histoires là, ils cherchent leurs mots et s’y mettent à plusieurs, ensemble, avec parfois des gestes, un peu de recours au russe ou au chinois, mais le moins possible, parce qu’ici, on doit parler français disent-ils en riant.

la pesanteur et l'apesanteur

On a rencontré Charles, un des fondateurs de GravityStyle, et Guillaume, un des adhérents.
GravityStyle est une association de parcours, d’art du déplacement. Charles est un des inventeurs de cette pratique, un Yamakazi de la première heure. C’est le frère de Serge, qu’on avait rencontré au gymnase de l’aviation, au handisport.
Ils ont fait pour nous un bout de parcours, sur des rampes d’immeubles du quartier des Saules. Jérémie a filmé. Puis Martine et Flora ont fait un interview. Charles et Guillaume parlent de cet art du déplacement avec beaucoup de sagesse. Connaître ses limites, savoir les repousser progressivement. Se réapproprier son propre corps, et l’espace autour de soi, la ville, le béton. Se rappeler qu’on est toujours plus fragile que le béton, mais savoir le défier quand même, parce qu’apprendre à relever des défis c’est précieux aussi au quotidien, pour le travail, pour tout le reste. Ce n’est pas seulement de l’acrobatie ou de la performance, c’est avant tout une façon de voir les choses autour de soi, une philosophie. C’est aussi revendiquer une liberté simple : connaître ses forces et ses faiblesses et les assumer, choisir son propre parcours, être responsable de son itinéraire, franchir des obstacles et en contourner d’autres, au concret autant qu’en métaphore. Et puis c’est aussi une occasion de l’aimer, ce béton, de le voir beau, de le rendre beau.

Iffra

Iffra est arrivé aujourd’hui. On fait connaissance.
Il connaît Guyancourt. Ça lui rappelle des souvenirs d’ado, ses premiers pas de danse. La gare de St Quentin. C’est là qu’il a rencontré les premiers danseurs de la région. C’était en 1984. C’était la naissance de la ville nouvelle. Il habitait à Trappes, mais St Quentin était le point de rencontre de la jeunesse de l’époque. Le lieu de vie. Le centre commercial était de l’autre côté de la gare. Les Saules et le Parc étaient encore des champs.
Au début, ils dansaient à la gare puis, avec le temps, dans les maisons de quartiers, les écoles, pour transmettre cette passion de la danse aux plus jeunes.
La première pièce de Black Blanc Beur, c’était au parking de la gare. Ça a commencé là.
On se dit qu’on va y aller aujourd’hui, on va y retourner.