Le pardon de Brest

Il était une fois, il y a très très longtemps, une jeune demoiselle nommée Azenor, fille du compte Even du pays de Léon (Brest) , qui épousa Erec, fils d’Audren, quatrième roi des Bretons ( vivant donc à Châtelaudrun- château d’Audren).  Azénor fut trahie par sa méchante marâtre, elle fut accusée d’adultère et répudiée par son mari. Elle fut condamnée, mais étant enceinte, ne pouvait être tuée. Elle fut donc enfermée dans un tonneau et jetée à la mer. Son tonneau, guidé par les anges, arriva sur les côtes d’Irlande où elle accoucha de son enfant. La marâtre se repentit et avoua son mensonge, le prince Erec partit donc à la recherche de sa femme et de son enfant.  Azenor revint en Bretagne, d’abord à Brest, puis elle se mit en route pour Châtelaudren. Tous les habitants vinrent alors à sa rencontre en dansant. Cette procession devint une tradition et jusque dans les années 1980 on célébra ce retour en dansant « le pardon de Brest ».

Mon Chaté

Nous avons déjà beaucoup appris sur Châtelaudren , qu’Yvon Le Cuziat et Christian Hamonou appellent « Chaté ». Christian dès qu’il évoque sa ville dit même « mon Chaté », un grand sourire aux lèvres. « Chaté » est la capitale du Goëlo, nous sommes ici à la frontière entre le pays gallo et le pays breton. « Chaté » c’est 46 hectares et 1060 habitants, plusieurs petits commerces, un étang abritant un dragon, et le Leff qui coule. Le Leff, nous explique Yvon signifie la rivière des larmes, nom tirant sûrement son origine  du déluge. Mais Yvon n’aime pas cette explication, il donne un autre sens au Leff: « liberté, égalité, fraternité, fidélité. » La fidélité à Chaté revient aussi dans les mots de Christian.

Mauvaises herbes, bonnes plantes

Cette après-midi, nous allons à la rencontre des travailleurs du chantier communautaire. Paul qui encadre nous averti de suite: « je préfère chantier communautaire pas chantier d’insertion, insertion ça a tout de suite une connotation négative dans la tête des gens, dans la réalité on travaille pour le bien de la communauté. » Gildas, Mathias, Angèle, Christian et les autres travaillent principalement pour les espaces verts et font de la petite maçonnerie. Ils peuvent s’exercer à plusieurs  métiers différents pendant les six mois que durent leur contrat. Les six mois sont renouvelables, et on peut travailler en chantier jusqu’à 24 mois. « C’est court, pour certains six mois suffisent à se remettre en selle, pour d’autres il faut plus de temps » nous dit Paul. Pendant cette période les participants apprennent à reprendre un rythme, à travailler en groupe, à acquerir de nouvelles compétences, ou bien mettre en valeur celles déjà acquises. Et puis tout simplement, nous rappelle Mathias, les chantiers permettent de gagner sa vie. Les chantiers sont polyvalents, récemment  Gildas au Mathias ont travaillé au petit écho de la mode, il on dû détruire une dalle de béton au marteau piqueur « c’était drôle , peut-etre pas tous les jours mais là pour une fois c’était chouette. » Ils ont aussi travaillé au rejointoiement des murs de l’étang quand celui ci a été vidé, ils nous assurent n’y avoir pas trouvé Nillo, le dragon dont nous a parlé Yvon. « On a passé du temps dans l’étang vide, s’il était là on l’aurait vu » plaisante Angèle. Depuis le mois de janvier, ils travaillent avec un photographe par le biais du petit écho de la mode, ils ont fabriqué des appareils photos à sténopé, François Daniel enregistre leurs témoignages et les bruits inhérents au chantier: débrousailleuse , tronçonneuse… Ils prennent également en photo des mauvaises herbes, durant l’exposition qui aura lieu en juin, on pourra lire à côté des images les bienfaits de ces plantes. Paul explique: « C’est à l’image du chantier communautaire en fait, mauvaises herbes mais bonnes plantes! »

Coquillages et Dragon

On a passé plus d’une heure avec Yvon Le Cuziat, mémoire vivante de Châtelaudrun, une heure mais on aurait pu en passer douze. À chaque nouvelle anecdote qu’il souhaite nous raconter, Yvon nous prévient: « si je vous raconte tout j’en ai pour trois heures! ». Yvon est un historien, un conteur, un collectionneur, mais avant tout un breton. Il revendique son chauvinisme, il est intarissable sur l’histoire de Chatelaudren et ses environs mais peut développer sur la Bretagne en général. Il nous affirme que la presqu’île de Crozon est le plus bel endroit du monde, Marie est d’accord avec lui. Chauvin mais objectif! Yvon a animé une conférence au petit écho de la mode à propos du déluge de Chatelaudrun: en 1773 la digue retenant l’étang  s’est rompu sous la pression des eaux et on compta de nombreuses victimes. Yvon mélange alors l’histoire et le conte en nous parlant de Nillo, un gentil dragon qui vivait tranquillement au bord de l’étang jusqu’à alors, il partageait la vie des Châtelaudrinais et protégeait un petit bois où les amoureux pouvaient aller se réfugier, mais le pauvre Nillo fût englouti par le déluge et il hante depuis l’étang tel le monstre du Loch Ness. L’étang de Minihy signifie refuge, donc d’après Yvon, le refuge du dragon. Yvon est également collectionneur de coquillage et peintre. Sa maison est pleine de ses oeuvres en coquillages. Il a réalisé un tableau représentant Nillo.