premier jour de la deuxième semaine des répétitions d’Aimer si fort (2)

Ensuite on a assisté à un rituel mené par trois femmes en hommage à Marie Antoinette, qui était belle et qui fut décapitée. Angélica Liddell cite Marie Antoinette comme une femme dont elle aurait aimé épouser le destin. En tenue de soirée deux femmes ont répété le même geste (de plus en plus vite), elles sont montées à plus de deux mètres de haut, et à tour de rôle, elles se sont jetées dans le vide, rattrapées in extremis par Anthony et Marion. Une femme a poursuivi un homme en robe de mariée, en s’accrochant à lui en lui disant qu’elle l’aimait d’un amour impossible et par mépris d’elle même. A. et C. ont imaginé un parcours du combattant pour aller jusqu’au bout de leurs forces et mourir épuisés. C. est restée accroché à l’envers au fil de fer de Marion, tandis que Marion lui versait du sang sur elle. En équilibre sur le fil. Cl. a repris son numéro de corde et un bout du texte d’Angélica Liddell. Elle est allée jusqu’au bout de l’effort en haut de sa corde accrochée à plus de cinq mètres de haut. Deux femmes se sont allongées, comme on s’allongerait à la sortie d’un supermarché, pour mourir écrasée par des caddies remplis à rabord. On a terminé la journée par une impro sur la musique d’Axel Bauer, laisse moi rester femme, où les femmes dansaient entre elles, par deux et le jeu se terminait par l’agression de l’une vers l’ autre.

On se dit, dans ces moments là, qu’importe ce qui peut arriver, ces moments là, on ne pourra jamais nous les enlever

Le temps de répétitions est court. Un peu plus de quatre semaines. Mais difficile de faire autrement car le budget ne nous le permet pas ! Hvdz emploie des dizaines de salariés tous les ans en grande partie en auto-financement puisque les subventions financent majoritairement le fonctionnement de la compagnie et le personnel administratif  dont un temps plein et un emploi intermittent. L’autre temps plein est en partie payé (pour plus de la moitié) par les actions et les spectacles. Le budget global de la compagnie est auto-financé à 80%. Ce qui demande, il ne faut pas le cacher, un engagement de toute l’équipe, une disponibilité, qui va bien au-delà d’un simple travail. Sans cette part d’affectif et de détermination de l’équipe, il y a longtemps que nous aurions mis la clé sous la porte. Faute de moyens.

Quelle chance ! Au cours de la recherche, jeudi dans l’après midi, nous nous disions qu’il faudra bien sûr trouver la substantifique moëlle de tout ce qui nous est proposé en improvisations pour réussir Aimer si fort et à la fois nous nous disions la chance qui nous était donnée en répétitions de voir des choses si touchantes, si belles et émouvantes. Des instants de grâce qu’on ne pourra jamais nous enlever !

fin de première semaine

On a terminé la semaine par une longue séance de massage. Comme promis. Sur la musique de Arvo Part (Spiegel), Troublemakers, Bird York (Have no fear) et Keith Jarett. Ce matin on a démarré la journée par un entraînement intense et on a passé en revue toutes les danses. Cet après-midi, on a repris les impros. Chacun est passé à tour de rôle au micro pour s’adresser à Angélica Liddell. Il s’est agi de lui dire ce qu’on pense de son texte et dans quel état nous met le travail sur son oeuvre. La rage, la colère, le doute, l’angoisse, et les mille questions qu’on se pose après une semaine de travail sur La Maison de La Force. Et puis on a relancé les impros sur le thème, tentative de suicide. On s’est beaucoup servi de la corde de Clémentine. On s’est bien habillé. On s’est bandé les yeux et on a fait comme Pina Bausch dans Café Müller. Danser dans un espace encombré qu’on débarrasse au fur et à mesure de la progression de la danseuse aveugle. On a inventé des stratagèmes de toutes sortes pour construire des machines à suicider. On se retrouve lundi matin à 9h30. Céline s’est absentée cet après-midi parce qu’elle jouait avec le théâtre de la Chandelle à Méricourt. Cet après-midi et ce soir. Jeudi prochain, le 17 octobre 2013, à 19h, on présente une étape de travail au public, au 11/19 à Loos en Gohelle, à Culture Commune. On a invité tous nos co-producteurs, des amis et des gens du quartier.

L’Abécédaire d’Angélica (début)

 

A comme Atra Bilis

C’est le nom de ma compagnie. Ca désigne une humeur hippocratique qui a à voir avec la mélancolie. J’ai cette facilité à voir le côté terrible des choses.

B

C comme Corps .

Il m’a fallu quinze ans pour trouver des gens qui comprennent mon travail, ma démarche. Ce que je veux ce sont des corps qui ne s’interrogent pas, qui ne se posent pas de questions, qui sachent être.

D

E comme Eloge de la faiblesse.

Eloge de tout ce qui est féminin. Cette faiblesse dont nous sortons toute notre force pour la faire exploser à la figure des forts, des hommes.

F

G comme Grand mère.

Ma grand mère, bien qu’analphabète, composait des chansons pour faire venir la pluie. Comme une sorte de prière et elle inventait ces chansons pendant qu’elle travaillait aux champs, je les mémorisais.  Tout cela pour vous dire qu’elle avait un sens poétique très fort.

H

I comme Innocence.

Je n’ai jamais rencontré un homme innocent. Vraiment innocent. Si nous nous trouvions face à l’innocence, la seule issue serait de marcher jusqu’au fleuve pour faire exprès de nous noyer ,car nous ne serions pas capables de le supporter.

J comme Je ne suis pas jolie.

Je ne suis pas jolie et je n’ai pas envie de l’être. Je ne suis pas jolie et je n’ai pas envie de l’être. Je ne suis pas jolie et je n’ai pas envie de l’être.

K

L

M comme Marie Antoinette.

Je voulais être belle comme Marie Antoinette et baiser autant que Marie Antoinette. Et puis j’adorais qu’elle se fasse couper la tête à la fin. Et si de temps en temps, il me prend l’envie de me trancher le cou , c’est sûrement parce que quand j’étais petite, je voulais être Marie-Antoinette.

N

O

P

Q

R

S comme Solitude.

La solitude est un scandale. Ce que je souhaite,c’est que vous compreniez que la solitude c’est quelque chose qui nous appartient à tous.

T

U

V

W

X

Y

Z