Porte-à-porte à Arville

Nous décidons de commencer par le haut de la rue principale, la rue des Templiers.
Nous c’est Ghyzane (Guisane ?), Benedicte, Christine, bientôt rejointes par Laura et Odilon endormi.
Sur le trottoir de gauche, sans lumière, les maisons semblent inhabitées. Ca tombe bien on fait celles de droite, au soleil. Une seule âme, une dame qui tond sa pelouse et ne nous entend pas l’appeler.
Ghyslane nous écoute avec son micro, elle prend nos commentaires sur ces maisons aux airs à l’abandon ; les chants de quelques oiseaux. Nos remarques sur cette maison en travaux où tout semble bientôt prêt à accueillir des vies en harmonie. Sa présence légère avec son micro incite à écouter mieux, à écouter autrement, nos voix, nos pas, les sonnettes… A mesure que nous progressons l’observer écouter me réjouit ; cela incite à entendre ces ambiances.
Les portes avec sonnette, les portes sans sonnette, ou avec mais qui ne fonctionnent pas, les personnes qui, quoi qu’il en soit, ouvrent, mais la fenêtre, au cas où on glisserait un pied par la porte ?
La première à ouvrir cette fenêtre se dit malade, elle tient son blouson contre sa gorge, et sourit. Elle aimerait que nous rencontrions le maire, mais il est à la Fête des fleurs à Cheverny. Elle insiste, demande comment nous joindre pour le prévenir. Bénédicte esquive. Annette – on l’apprendra plus tard, c’est la fille d’Antoinette, la vieille dame qui, comme sa fille, nous ouvrira sa fenêtre, 100 mètres plus bas mais sur le versant sans soleil –, décline notre offre de poser sur son pas de porte mais ne dit pas non pour l’invitation. Et nous met sur la piste des Oliveira qui eux adorent Arville, sont en résidence secondaire depuis longtemps et envisagent de rester s’installer ; eux ils seront intéressés.
La tondeuse a cessé, elle a rejoint son compagnon qui nous observe du fond de son jardin. C’est elle qui viendra jusqu’à nous tout en traduisant à son conjoint ce que nous lui apprenons ; le leitmotiv bien rodé que Bénédicte décline avec un rythme plus ou moins appuyé, modulé, selon les situations. C’est encore un non pour être filmé devant son pas de porte, sous prétexte de ses rides qui racontent son âge.
Alors on poursuit, on tente le château aussi. Il semble faire pendant à la commanderie. Un grand domaine, dont on ne voit qu’une cheminée et un bout de façade, qui me semble assez récente, fin 17 ou 18e s, et austère. Ce sera un petit jeu de piste, trouver une des entrées qui permettrait de communiquer avec son gardien, ou mieux un de ses habitants. Sur cette rue elles en feront deux mais sans succès.
La question se pose parfois par où entrer, il y a plusieurs entrées, on n’ose frapper par derrière, peut-être sur le côté… Il y aurait de quoi faire un reportage photo sur les formes des sonnettes, sur les rideaux plus ou moins épais, les fenêtres sans rideau aussi, ou avec volets… Les bâtis sont pour beaucoup cachés par l’espèce de crépi, sauf pour une maison en cours de restauration dans les règles de l’art, qui met en valeur la façade avec ses pierres et son vieil enduit. On remarque qu’il n’y a pas de chien. Mais devant une maison la grille est cadenassée, à deux endroits. Ailleurs au contraire des cordes flottent entre deux pieux et la vieille porte de fer forgée perdue au milieu de parterres de fleurs ne semble là que pour le décor.
La porte s’ouvre là où la boîte aux lettres peinte indique un accueil différent. C’est Brigitte qui nous ouvre, c’est son mari qui a peint la boîte mais elle peint, elle, en effet, et prend des cours chez un certain Merlin, qui n’habite pas loin, une maison un peu plus haut dans la campagne. Elle accepte volontiers de poser devant sa porte, près de sa boîte aux lettres colorée. Elle est habillée de noir. Résidence secondaire – elle vit dans l’Yonne – sa maison deviendra bientôt principale. Pendant qu’elle parle je vois une tête sortir de la maison où nous avions tapé au carreau. Brigitte va nous mener rencontrer cette vieille dame qui nous ouvre de nouveau sa fenêtre. Elle hésite à se prêter au jeu d’être filmée, elle a honte de son chapeau rivé sur sa tête, mais Brigitte la rassure. Elle porte des gilets les uns sur les autres, sa manche droite est brulée, son regard encore bien planté en elle, et son sourire un peu gêné s’adresse à sa voisine qui, encore, la rassure.
Accompagnée de Brigitte la passeuse et d’Odilon sur lesquels se posent tous les regards nous rencontrons sa voisine et complice de peinture. Les Oliveira ont aussi une boîte aux lettres peinte. Elle pose devant son pas de porte. Puis nous invite à regarder ses toiles. Des vues autour de Jérusalem. Elle s’installera à Arville une fois retraitée, elle aime cette nature, ces paysages, les collines, « c’est pas comme là où c’est plat », et puis avec la voisine c’est plus que la famille, d’ailleurs leurs jardins communiquent. Le mari fait des apparitions avec ses gants de jardin. Ce serait lui l’expert en peinture selon elle. Au cours de peinture vient aussi une infirmière de Souday et puis une personne de Mondoubleau. Elle appellera leur maitre de dessin, Merlin, pour lui demander de nous recevoir. Il accepte mais pas sa femme. Rendez-vous dans trente minutes. Le temps de finir le porte à porte dans cet Arville bien désert. Brigitte nous indique la maison de l’ancienne mairesse, en contrebas. Nous poursuivons. Porte close. En remontant vers le croisement nous rencontrons la vieille dame qui nous interroge : elle voudrait savoir s’il est possible d’éviter d’être montrée dans le film. Bien sûr la rassure Bénédicte qui s’inquiète « mais vous êtes sortie exprès pour nous demander ça » Oui explique Antoinette, elle a peur que ça fasse des histoires, avec ses enfants, et d’autres. Je la vois qui se voûte, dans ses gilets de laine, avec son regard un peu perdu et si gentil, elle répète qu’elle ne veut pas d’histoires. Nous la rassurons. Je lui dis que nous l’avons vu sa fille, Annette qui se disait malade. Antoinette ne l’a pas vue depuis longtemps explique-t-elle. Elle rentre chez elle. Je remarque qu’elle porte une chaussure noire et un chausson, beige. Ces petites traces de vie, ces fragments, parfois ça donne envie d’aller les entendre, les remonter jusqu’à leur source, celle que leurs regards pendant ces vingt secondes de silence où ils sont filmés ont laissé entendre. Frustration. D’autant que ce regard de grand-mère n’y sera pas, lui, dans le film.
Devant la Commanderie quelques visiteurs. Laura remarque sur une pancarte un tracé nommé « promenade de l’Enchanteur ». Je m’étonne. Quand nous repassons nous vérifions. En effet ils nomment Merlin pour indiquer des chemins de randonnée autour du village. On pourrait se croire non loin de Brocéliande. Nous avons fait toutes les maisons de ces deux rues du village. Nous partons donc en voiture rejoindre Merlin. Devant son portail une pancarte jaune qui indique que nous sommes sur le tracé de la promenade de l’Enchanteur. Etonnant. L’homme vient à notre rencontre. Il veut raconter sa vie, les « Boches » et le héros de la Résistance à Dijon, son domaine qu’il a dû quitter parce qu’ils ont installé « Mickey » non loin, sa venue à Arville vingt auparavant, ses cours de peinture, mais il ne se veut pas maitre, son goût pour les arbres, sa critique des cultivateurs et de leurs pesticides… En sortant nous prenons en photo Laura et Odilon, assise sur le capot de la voiture, elle a tout de la Vierge à l’enfant version lunettes de soleil.
Direction les fermes que nous pourrons rencontrer. La première pourrait être abandonnée. Sauf que tous les bâtiments semblent en bon état. Du moins leur toit. Excepté la voiture qui indiquerait une présence (mais souvent nous avons croisé des voitures garées devant des maisons vides), une dizaine de mangeoires indiquent une personne soucieuse des oiseaux. Finalement par la fenêtre on distingue une télé allumée. Je reconnais celui qui nous ouvre. Et se prête volontiers au jeu du film sans parole. À côté de la porte une autre semble bayer aux corneilles, vestige de ces vieilles portes en bois vissées sur des grandes charnières de métal. Tout semble laissé ainsi en l’état ; il nous explique qu’il travaillait dans le bâtiment en région parisienne, mais pour ses clients. À présent il aurait le temps mais plus la même forme. Avec ses mangeoires il nourrit une vingtaine d’espèces d’oiseaux différentes, faut bien, commente-t-il, vu les modes de production agricoles. Avant il y avait des petites propriétés, avec des maisons un peu partout. Ce n’était pas le modèle des gros bourgs, non, répond-il aux commentaires de Bénédicte sur le peu de monde à Arville. Les habitants sont dans la campagne, du moins ce qu’il en reste. Il nous accompagne jusqu’à sa mare. Autre élément courant de ces anciennes fermes. Sur le chemin qui nous ramène à Arville nous descendons le long du mur du château. Et découvrons un portail donnant sur une maison. Serait-ce la maison du gardien ? Non c’est un des descendants du châtelain du 17e s. qui nous ouvre, en souriant. Il est prévenu de notre passage, il fait partie des élus. Il s’interroge sur sa mine de travailleur de la terre avant d’accepter d’être filmé ainsi vêtu, si on l’assure qu’il ne semble pas trop ridicule. Bénédicte fait remarquer que nous avons rencontré beaucoup de personnes faisant leur jardin. C’est de saison, et il fait beau. Il commente qu’en effet, même s’il est un peu tôt encore, ce temps encourage à travailler. Après qu’il a posé devant son pas de porte arrive son épouse. Ils ne vivent pas sur place, même s’ils sont là souvent. En haut ce sont des cousins. C’est un domaine familial qui a toujours été habité. Il y a un siècle Arville comptait 300 habitants précise-t-il en réponse à la remarque sur le peu de personnes présentes alentour. Un peu fatiguées, nous ferons encore trois fermes en repartant. Le seul présent nous ouvre la fenêtre et la referme très vite, il semble plus préoccupé par ses classeurs de compta que par l’invitation qu’il a malgré tout – « ces choses-là, ça l’intéresse pas » – acceptée. Ailleurs seul un chien – un gros chien de garde – viendra renifler la voiture et nous faire douter un instant pouvoir la regagner.
Retour au QG, vite prendre des notes avant de repartir dîner et faire la fête, c’est le programme paraît-il.
Christine, veilleuse d’ici.

Porte-à-porte à Saint-Avit et à Souday

Lorsqu’on fait du porte à porte entre St-Avit et Souday avec une équipe d’HVDZ, il faut s’attendre à tout !

Bien sûr, beaucoup de maisons sont fermées. Certaines conservent encore les traces d’un temps où artisans et commerçants étaient nombreux dans le village.

(Et vous, que lisez-vous sur ce fronton ?)

Mais lorsque les portes s’ouvrent, les échanges parfois se prolongent et finissent dans la cuisine, autour d’un café ou d’un thé parfumé.

 

On essaie de comprendre pourquoi à Souday, fonctionnent encore une boulangerie, une boucherie, une épicerie, un coiffeur, un café-tabac, un restaurant, un garage, une école… Pourquoi, à Souday c’est encore « menu complet » comme dit la boulangère.
Un peu plus loin, on entend des jeunes dire qu’ils se sentent ici « seuls au monde », et qu’ils ont préféré partir.
Encore quelques pas, et d’autres nous disent qu’ils y sont heureux…
En partant faire du porte à porte, il faut juste s’attendre à prendre une bonne goulée d’humanité…
Fanny, veilleuse d’ici.

Souday – FFF – filiation – fidélité – foot

Souday, la plus grosse des anciennes petites communes qui composent la nouvelle commune de Couëtron-au-Perche. Souday, la surprenante, avec notamment la cantine très réputée (voir article précédent), la fanfare très réputée (voir article précédent) et le foot où nous sommes allés hier. Le foot à Souday. La Soudaysienne Souday. On nous a dit plusieurs fois qu’il fallait aller voir le foot à Souday. Et effectivement. Le foot à Souday, c’est 140 adhérents, pour une commune de 514 habitants. Le foot à Souday, c’est des bénévoles et un esprit, d’ailleurs reconnu et compensé souvent par des prix du fair-play.  Le foot à Souday, c’est concret : on voit des filles et des garçons sur le terrain qui s’entraînent pour le tournoi amical du jour (Souday  accueille trois clubs de la région).
Et on rencontre, pour une conversation filmée, Sébastien (le président du club) et Cyril, qui sont là pour encadrer les U7, U9, U11. Cyril était déjà au club de Souday lorsqu’il était lui-même poussin. Il a toujours joué là. (Juste une année, au club de Mondoubleau, à 14 ans. Mais c’était parce qu’à l’époque cette catégorie d’âge n’existait pas à Souday.) Cyril a toujours joué là, et son père était déjà au club. Maintenant, il y a aussi le fils de Cyril qui joue au club de foot à Souday.
Quand on allume la caméra, on demande : « Est-ce que vous pouvez vous présenter ? » Et Cyril répond : « Cyril Collignon », sur un ton qui nous rappelle vraiment quelque chose. Alors, on lui pose la question : Est-ce que votre fils s’appelle Jules ? Parce que, il y a deux jours, à l’école de Souday, on a filmé des enfants qui nous ont raconté chacun l’histoire qu’ils étaient en train d’écrire (leur atelier avec Anne Bouillard). Et, parmi les élèves, il y a un garçon qui s’était présenté comme ça : « Jules Collignon », avec le même ton de voix, la même mélodie, la même façon de lancer ses mots à la caméra avec un enthousiasme affirmé. On a la confirmation. Jules est bien le fils de Cyril. On continue l’interview et, plus on écoute Sébastien et Cyril, plus on comprend que le foot à Souday, lui aussi, est une belle histoire de tradition, de filiation et de fidélité.

Caméras d’existence

La semaine dernière, en regardant les artistes d’HVDZ travailler, j’ai réalisé que leurs caméras sont exactement l’inverse des caméras de surveillance. Au lieu de surplomber des rues désertes, elles font sortir les gens, les écoutent. Elles ne construisent pas une société surveillée, mais une société en-Veillée bien vivante.
Alors, quand les magiciens d’HVDZ seront partis, on va transformer toutes les caméras de surveillance en caméras d’existence. De temps en temps, on en choisira une pour déclamer, danser, parler en-dessous. Et la rue reprendra vie.
Fanny, veilleuse d’ici.

godot à Mondoubleau

Avec la classe de 5ème 2, au collège de Mondoubleau, on va tourner la séquence « En attendant Godot ». Pour faire connaissance, on discute d’abord un peu. Tiens, un petit jeu. Si vous deviez partir avec un seul objet, lequel choisiriez-vous ? Un crayon à papier pour dessiner / Un micro pour m’enregistrer (j’aime bien parler) / Une manette de PS4 (2 fois cette réponse) / Min téléphone (6 fois cette réponse) / Mon casque pour la musique (3 fois cette réponse) / Mon PC / Une tenue de sport. Et puis, on explique ce qu’on va tourner pour le film-spectacle. « En attendant Godot ». Acte I : c’est l’histoire de deux hommes qui attendent au pied d’un arbre, il attendent Godot. En attendant, ils parlent de la vie, de l’existence. Acte II : ils attendent à nouveau. L’arbre a des feuilles. À force d’attendre, il peut y avoir des embrouilles. Des disputes. Parce qu’à force d’attendre, on est trop longtemps ensemble. Vladimir et Estragon. Didi et Gogo. Il faut se mettre en colère. Qui veut le faire : Gohann, Anaïs, Noa, Océane, Alexian, William, Quentin, Erwann, Clélia, Jessica, Elvan, Alisson, Mathéo vont se prêter au jeu.

Des enfants qui font beaucoup de bruit

À la salle de l’Étoile de Mondoubleau, ce vendredi après-midi, il y avait une collecte de sang. On a rencontré Claude Boulay pour une interview.
« Je m’appelle Claude Boulay. Ici, Boulay, c’est un nom tellement commun que je ne l’écris plus avec une majuscule. »
Claude était instituteur à l’école primaire de Mondoubleau.
D’ailleurs, pour cette « conversation filmée », nous sommes avec Morgan (qui fait la radio de la veillée : https://audioblog.arteradio.com/blog/134615/la-veillee-du-perche), un ancien élève de Claude.
« Bonjour, vous me reconnaissez ? Je suis Morgan. – Ah oui, oui, je me souviens. »
Claude est maintenant président départemental pour le don de sang. Il nous raconte tout ce qu’ils mettent en place pour qu’il y ait du sang pour soigner et sauver des vies, pour sensibiliser le plus de monde possible au don, pour organiser régulièrement des journées de collecte.
À un moment donné, on change de sujet pour parler du territoire, de Mondoubleau et on lui demande :
« Si vous aviez une baguette magique, qu’est-ce que vous changeriez à Mondoubleau ? »
Il est surpris par la question, mais quand il répond et on sent beaucoup d’émotion.
« Je construirais une grande école, une école avec beaucoup d’enfants, des enfants qui font beaucoup de bruit. Ça manque. »
Il réfléchit. Comment faire pour remplir cette grande école. Évidemment, il faudrait que des familles viennent ici. Et pour cela, je ne sais pas, il faudrait déjà changer d’agriculture. Si on n’était pas sur une agriculture industrielle, ici, peut-être que des familles viendraient.

Fortune, Hollywood et Jamaïque

(Peut-être qu’il y a eu un massacre au bout du chemin au 11ème ou 12ème siècle, ou peut-être juste des abattoirs. On ne sait pas, plusieurs légendes circulent.)
À la ferme de la Massacrerie de Souday, ce sont génisses de Valérie et Fabien qui grandissent. Leurs vaches adultes sont à leur ferme de Boursay. C’est aussi à Boursay que naissent les veaux. Mais entre les deux, les vaches viennent toutes passer leur adolescence à Souday.
Pour Valérie et Fabien, et pour Christian et Marie-Christine, les parents de Fabien, c’est donc à Boursay qu’est le plus gros du travail. Alors, après avoir rencontré les agriculteurs à Souday, pour une conversation filmée, et avec tout ce qu’ils nous ont raconté, on a eu envie d’aller voir la traite.
Hop, vendredi matin, départ de Mondoubleau très tôt, sous un beau brouillard et on arrive à la ferme de Billetière. Les vaches sont très curieuses, elles viennent vers nous, essaient de lécher la caméra de Bénédicte venue faire des images.
Pour la traite, c’est au fur et à mesure. Ici, on appelle chaque vache par son prénom. Certaines sont en vacances (elles sont traites 305 jours par an, ensuite c’est deux mois de repos, notamment quand un veau arrive). Celles qui travaillent viennent sur les deux quais de six places, et là c’est entre 20 et 64 litres par vache, environ 2300 litres récoltés. Et les trois dernières vaches pour la traite, c’est toujours Fortune, Hollywood et Jamaïque, les trois doyennes, qui sont un peu plus choyées que les autres, respect oblige.
Cette année, c’est l’année des P, et la plus jeune, on la rencontre un peu plus tard, au moment de son repas : Pyromane, la fille de Mégamane. (Pyromane est née le 19 mars, le jour de l’anniversaire de Didier.)
Merci aux agriculteurs pour toutes leurs explications et le partage leur passion, merci pour l’accueil dans tous les recoins de leur ferme.

L’Éveil de Souday dit « La Clique », l’éternelle et intergénérationnelle fanfare.

Jeudi matin, dans la salle Sainte-Thérèse, derrière l’église de Souday, on avait rendez-vous avec rencontre Philippe (tambour) président de « l’Éveil de Souday », Christian (clairon) trésorier et Noé (trompette), le chef de musique. Cela fait plusieurs décennies que Philippe, Christian et Noé font partie de La Clique, qui, plus précisément, est une « Batterie-Fanfare ». L’un nous raconte qu’il est arrivé ici à 17 ans avec son nouveau clairon, pour l’autre que c’était vers 9 ou 10 ans qu’il a passé deux années à apprendre le tambour avec le monsieur de la briqueterie pour pouvoir rejoindre la fanfare, le troisième est arrivé vers 10 ans, mais fallait avoir du souffle. Et l’oreille, parce que personne ne lit la musique, tout s’apprend comme ça, on se transmet de musiciens en musiciens. On se transmet les morceaux, les chorégraphies de clairons pendant que les trompettes jouent, les chorégraphies de trompettes pendant que les clairons jouent. Et puis, il faut aussi savoir marcher au pas : « parfois on fait c’est 5 km quand on joue, quand on sort ». Un nouveau qui intègre la fanfare, il lui faut 5 à 10 ans pour être au top. Ils nous parlent du costume, avec le pantalon gris et son liseré, la chemise blanche, le boléro couleur fraise écrasée devant et gris derrière.
Mais surtout, ils nous disent qu’il y a tous les âges à l’Éveil de Souday. Là, on est un peu étonnés, parce que devant nous c’est des « anciens de l’Éveil de Souday » qui parlent. Mais on va s’apercevoir que c’est vrai, que ce ne sont pas que des mots. Cette fanfare existe depuis très très longtemps et elle est intergénérationnelle depuis toujours : des jeunes de 9- 10 ans, il y a des ados, les parents et des anciens. Dans beaucoup de domaines on aimerait réussir un tel mélange d’âges avec autant de succès. Ici, les jeunes viennent et restent. Comme les jeunes d’avant qui sont venus et sont toujours là. Ce qu’on nous explique c’est qu’il y a une très grande attention des anciens pour que les jeunes se sentent bien.
Le lendemain, c’est vendredi et, depuis toujours, le vendredi de 21h à 22h, c’est la répétition. Alors le lendemain, on retourne dans la salle Sainte-Thérèse, derrière l’église de Souday. Et c’est un peu émouvant de voir cette histoire de fidélité, d’engagement, de mélange de générations. Il y a des enfants, des ados, des anciens, des hommes et des femmes. Et dans les coins de la salle, il y a des spectateurs qui écoutent la répétition (parents venus accompagner leurs enfants musiciens, petits frères et petites sœurs). Et on voit que c’est réel et que c’est habituel. C’est sûr, c’est comme ça tous les vendredis. (Sauf quand il y a un concert le samedi, là, le vendredi on se repose, parce que pour les soufflants, c’est très physique et il faut s’économiser les lèvres.)
Merci pour l’accueil (au kir percheron) et bravo à toute la clique.

Petit extrait de la répétition du vendredi 22 mars 2019, à Souday :