Le Kariofole

 On a rencontré Catherine Régula, la directrice du théâtre du Kariofole.  Le Kariofole c’est la charrette des fous qui part sur les routes et Catherine trouvait que ça allait bien à la compagnie. Elle est implanté à la MJC depuis 30 ans. Elle monte des projets avec des habitants, propose des dizaines d’ateliers, faisant presque office de conservatoire de théâtre sur la ville avec plus de 200 élèves pris en charge. Catherine écrit et monte ses spectacles en se basant sur des ateliers d’écritures et de ce qu’elle vit ou voit à Ris. Catherine est passionnée par le théâtre et par les gens, ou par les gens et le théâtre, elle développe un vrai travail de territoire, tout en faisant aussi tourner ses oeuvres sur toute le France et même au-delà, Catherine  finit souvent ses phrases par t’as vu et possède une énergie et une envie communicative. La charrette des fous essaie de passer partout, Catherine raconte: « Il y a 20 ans, 10 avant que tout le monde commence à s’intéresser eu problèmes des banlieue comme on dit, moi travaillant ici je voyais bien que ça allait pas du tout, que y’avait de profondes blessures. Alors je suis allé en bas des tours, dans les halls, sur les parking, chercher les jeunes, je leur disait:
– Tu veux faire un spectacle?
– Ouaiiiiis! 
– Alors monte dans le camion!
Et on a bossé ensemble, ça s’appelait l’oeil du cyclone . »
On se trouve plein de points communs avec Catherine qui nous raconte sa prise de conscience: « Je suis passé par les voies classiques, institutionnelles on va dire. J’ai été assistante de Jean-Pierre Vincent par exemple, j’ai joué des soirs et des soirs dans des théâtres parisiens mais je ne  m’y retrouvais pas. Une fois que t’as fini de jouer, tout le monde est parti, tu ne rencontre personne, tu ne sais pas pour qui tu joues. Ici, je connais tout le monde, on remplit les salles de gens qui ne seraient pas aller au théâtre sans cette confiance, cette connaissance. On est un théâtre pauvre, un théâtre de l’urgence. »
On est bien contents que Catherine nous ait accordé un peu de ce temps, on va passer cet après-midi à la MJC pour visiter la salle de spectacle et continuer à échanger sur l’urgence, sur la participation des habitants, sur tout  ce qui nous rassemble…

Il y a le moulin du monde

Il y a le moulin du monde, place du moulin à vent. Il y a des amandes grillées et un grand marché, il y a des enfants à roller et des mamans à poussettes, il y a pleins de couleurs (du jaune du vert et toutes les couleurs de l’arc en ciel).

Il y a Amélylounette, il y a Marieloüette , il y a Nana, il y a Didi roi du Maroc , il y a double mètre, il y a JB, Mamie Tatine, Rachou, Daniel from QC, il y a Maggie et bébé Maggie. Il y a des bâtiments et des jardins. Il y a le restaurant Alanya et les loukoums à la Grenade, il y a Nadjib qui dessine Bart Simpson et Zerda qui dessine des princesses. Il y a des corbeaux aux fenêtres et un pigeon caché dans le grenier. Il y a Mamé que l’on rencontre enfin dont on parle depuis samedi, la boulangerie à côté toujours pleine de monde. Des toboggans, des pipas, il y a des trottinettes il y a beaucoup de bonnes odeurs. Il y a ta soeur, mais y’a pas la mer. Il y a Mourad qui s’tape. Il y a des chaussures à 5€ et du thé à la menthe à 1€. Il y a un magasin d’électronique qui vend de tout ! Il y a un cinéma, une pistoche des enfants qui barbotent dans la marre, il y a des championnes de GRS, des champions en Boxe Thaï ! Il y a Catherine et le Kariofole

Il y a 3 gares RER, il y a des facteurs et un torréfacteur. Il y a beaucoup de vent sur le plateau pour faire tourner les girouettes 

Soleil couchant sur la ville ( Anna Ollivier nous a amené l’un de ses poèmes)

Ce soir j’ai ouvert les poèmes de Xavier Grall,
Il nous dit d’aller à la ville
que désormais il est revenu vers ses racines, en Bretagne.
Moi je vis en ville, en banlieue,
Et ce soir, de ma fenêtre, je vois le ciel rougeoyant,
La ville en est toute inondée,
À mes yeux s’offrent des immeubles nacrés de rose,
Des femmes y vivent avec leurs enfants,
Le ciel donne aux hommes,
où qu’ils vivent, des couleurs partagées.
Elles ne sont la propriété ni de l’est, ni de l’ouest,
ni de la campagne,
ni des rives marines.
En ville, elles sont offertes à une multitude de résidents,
– ils ont quitté leur province natale,
– sont descendus des montagnes,
– se sont envolés depuis les sables du Sahara
– ou de Pondichéry ou de Kinshasa.

Pour eux,
les vagues marines sculptant le jusant demeurent: souvenir,
les cascades, voiles blanches des versants: vaine imagination,
les ondulations sablonneuses du bled, du village natal: mirage,
la somptueuse forêt tropicale nourricière: nature saccagée,
du pacifique à l’océan indien circule les marchandises: commerce d’abord.

Tous, nous vivons en banlieue.

Soleil levant,
demain, tu irisera ancre les murs de notre ville.
Et, dès les prochaines fraîcheurs matinales,
une nouvelle aurore viendra peindre
l’atmosphère de notre cité, de lueurs saumonées.
Elle est pleine de vie notre cité, de gens qui vont, viennent,
circulent et résident les uns avec les autres,
richesse des origines différentes,
nouvelles culture en gestation.
Les facultés de l’esprit, de goûts, de solidarité,
des déracinés de la banlieue, créent une humanité rénovée,
mais de beaucoup encore ignorés.
Les êtres humains vivent grâce à leur esprit d’initiatives,
à leurs rencontres, ciment des espaces partagés,
la lumière du même soleil éclaire toujours
la diversité de leurs cheminements.

Foooormidable

On revient juste du club des anciens où l’on a bien ri. On s’est présenté rapidement puis on a proposé une valse. « Une valse? Je préférerais Papaoutai, vous connaissez Stromae? » nous demande Francine. Oui on connaît un peu, Francine est intarissable:  » Il est fooooormidable, c’est le cas de le dire! Moi, il me fait plus penser à Nougaro qu’à Brel, mais en tout cas il a un grand avenir devant lui! » Au même moment Mourad nous rejoint au club: « Ah bah tiens, le voilà Stromae! » Gigi, la doyenne du club surnomme Mourad double mètre. Il propose une petite danse, à peine a t’il commencé que Francine s’exclame » Ah bah il steppe! » Tout le monde applaudit la prestation de Mourad, Francine lui dit de faire attention à ses articulations! On parle de Ris-Orangis, du haut et du bas, ici c’est le plateau, donc le haut, « là où les gens sont le plus gentils » d’après Francine qui conclue avant de partir: « Il y a tout dans cette ville, toutes les activités possibles, si on s’ennuie ici,c’est qu’on le veut bien. »