Est-ce qu’y’a des pieds?

Hier, dernière journée d’errance sur le plateau, aujourd’hui on déménage le QG du moulin du monde et on s’installe à Robert Desnos. On a distribué des tracts dans les boîtes aux lettres, on est allé dans les commerces où Mourad a steppé. Il était prévu qu’on se rende à la ludothèque pour que Mourad anime un atelier à 15heures. Une dizaine d’enfants étaient présents et tous prêts à participer. Une petite fille a dit: « Mais vous êtes bien trop grand j’arrive pas à vous regarder, j’me casse le cou! »Mourad a entamé l’initiation: « Est-ce qu’y’a des pieds? Est-ce qu’y’a des mains? » Et tout le monde a essayé de tenir le rythme en respectant la musicalité. Les enfants se sont très bien débrouillés. À la fin, Mourad leur a fait une démonstration et la même petite fille qui le trouvait trop grand s’est exclamé: « Mais c’est incroyable! »On s’est tous donné rendez-vous demain, 18h à Desnos.

Passer la Seine

Je viens de l’autre côté, de l’autre côté de la Seine, de l’autre côté de Paris. Banlieue Nord, banlieue Sud comme deux hémisphères. Je suis partie tôt, j’ai vu défiler des pavillons, des jardins, des immeubles de plus en plus grands, un petit bout de Paris, aperçu la Sacré coeur avant de m’engouffrer sous terre, faut pas déranger la capitale. Ressortie de l’autre côté, vu des usines, passé 1, 2, 3 fois la Seine, vu un homme qui faisait de l’aviron, un port, des bateaux, un cimetière, des bois au loin, une mosquée, 1, 2, 3 églises, des immeubles de plus en plus petits, retrouvé des pavillons et des jardins. J’étais de retour en banlieue, mais dans l’autre banlieue, à peine 50km et deux heures de trajets. J’ai passé un jour, puis un autre à l’autre bout de l’hémisphère sud, pour me rendre compte que j’étais au même endroit. Que le lieu du ban, prenait son sens d’un côté et de l’autre de la Seine. J’ai entendu: Paris est trop loin, Paris est trop cher, le train a toujours des problèmes, mais on est bien ici, on changerait pour rien au monde, même pour la ville d’à côté, ici c’est chez moi même si je viens d’ailleurs, ici c’est chez moi même si je viens de loin. D’où l’on vienne, on a bâti nos repères en même temps que les tours, cultivés nos références en même temps que les jardins. D’un côté comme de l’autre on se sent chez nous, en imaginant même pas pouvoir échanger nos places. D’où qu’on vienne et où qu’on aille, on reste des banlieusards. À Ris-Orangis, je me suis sentie chez moi, la banlieue est un village.