Tu sais (2)

Tu sais, c’est maintenant qu’on est presque sur le départ que je perçois entièrement la raison de notre présence. Je la saisis et pourtant je ne peux pas la dire, parce qu’elle n’a pas de nom ou bien, elle en a mille. C’est ce truc là, ce machin là qui circule, d’un humain à l’autre,d’un lieu à l’autre, d’une présence à l’autre ; qui prend tous les visages et toutes les formes et qui pourtant n’est jamais contenu, jamais capturé. Un cheval, un courant marin, ou le fameux battement d’aile. Un rubik’s cube, une boule à facettes. Il y a au milieu de nous cet impalpable que nous essayons de danser, que nous essayons de porter, que nous essayons de dire. Il se tient là, à notre hauteur, jamais plus haut, jamais plus bas, jamais séparé, mais toujours dans l’interstice, comme un petit animal planqué.

Tu sais, quand je dis NOUS, c’est NOUS + VOUS, pas uniquement nous.

Tout illuminer

Hier, vous étiez là. Nous, on était sur la scène, on vous voyait entrer, vous installer. On avait le trac, peut-être vous aussi. Bouchra, Raymonde, Jeanine, Marie-France…on vous reconnaissait, on était heureux de vous voir là. Le noir s’est fait et on était à l’affut de vos rires et de vos silences. On vous regardait vous regarder. 1h50 ensemble, partageant la même émotion. Et puis tout s’est rallumé, vous nous avez applaudit, on vous a applaudit. On s’est retrouvé, vous nous avez dit merci et on vous a dit merci. « Vous nous avez illuminés,  même nos locaux paraissaient plus grand et plus beaux » nous avez vous dit, vous qui êtes bénévoles au café rencontre. »Vous avez tous rendus beaux, c’est peut-être un peu votre but? » Oui c’était un peu notre but.

Ce n’est pas parce que (2)

Ce n’est pas parce-qu’on est comédien qu’on ne dit pas la vérité
Ce n’est pas parce qu’on est danseur qu’on a pas le droit de parler
Ce n’est pas parce qu’on dessine qu’on ne peut pas danser
Ce n’est pas parce qu’on joue qu’on s’amuse
Ce n’est pas parce qu’on fait du son qu’on n’est pas une lumière
Ce n’est pas parce qu’on fait de la lumière qu’on n’est pas éclairé
Ce n’est pas parce qu’on est derrière l’objectif qu’on n’a pas de but

Ce n’est pas parce que c’est du théâtre que ce n’est pas la réalité
Ce n’est pas parce que c’est la réalité que ce n’est pas du théâtre
Ce n’est pas parce qu’on est jamais allé au théâtre qu’on a pas le droit d’y aller
Ce n’est pas parce qu’on est spectateur qu’on n’est pas acteur
Ce n’est pas parce qu’on est acteur qu’on n’est pas spectateur

Ce n’est pas parce qu’on se dit au revoir qu’on se quitte
Ce n’est pas parce qu’on se quitte qu’on ne s’aime plus
Ce n’est pas parce que c’est fini qu’il faut oublier

après la première

On a joué ce soir. Des centaines de personnes sont venues voir le travail. Du quartier des Indes, de Sartrouville et d’ailleurs. Un vrai bonheur ! On a pu discuter longuement dans le hall du théâtre après le spectacle. Les personnes étaient très émues. Et nous aussi. On pourrait s’installer à Sartrouville pour toujours. On a vu arriver des gens des quatre coins du quartier. Et repartir tard dans la soirée. Demain aura lieu une autre représentation de la Veillée. On espère bien que les gens viendront une fois encore en nombre du quartier et d’ailleurs. On se fera un plaisir de tenter de leur redonner un peu de ce qu’il nous ont offert pendant ces trois semaines de résidence.