les roses

Pour rencontrer les résidents des Roses, la résidence des personnes âgées, on est allé un peu avant le spectacle. Mercredi, c’est toujours des activités hors normes, des trucs différents, des sorties. Il y a un spectacle surprenant aujourd’hui, une dame de quatre-vingt ans qui fait des claquettes en minijupe, et qui chante Marilyn Monroe et Annie Cordy, et son mari s’occupe de la musique et chante pendant les changements de costumes. Sacré spectacle !
On a eu le temps, avant le début, de distribuer des tracts, de parler avec les résidents, de faire des portraits. Et puis on a parlé un peu avec l’équipe d’encadrement sur le contexte et le fonctionnement de la résidence, et aussi de l’implantation toute récente d’un établissement médicalisé, un EPHAD, juste là, dans l’ancien jardin.

des choses négatives

On entend souvent, beaucoup, parler d’insécurité. Ici, à Lommes, et ailleurs. A chaque fois qu’on fait des Veillées, qu’on parle avec les gens, on entend ça, que c’était plus sûr avant, que c’était mieux avant. Ça nous attriste toujours un peu, parce que, par exemple, ici, la Délivrance, c’est un quartier calme et serein, alors on se dit que cette peur, c’est la télé, c’est les médias qui l’ont insufflée. C’est pas le réel, c’est sa représentation non-objective, à des fins politiques. Et des fins politiques qui peuvent mener droit dans le mur, parce que créer de la peur n’a jamais rien amené de bon. Alors ça nous attriste. Un monsieur du Comité de Quartier a dit ça, ce matin, au marché : il a dit c’est dommage que les gens parlent autant des choses négatives et si peu des choses positives. Il a dit, c’est surtout les médias, c’est dommage.

au coeur du marché, au coeur du quartier

Au marché de la Délivrance, ce matin, on a rencontré beaucoup de gens. On a rejoint les membres du comité de quartier qui y tiennent un stand, de temps en temps, et qui offrent des bonbons, des boissons chaudes et fraîches, et qui créent ce lieu convivial, au cœur du marché, au cœur du quartier. On a installé notre stand de portraits-citations et nombreux sont les Lommois qui se sont spontanément prêtés au jeu.

un modèle

On a rencontré Pierre Haigneré, historien de la cité des cheminots de Lomme. On a eu une longue discussion passionnante. On repassera lui donner la vidéo de la veillée des cheminots de Méricourt qu’on a faite en juin 2009. Forcément il y a beaucoup de similitudes. Forcément. On a parlé beaucoup des lieux principaux de la cité. On a regardé beaucoup de photos. Monsieur P. Haigneré est parti et revenu Il est fils de cheminot revenu vivre là. Il défend beaucoup la cité. Il voudrait qu’on reconstruise le dispensaire qui faisait office aussi de centre social. Il dit que les conditions données à l’ouvrier étaient exceptionnelles, il y a 80ans. A la cité des cheminots, à Lomme. D’ailleurs il dit que la ville cossue de Bondues a copié le modèle des cités de cheminots pour bâtir ses espaces de grandes maisons bourgeoises. Toutes les maisons était différentes. Il y avait un souci du beau, dit il. Il dit, il y a eu un avant et un après le bombardement de 1944. On a parlé de l’ascenseur social. Il a parlé de l’importance de la bibliothèque  qui était un lieu sacralisé. Il se souvient du parquet en bois. Il dit quand on venait avec nos chaussures à clous il fallait mettre des patins. Pour lui l’ascenseur social passait par la bibliothèque et le tramway pour aller étudier à Lille… La discussion était réellement passionnante. On a parlé de la famille des cheminots qu’on a voulu isoler et qui fait corps quand il s’agit de protéger les acquis sociaux du monde ouvrier. Il nous rappelle que l’implantation d’un quartier ouvrier à côté d’un centre ville riche n’a pas toujours été évident.

les bruits et les fureurs du monde

Jean Hurstel dans Une nouvelle utopie culturelle en marche ?, avec la voix d’un intermittent prolétaire en colère (scène 3) :

N’oubliez pas que Saint Malraux a commis un péché capital et pour rester dans le registre religieux, un péché originel. A la création du ministère, il a exilé tous les mouvements d’éducation populaire qui, pourtant, s’étaient mouillé la chemise pour démocratiser la culture. Il les a relégués à une sous-direction de la Jeunesse et des Sports. La culture débarrassée, délestée, de tous ces laborieux culs-terreux, d’éducateurs populaires, pouvait enfin s’élever dans l’éther par l’art, dans le ciel serein, de l’art pour l’art, dans un ballet aérien de formes pures, sans plus aucun contact avec les bruits et les fureurs du monde. Bon, j’exagère un peu, ils étaient bien obligés de retourner sur terre pour négocier leurs subventions. Les autres, les éducateurs populaires, à force d’animation globale, de culs-terreux, sont devenus des « socio-culs » et ont tellement labouré les déserts culturels qu’ils ont tout simplement disparus, évaporés.

Cheminots d'ici et d'ailleurs

La cité des cheminots change de peau peu à peu. Les travaux ont bien avancés et avancent encore. Il y a plein de rues en chantier. Les maisons sont revendues, rénovées, réhabilitées. Tout le monde nous dit, la Délivrance, c’est un village. Un village plein de verdure, de jardins fleuris, d’arbres, au calme.
On se dit que c’est fou comme ça ressemble à la Cité des Cheminots de Méricourt, où on a fait une Veillée il y a déjà un peu plus d’un an. L’architecture du chemin de fer. Les maisons partagées en deux ou quatre. Petites maison des années trente, avec ici un pigeonnier dans le pignon, là un clapier à lapin. Et puis la structure sociale du quartier aussi, avec les écoles, la bibliothèque, la salle des fête des cheminots… On a une pensée pour tous les gens – Marie-Josée, Martine,…- qui nous ont accueilli au Centre Max Pol Fouchet, à Méricourt, pour notre première veillée cheminote, et on se plonge avec autant de plaisir dans l’histoire et la vie d’ici, à Lommes.