Mississipi (1)

Ce matin Didier et Marie se rendent dans le Mississipi. C’est Christian Hamonou qui nous a fortement conseillés d’aller voir Monette Guernion au quartier du Mississipi. Il n’avait pas son numéro de téléphone, mais nous a dessiné un plan: « Après, le panneau Mississipi, première à droite, Monette a plein de choses à dire, allez-y de ma part ». Le Mississipi est un quartier de Plouagat à la sortie de Châtelaudren, Monette nous fait entrer tout de suite, il fait froid et le vent est glaçant, elle se met à nous parler du quartier dès qu’on dépasse le pas de la porte mais ne souhaite pas être filmée. Avant même d’ôter nos manteaux et de s’installer on lui demande » Alors Mississipi, ça vient d’où? » « Et bien je ne sais pas! Il y a plein d’anecdotes mais rien de sûr, en tout cas ça remonte est loin, les papiers de ma maison remontent à Napoléon III et ça s’appelait dèjà comme ça! » On s’installe et Monette nous amène les documents: « C’est mes grands-parents qui ont acheté cette maison, mon père est né ici, je suis née ici, mes parents sont morts ici, ils tenaient un café ici, et moi j’avais une boutique d’électroménager ici aussi! Ma grand-mère c’était une baroudeuse, quand mon grand-père est parti à Paris travailler sur les chemins de fer, elle l’a rejoint mais ne s’y plaisait pas, elle lui a dit on rentre! Mon grand-père lui a rétorqué qu’il n’y avait pas de travail au pays. Si, si tu vas voir, qu’elle lui a dit. alors ils sont revenus, ils ont vendu des oeufs et des poulets, puis ont transporté des cochons dans des wagons sur la ligne Paris-Brest, et puis ils ont acheté ici, ouvert un café, mon grand-père est devenu maire de Plouagat, il est mort d’une crise cardiaque dans la mairie! Jean Jiquel il s’appelait, vous pouvez le noter. C’est pour vous dire à quel point je suis chez moi ici! »

On est revenu sur tout ça !

Souvent on raconte aux personnes qu’on rencontre comment et pourquoi on fait ce qu’on fait. C’est une façon de nous présenter. On dit qu’on est là, grâce à Itinéraire Bis et au réseau au fil de l’eau. Mais notre action remonte à des années en arrière. On est associé à la scène nationale du bassin minier du Pas de Calais, Culture Commune et depuis notre installation sur le site du 11/19, à la Fabrique Théâtrale on mène un travail de co-construction de spectacles avec les gens de là-bas et de partout. Tout cela a démarré parce qu’on se disait qu’on devait aller au devant des gens, en priorité des quartiers populaires pour redéfinir ensemble le sens de l’art et de la culture. On a fait le constat que, travaillant au milieu des cités ouvrières, c’est comme si plein de gens ne s’intéressaient pas à ce qu’on appellerait une certaine culture légitime ou n’en a avait rien à faire. Mais aussi et surtout que d’un autre côté ceux qui font l’art et la culture légitime méprisaient la culture populaire et ouvrière. Comme une lutte des classes. Donc on est parti en campagne depuis plus de dix ans de façon artistique et militante, en se disant qu’on allait frapper à toutes les portes pour discuter avec les gens sur le sens que chacun donne à l’art et la culture. Et pour faire que l’art et la culture soit au service des gens et de la transformation sociale et que chacun soit amené à vivre poétiquement les lieux qu’il habite.

Pas-de-boutiques

Cet après-midi, on se promène dans Châtelaudren. C’est une ville commerçante, on propose des pas-de-boutiques, au Proxi Market, au magasin de sport, à la maison de la presse…on est très bien accueilli, on en profite pour faire quelques cadeaux pour nos familles. On va à la sortie de l’école proposer des portraits citations aux parents venus chercher leurs enfants, on y croise Angèle rencontrée au chantier communautaire, on y croise également Nathan et Théo, des petits garçons adorables qui font littéralement fondre Maggie et Marie. Nathan choisit: « le paradis est là où je suis », oui ,dit il, du haut de ses cinq ans: j’aime Châtelaudren, c’est chez moi ça! On propose un pas-de-boutique aux patrons de la crêperie du Leff, il acceptent avec plaisir et nous invitent à boire un café. On passe un moment avec eux, ils sont ici depuis quatre ans, avant ça ils ont passé des années en Guadeloupe où ils tenaient également un restaurant, après un détour par la Sarthe, ils sont venus s’installer ici. »On a toujours aimé bouger, on restera pas toujours, mais là on est bien, bien sûr ça n’a pas été facile d’emblée, imaginez des sarthois qui viennent faire des crêpes en Bretagne! »

Je suis prête à tout lui sacrifier, tout sauf mon indépendance

Natacha est passée au QG. Elle arrive en plein milieu de la folie organisationnelle, pour nous aider à trouver des solutions. Natacha pétille, pimpante elle met du sourire sur son passage. A Itinéraire Bis, c’est l’une des cinq premières personnes que l’on avait rencontrées avec Pascal, Philippe, et Isabelle, et Paul. Paul, que l’on connaît depuis avant, depuis longtemps, Paul qui devait être avec nous et qui s’est blessé, on pense à lui.
Natacha, donc, est passée, elle essaye de trouver des solutions avec nous pour les arrivées des uns et des autres, nos camarades danseurs et acrobates qui arrivent entre samedi et dimanche des fois tard dans la soirée.
On a trouvé, en 30 mns on a tout solutionné ! Tout le monde aura un moyen d’aller de la gare de St Brieuc au gîte ou du gîte au QG. C’est pas toujours simple, mais ça se règle avec le sourire, et la bonne humeur …