marie noëlle-carnets de route-

Hier au Conseil d’ Administration de la compagnie, on a détaillé tout ce qu’on allait faire. On multiplie les accompagnements avec  différentes compagnies, Ta Zoa la compagnie de Charles Compagnie et de manière plus intense la compagnie Porte 27. Porte 27 fait un énorme travail en lien avec la prison de Fresnes et sera présente dans quelques mois au 11/19 pour travailler auprès des gens du camp des éxilés de Angres. Marion, Mathieu et Vasil  (tous trois issus du CNAC) multiplient les contacts et les interventions avec l’idée d’ inventer des formes qui déplacent les manières de voir et les rapports entre spectateurs et acteurs. En rendant les gens acteurs de propositions artistiques qui participent d’un détournement de la réalité  et qui permettent la rencontre. Créer l’étonnement et l’émotion qui amènent la conversation et la remise en question des rôles et des places de chacun… Cet après midi on va à la DRAC. Ma nièce, Marie Noëlle travaille  la DRAC. La fille de Fernand, mon frère que je n’ai pas vu depuis fort longtemps. Il est revenu habiter à la cité 3 de Ferfay, là où mes parents ont passé toute leur vie. Il a travaillé une quinzaine d’années à Paris. Puis il est revenu travailler à Auchel comme agent de police. Je pense que Fernand, tout comme mon autre frère Jean Henri qui habite près de Vannes, n’ont jamais vu un seul des spectacle que j’ai faits. Au Prato, au Ballatum aussi bien qu’à HVDZ. Ma soeur Eliane est venue. Beaucoup plus souvent. Ma cousine Kathy a vu j’m’excuse à Auchel, à l’Odéon. Avec ma tante Rose. Pour mal faire ce jour là il n’y avait quasiment qu’eux dans la salle. J’aurais préféré une salle pleine. Ma tante Rose avait beaucoup ri et beaucoup plaisanté avec Kader. A part ma soeur et son fils, je n’ai plus aucun contact avec ma famille (du côté de Ferfay je veux dire). Comment j’ai fait? Je ne vais tout de même pas tout mettre sur le dos du théâtre! Peut être que si! Peut être que c’est ça! Mon beau frère m’avait dit, quelques temps avant sa mort… je ne te dis pas qu’on se retrouvera dans dans ton théâtre… tu sais ce que j’en pense… c’est pas comme tous ces hypocrites… ma soeur lui avait répondu, tu verrais maintenant, c’est beaucoup mieux! Les Atomics même si parfois c’est un peu compliqué est un spectacle populaire. J’y tiens.

pif-carnets de route-

On a vu Fred de Culture Commune qui nous a dit les Atomics, c’est un peu comme un voyage au pays des Veillées. On va reprendre Inventaires au Grand Bleu. On avait joué Inventaires, cette version là d’Inventaire une seule fois. Au Prato quand on a participé aux journées d’inauguration de la nouvelle salle du Prato. Avec le Prato ensuite (ou avant, je ne sais plus) on avait fait ensemble une soirée au Colysée à Lens. On (HVDZ)  avait fait une veillée sur les cités neuf et neuf bis de Lens et le jour de la présentation de la veillée, on avait mixé nos interventions. Quand on a fait Inventaires la première fois, on n’avait encore fait aucune veillée. La création d’Inventaires, c’était avec Sophie Oswald. Inventaires a permis de faire les Sublimes et puis les Veillées. La version d’Inventaires qu’on a joué au Prato était très différente de ce qu’on jouait au début. Dans la version initiale, il y avait des témoignages vidéos des gens du quartier du 11/19 (dont Colette) et je disais un texte auto biographique entre les séquences vidéo. Je racontais les corons, ma mobylette orange biplace avec des clignotants, la mine, les conseils de classe auxquels assistait mon père qui me disait, je ne dis rien, j’acoute, ma prof de français qui me disait d’aller lire Pif, mes parents communistes... Au Prato c’était Didier qui proférait cette histoire là en costume de plumes pendant que sur deux grands écrans en fond de scène défilaient des images des spectacles et des stages qu’on avait faits depuis qu’on est à la Base 11/19. Dans cette nouvelle version, plus le spectacle avance, plus les images défilent vite et plus le volume sonore augmente. Avec beaucoup de musique. Tiens, on n’a pas de nouvelles de Calogero. Face à la mer… Hier j’ai revu mes textes des Atomics face à Maggie et Olivier du bureau d’HVDZ. Ce soir, il y a le conseil d’administration de la compagnie. A 17H.

les trois soeurs-carnets de route-

On a eu énormément de chance de faire « C’est pour toi que je fais ça! » avec le CNAC quand on s’est séparé d’Eric Lacascade. Et de se retrouver au 11/19. L’existence précède l’essence. Jamais on n’aurait eu conscience du travail qu’on devait mener en relation avec les habitants des quartiers si on ne s’était pas retrouvé à la Fabrique du 11/19. Faut pas l’oublier ça quand même. Mais on peut se dire tout de même qu’ayant travaillé à Liévin avec le Ballatum Théâtre pendant six ans, on aurait pu tout aussi bien s’en rendre compte plus tôt… Va comprendre… Faut savoir qu’au Ballatum il y avait des artistes qui ne voulaient jamais entendre parler d’ateliers de théâtre ou de donner un coup de main à une association locale de théâtre ou quoique ce soit… Quand on y repense maintenant,ça paraît hallucinant mais c’est la vérité. Il existait une élite à l’intérieur du Ballatum qui refusait de se frotter au peuple. Et j’ai participé à ça. Quelle honte! Je m’étonne parfois de me lever le matin déjà mal foutu avant que la journée ne commence. J’ai été trop servile. Trop lâche. Trop longtemps. Et je le paye. Nausée. Je comprends qu’on puisse ne pas croire à l’art. On ne voulait pas entendre parler des comédiens de la région. Ou très peu. Kader qui était un grand comédien était de Liévin. On a beaucoup travaillé par la suite ensemble à HVDZ. Quand il travaillait au Ballatum, c’était pour accompagner les artistes en tournée. On a dû batailler pour qu’il puisse faire un remplacement dans les Trois Soeurs. Rien qu’à y repenser, ça fait peur. Pourquoi j’ai pas réagi violemment plus tôt. Soumis comme je l’étais, je n’étais plus en mesure de me battre. Mais tout ça se paye cher. J’ai attendu trop longtemps. Je me disais tout le temps, calme toi, vu là d’où tu viens, c’est déjà bien comme ça. Faire du théâtre! Imagine! Si à la cité 3 de Ferfay, on t’avait dit ça... Et puis t’es pas en bonne santé. Du coup chaque jour qui passait, je m’enfonçais un peu plus. Jusqu’à l’extrême limite. Jusqu’à la folie.

alana-carnets de route-

On reprend les répétitions à la fin de la semaine prochaine. Mais on ira au bureau cette semaine. Au bureau de la compagnie sur le site du 11/19 à Loos en Gohelle. Olivier, Sandrine et Maggie vont mettre en place des interventions dans les écoles, les centres sociaux et à la maison du Louvre. Pour parler de ce qui se passe au 11/19. Comme une conférence gesticulée. Aller à la rencontre des habitants pour exposer ce qu’on fait, pourquoi on le fait. Et comment on pourrait envisager le monde différemment ensemble. Une autre façon de faire de la politique. Par le biais d’une mise en scène d’une conférence sur ce que la compagnie a à voir avec le bassin minier. Son histoire aussi. On est là depuis plus de douze ans. On a un mois très chargé. On reprend les répétitions la semaine prochaine. Ensuite on présente Les Atomics dix soirs de suite. Sur deux semaines. Et puis on va à Roubaix au Lycée Van der Mersch pour faire un Instantané, un portrait du lycée, film spectacle qui met en jeu toutes les personnes qui sont au lycée. On s’est dit que la conférence gesticulée que préparent Olivier, Maggie et Sandrine pourrait tourner toute l’année partout autour du 11/19 et dans le bassin minier. Mettre en jeu notre présence à l’endroit même où on est implanté. Comment donner corps à cette présence pour qu’elle reste en vie.Tout le temps. Avec les gens, les habitants. Si on ne sort plus de l’enceinte du 11/19, on est foutu. On va mettre en place aussi les groupes de parole. On va commencer avec l’ espace Pignon. A l’entrée de Liévin quand on vient de Loos en Gohelle en passant par le 11/19. Faudrait retourner voir ce qui se passe au centre d’art contemporain de Newcastle, voir comment les habitants ont investi l’endroit avec les artistes. Et on peut aussi s’inspirer de ce qui se fait au centre culturel Max Pol Fouchet de Méricourt. Ou au centre social de Mean Penhoët à St Nazaire. Ou le centre Alana à Sao Paulo. Au centre Alana, la dimension politique est plus présente, plus affichée, plus évidente qu’ailleurs.

alors…faisons-le! -carnets de route-

Premier de l’an. Le site du Louvre Lens est situé au coeur des cités neuf et neuf bis. Hier on a marché tout le long du chantier. Il est au bout de la rue qui vient de la gare après le grand pont de chemin de chemin de fer, face aux écoles Pierre et Marie Curie. On a marché tout le long du chantier et puis on a rejoint la rue Léon Blum et traversé la route de Béthune. Traversé la cité 14. Jusqu’à la grande résidence. Passé près du lycée Béhal. Revenu par l’université d’Artois. Puis la place du Quentin. Et on a pris vers l’hôtel de ville. Déposé une lettre à la poste. Et rejoint la gare. On n’a pas distribué un seul tract pour les Atomics. C’est les fêtes! C’est relâche! J’ai hâte de savoir ce que Lens va devenir dans les prochaines années. Qu’est ce que le Louvre va transformer. En traversant la cité 14, en voyant toutes les maisons des mines abandonnées, murées, grillagées, je me suis rendu compte que ça s’était appauvri au fil de ces dernières années. Dans ce territoire on sauvegarde et on investit dans certains endroits. Comme  le 11/19 par exemple. Et le Louvre. Ou le stade couvert à Liévin… Mais quand tu marches, le contraste entre ce que Le Louvre ou la rénovation du 11/19 représentent et la vie au quotidien dans les cités, ça coupe le souffle. Le 11/19 à Loos en Gohelle, le Louvre à Lens, le stade couvert à Liévin sont très localisés dans l’espace. A l’échelle du bassin minier, c’est tout petit. Bien sûr l’impact culturel n’est pas à comparer avec la surface occupée. Mais pour l’instant on a l’impression d’ îlots de constructions ambitieuses au centre d’habitations où les gens ont bien du mal à joindre les deux bouts. La question que je me pose,  pour l’instant jusqu’où ça profite aux gens tout ça? Par exemple pour parler du 11/19 que je connais bien par rapport au Louvre et au stade couvert, je trouve qu’on n’implique pas suffisamment les  habitants des quartiers dans le projet. Mais ce que je dis là vaut pour nous comme pour d’autres. Faut qu’on s’y mette. Qu’on s’implique. Et qu’on engage les autres à prendre parti. Faisons le…

le décor-carnets de route-

Frantz a travaillé hier et avant hier sur le décor de Atomics. Dans le froid de la salle HVDZ, à la fabrique. Les chauffages dans les deux petits studios ne marchent plus. Dès qu’on veut les augmenter, ils se mettent en mode sécurité et s’éteignent. Pour les répétitions on avait ramené des petits chauffages d’appoint. Si on avait répété dans la nef, le studio central de la fabrique, on aurait eu chaud puis que là, le chauffage marche bien. C’est très difficile de chauffer une friche industrielle. Les volumes sont vastes et ils ne sont pas isolés, ni du froid, ni du bruit. On dit souvent, c’est la Fabrique! C’est à dire que ça fait partie du jeu. Des règles du jeu. Tu ne viens pas répéter là comme ailleurs. Sinon, comment dire… tu ne viens pas. J’ai toujours pensé qu’on ne pouvait pas faire du théâtre là comme ailleurs. Ce lieu est tellement chargé d’histoire. Je veux dire en terme de spectacles , de travail, tu ne peux pas travailler là sur la durée et ne pas prendre en compte l’histoire de ce lieu, le monde du travail et l’environnement social, politique, écologique et climatique. Où alors c’est un comble , tu recrées une tour d’ivoire artistique dans une friche industrielle. Ce serait cynique. L’écrivaine Annie Ernaux  disait: je suis passé du milieu populaire aux mondes des Lettres, j’ai glissé dans cette moitié du monde pour laquelle l’autre n’est qu’un décor. Au 11/19, c’est pas possible, difficilement envisageable quand on y est comme nous installés depuis des années. Et tu sais quoi? C’est au 11/19 qu’on a retrouvé du sens à ce qu’on faisait. Faut pas l’oublier. C’est fondamental. C’est le 11/19 qui nous a permis de tenir, de vivre… Sans ça qui peut dire où je serais… Faut savoir que je viens de la cité 3 de Ferfay. Une ancienne cité, des corons complètement abandonnés au milieu des champs dans les collines de l’Artois. Passé de la cité 3 de Ferfay au monde de l’art, c’est cliniquement indépassable. Sauf à avoir la chance comme moi d’être retombé sur mes pattes en étant au 11/19. Frantz a réalisé un cadre pour qu’on puisse  poser dessus le grand écran du fond de scène. Il a installé des petits gradins pour qu’on puisse accueillir environ trente à quarante spectateurs tous les soirs de représentation. Il dit, ça fera une belle petite salle de spectacle pour la suite…Le journal du 11/19 sort début janvier. On fera le tour du quartier pour le donner aux gens.

calogero-carnets de route-

On a eu une proposition de Calogero pour mettre en scène son prochain spectacle avec des artistes de cirque. Ne connaissant pas ce chanteur on est allé voir sur You Tube. Calogero chante avec Passi ou Grand Corps Malade… C’est des musiques qu’on fredonne parfois sans savoir de qui elles sont. Face à la mer.. Des musiques qu’on a dans la tête certains jours et on se demande où on a bien pu entendre ça. A la radio. Même si on n’écoute pas beaucoup la radio. Avant on écoutait beaucoup France Inter. Maintenant on zappe. Enfin ça dépend des moments. Et puis on achetait beaucoup de journaux aussi. Libération. On achetait Libération tous les jours. C’était impossible une journée sans Libé. On n’imaginait pas une journée sans Libération; ça doit correspondre à une époque et à un autre journal… Aujourd’hui on est tourné davantage vers Politis. Le journal du Parti de Gauche et Tout est à nous, l’hebdo du NPA. Quand Libération a été créé, l’idée était que le journal soit rédigé par ses lecteurs. Un peu comme on fait nos Veillées. Comme le répondeur dans l’émission de Daniel Mermet, Là bas si j’y suis. Et il y avait une rubrique quotidienne qui s’intitulait comment réaliser un sabotage. Le courrier des lecteurs de Libération, c’est mythique. On avait écrit un jour à Libération à l’époque, au sujet de violentes manifestations à Lille contre Jean Marie Le Pen et le Front National. Des policiers avaient été blessés. Un ami avait été arrêté et incarcéré à la prison de Loos. Il avait été libéré au bout d’ une quinzaine de jours. Grâce à la mobilisation. Et faute de preuve. Dans France Soir on avait été soupçonné de collusion avec Action Directe. Ce qui était de la pure folie. On n’écoute plus la radio. On ne lit plus beaucoup de journaux. Si ! L’Avenir de l’Artois… Je pense qu’il y a des gens bien plus qualifiés qui peuvent mettre en scène Calogero. Hier j’ai roulé dans le bassin minier en voiture. Par étapes. En m’arrêtant n’importe où. Pour apprendre mon texte. Et j’ai marché dans  Bruay. Apprendre mon texte pour les Atomics.

oui-carnets de route-

Au début on voulait appeler les Atomics, Labo Autres Parts du nom de l’association Artfactories/Autreparts qui regroupent des équipes qui pour la plupart sont installées sur d’anciennes friches industrielles et travaillent sur la relation, art, population et société. Les Veillées, ça fait sept ans que ça dure, à savoir si c’est du théâtre ou pas? Les Veillées, c’est quinze jours à trois semaines de résidence dans un quartier dans une ville pour aller à la rencontre des gens et faire des spectacles ensemble. Collecter des témoignages. Multiplier les actions artistiques avec les habitants et les comédiens, acrobates, danseurs, plasticiens de la troupe. Tout ça a commencé à l’initiative de Culture Commune. A Loos en Gohelle. Maintenant, il va y avoir le Louvre à Lens. C’est quelque chose tout de même. Au milieu des cités ouvrières. Quand j’étais jeune dans les corons, dans les cités, on n’allait jamais au musée. On pensait qu’on n’y comprendrait jamais rien et que de toute façon, ça n’était pas fait pour nous intéresser. Parfois ma mère me disait, attention l’école ça pourrait te mettre des idées dans la tête qui ne sont pas pour toi. Dans les quartiers populaires les gens ne vont jamais au théâtre. Avec les Veillées on s’est dit qu’il fallait inventer des formes nouvelles où les gens se sentent concerné par ce qui s’y dit et ce qui s’y fait. L’autre jour, pour le téléthon je suis allé à la salle des fêtes de Fresnicourt. Il y avait un Loto. J’ai pris trois cartons. J’ai croisé une jeune fille qui m’a dit alors vous êtes acteur? J’ai dit, oui. Elle m’a dit vous jouez dans des films? J’ai dit, non, je fais de Veillées. Après c’était trop long à expliquer et il y avait beaucoup de bruit dans la salle des fêtes. Alors j’ai dit que je faisais des spectacles sur les mines de charbon et les mineurs de fond.

franck lepage-carnets de route-

L’art contemporain c’est l’humour des riches. C’est Franck Lepage qui disait ça. Pendant le stage qu’on a fait avant qu’on démarre les répétitions des Atomics Phase 1. Et quand il parlait de Boltanski, c’était forcément de Luc Boltanski. Pas de son frère, Christian Boltanski. Luc Boltanski est sociologue. Christian Boltanski est artiste plasticien. Frank Lepage semblait détester Christian Boltanski. Il le traite comme un usurpateur. Comme une fabrication du marché de l’art. Un énorme mensonge. Une duperie. J’ai cherché pendant des années et essayé de comprendre quelque chose à l’art contemporain dont on est totalement coupé quand on est du monde ouvrier. A moins d’avoir fait des études d’histoire de l’art. J’avais cru progresser ces dernières années. Etre en mesure de m’y repérer tant bien que mal. Lire et m’abonner aux revues spécialisées. Et Franck Lepage fout tout par terre. On était allé voir l’exposition de Boltanski à Paris, l’année dernière au Grand Palais. On était admiratif. Subjugué. Et Frank Lepage nous dit que ce n’est qu’une histoire d’argent. De spéculation. Et qu’on est bien bête de se laisser prendre au jeu des riches. Si on va visiter l’expo d’art contemporain, la route de la soie qui a lieu à Lille en ce moment, au Tri Postal, on ira en rasant les murs. On va avoir honte maintenant. Et puis après on n’ira plus. Avant on se disait qu’on n’ y connaissait rien à l’art contemporain et que ce n’était que pure ignorance. Qu’on n’avait pas fait d’études et tout le bazar. Mais en fait, c’est fait pour nous en foutre plein la vue et nous rabaisser davantage. L’art serait forcément au service d’un système. Le capitalisme en l’occurrence. Pour servir des intérêts privés. Et dans l’enjeu des luttes de classes l’art contemporain permettrait aux riches de se distinguer, de cultiver leur complexe de supériorité. Et de se faire de l’argent. En permettant ici ou là aux pauvres d’assister à des expos où tu te dis, non seulement ils sont riches mais en plus ils comprennent des choses que toi tu comprendras jamais. Parce que tu ne sais pas ce qui est beau…

Quand je pense que quand j’ai quitté les corons je ne savais même pas que l’histoire de l’art ça existait. Et les gens qui faisaient des études d’histoire de l’art, pour moi c’était un étonnement absolu.

Didier a fait une super impro d’art contemporain pendant les Atomics où il est sur une table, allongé sur des pommes et il dit ce que sa mère en penserait si elle le voyait… A bien y regarder aujourd’hui on se dit que c’est elle qui a raison. Et maintenant? On fait quoi?

poétique du réel-carnets de route-

Le journal du 11/19 devrait sortir aujourd’hui. On a hâte. On pense que ça devrait intéresser les habitants du quartier. C’est la reproduction du journal de bord de plusieurs actions artistiques et culturelles menées autour de la Fabrique ces deux ou trois dernières années. Une façon de trouver une continuité entre nos présences dans la ville. On ira le distribuer en porte à porte.  On raconte dans le journal comment on a fait un film qui s’appelle Trans-mission dans le cadre d’une formation avec Les Chantiers Nomades. On voulait faire un film de la Veillée. On a travaillé avec toute la troupe des Veilleurs et un réalisateur, un scénariste et  une quinzaine d’acteurs. L’idée de base (11/19) était de faire une Veillée avec quinze acteurs en formation qui pendant un mois ont sillonné les quartiers à la rencontre des habitants. Et en même temps faire le film de cette recherche. L’histoire du film s’est un peu déplacée. L’argument a été modifié. Parce qu’il a fallu écrire le scénario en très peu de temps et réaliser le film en un mois. Et faire la formation et la Veillée simultanément. L’histoire du film commençait le soir de la fête de la Ste Barbe, fête des mineurs et des pompiers. Tout commençait au pied du terril à Loos en Gohelle. Au cours de la retraite au flambeaux. Le cinéma, c’est la fiction. Un supporter de football de Dijon, venu voir un match de football à Lens et qui ne trouve pas le stade Bollaert, se retrouve  au pied des terrils. Un soir de Ste Barbe. Et c’est le début d’une histoire d’amour. Sur les terrils et dans les cités autour du 11/19. Dans le journal du 11/19, on a repris le journal de bord du tournage et de la veillée-formation. Le film avait été diffusé à la Fabrique. On avait présenté la Veillée après le film. Ce chantier s’intitulait, poétique du réel. C’est Frédéric Plazy qui dirigeait les Chantiers Nomades. Installés à Grenoble. Maintenant il dirige l’école de théâtre danse et musique de Lausanne.