Le centre social du quartier Frais-Marais, le sens de l’accueil.

Au centre social du quartier Frais-Marais, Benoît, Élodie, Mélodie et toutes les autres personnes présentes ce matin nous ont accueillis avec des sourires et du café.  Le centre social du Frais-Marais, à l’étage, c’est aussi le QG HVDZ, le temps du « Portrait du Douaisis ». Merci à toute l’équipe du Frais-Marais !
Un peu plus tard dans l’après-midi, Mourad offre une danse aux enfants venus pour l’atelier peinture : des assiettes en cartons coupées en deux pour faire des lapins. (« Moi aussi j’ai fait un lapin, mais le mien il est d’une autre couleur. ») Peinture sur carton, oui, et aussi sur pâte à sel.

Histoire et transmission

Alexis, qui était venu au QG pour qu’on puisse faire une interview, est dans le film-spectacle (on était en répétition aujourd’hui) qui sera présenté demain. Il nous avait montré plein de photos et de documents autour de l’histoire de Croisilles. Il archive, classe, enquête, rencontre des anciens, essaie de reconstituer avec le plus de précisions l’histoire de son village et de sa région.
Alexis est étonnant, il a 19 ans et il est déjà dans la transmission. Lorsqu’un collégien, un lycéen, un étudiant appelle la mairie de Croisilles pour avoir des précisions sur l’histoire des deux guerres mondiales notamment, eh bien le maire donne le contact d’Alexis, c’est lui la référence. Et on mesure à quel point Alexis aime ce rôle qui lui a été attribué. Être dans la transmission, ça fait partie de sa passion pour l’histoire.

ligne de faille

Aujourd’hui on est allés à la MAS et même si on y déjeune tous les jours, on en est sortis pas tout à fait comme on y était entrés.
Sandrine m’accompagne à travers les différentes unités et me présente chaque résident. On pousse les tables et les chaises , on coupe le son de la télé et je danse. Quand on sillonne la MAS, la chorégraphie est aussi dans les couloirs. Un petit groupe me suit. C’est tout un art de négocier les tournants, les croisements, les ouvertures et fermetures de porte. A chaque déplacement dans un nouveau pôle, Ronan, Florian, Catherine, Laura me guident, je n’ai qu’à les suivre, dans ces méandres labyrinthiques de la MAS.
On est face à face, tout près, je peux voir les yeux, les corps, les fauteuils. J’entends des mots, des rires, des sons. Je suis touchée d’être accueillie si gentiment. Pascal me prend dans ses bras et je suis bouleversée.
Et ce n’est pas seulement parce que Pascal me prend dans ses bras que je suis bouleversée. Je suis bouleversée parce que je pense aux parents, à la difficulté que ce doit être de confier son enfant à une institution aussi adaptée soit elle, parce qu’on ne peut pas, parce que cʼ’est trop difficile. Je suis bouleversée parce que je pense à l’ʼinvisibilité du handicap, aux peu dʼ’endroits vraiment aménagés pour. Je suis bouleversée parce je me dis qu’il faudrait un accompagnant par résident et qu’évidemment ce n’est pas réalisable. Je suis bouleversée parce que je reçois de lʼ’émotion sans filtre, du ressenti brut et même si je m’y étais préparée, j’ai envie de pleurer. Je suis bouleversée parce que je me dis que si Laura, Cathy ou Salvadore avaient rédigé ces lignes, ils nʼ’écriraient pas du tout les choses comme ça. Je suis bouleversée parce que je ne vis pas l’état de dépendance et je ne sais pas les montagnes de courage qu’il faut  pour lʼ’accepter. Je suis bouleversée car je pense à la réaction d’Audrey Hénocque, adjointe au maire de Lyon, et en situation de handicap qui, suite aux propos choquants de Mme Blanc, rappelle que des propos injurieux “relève de l’oppression envers les personnes handicapées” et sont qualifiées de « validisme”, elle poursuit son allocution en disant “la société est composée dʼ’hommes et de femmes avec leurs atouts ou leurs différences et difficultés ». Elle rappelle la définition de l’ONU : « le handicap est la conjonction de trois facteurs, une déficience mêlée à une non accessibilité de la société, mêlée à des difficultés d’accessibilité”. Analysant a postériori sa réaction, elle précise : “comment parler au nom de millions de personnes discriminées en quelques mots pour expliquer qu’au delà des propos inacceptables de Mme Blanc à l’encontre des personnes handicapées cʼ est tout un système de domination habillé dʼ’intentions charitables (donc difficilement critiquables) qu’il faut dénoncer”.
Quand je sors de la Mas j’ai chaud, j’ai dansé pendant presque deux heures, je n’ai pas vu le temps passer, et je ne suis plus tout à fait la même qu’après y être entrée.
Je suis bouleversée parce que certains résidents de la MAS viennent dimanche et je n’ai pas envie qu’ils soient déçus.

On est toujours quelqu’un d’autre

On  s’est filé rencart demain matin à 10h parce qu’il faut libérer la salle des fêtes à 15h. Une séance de cinéma a lieu, organisée par la jeunesse de Croisilles qui diffuse Patient de Grand Corps Malade suivi d’un débat. Donc on ne récupèrera la salle pour la diffusion du Portrait que dimanche matin à 10h pour préparer les deux représentations qui ont lieu à 15h et 18h00. Le film spectacle durera 1h30.  Ni trop long, ni trop court. On ne peut pas tout dire. On ne dira jamais tout. On a saisi l’air de Croisilles. On n’en rendra pas tout. Il faut plus de temps pour en être totalement imprégné. Ce qu’on en sait, est riche, très riche de plein d’enseignements. Il faut que notre travail rende compte de tout cela. On n’en sort pas comme on y est arrivé. On a appris. On s’est élevé. On a grandi. On sait qu’on n’existe que par la grâce de l’autre, comme disait Simone Veil. On n’a toujours pas fini au Cube. Isabelle et Zelda finissent de préparer les textes qu’on lira sur scène. Bénédicte et Dorothée terminent la journée après avoir durement travaillé par une partie de baby-foot. Dann es ist Feierabend.

Objets #4

On nous a montré :

• Le paravent : Moi j’en rêvais d’un paravent à photo, alors quand je l’ai trouvé, je l’ai acheté. Il était un peu abimé mais mon mari l’a réparé, et mon fils a rapetissé les photos pour que ça rentre. Là c’est mes grands-parents paternels, et les autres en buste c’est mes grands-parents maternels, ils se sont mariés en 1903. Mes grands-pères ont été appelés à la guerre, ils avaient déjà une famille, ils avaient déjà quatre enfants quand ils ont été rappelés au front.