A peine arrivée, on est allé dans le quartier

On est allé distribuer des invitations sur le quartier en face du 11/19 sur la cité des Fleurs. Sophie à peine arrivée s’est retrouvée au coeur de la cité.

« Quand t’as pas pris le temps d’entrer dans un univers… elle dit, je ne me sens pas légitime pour aller vers les gens et leur dire je vais faire un film sur vous… Je ne me suis pas suffisamment donnée le temps de m’imprégner des lieux » « Je ne suis jamais venue dans le nord » « Aller les voir et dire ça d’emblée aux gens, c’est compliqué. Je n’ai pas encore pris la mesure des chose. Hier je tournais dans un film à Lyon juste avant la libération. C’est ces écarts là… » « En arrivant ici il faisait beau, il y avait une belle lumière, j’ai été agréablement surprise »  » Sur l’autoroute tout est identique. Des non lieux. Quand on sort, on est tout de suite dans un univers très marqué. Juste après le tournant. »

On a fait du porte à porte, du toute boîte. C’était la sortie de l’école. On a croisé des parents qui venaient chercher les enfants. On a parlé de la Veillée du 18 déc à 19h et du film à 20h30 à la Fabrique, à Culture Commune.Sophie s’est demandée si la poétique du réel… enfin si on utilisait souvent cette expression et puis HVDZ, elle dit ça fait high tech…

Patrick

Patrick est un authentique chti. Le pays des chtis c’est pas à Berguollywood. Bergues c’est les Flandres, les chti c’est à Lens. Patrick porte toujours sur lui un tee-shirt rouge et or à l’effigie du RCL. Aujourd’hui non. Une exception. Le club a été créé par la générale minière. Sur le drapeau il y a une lampe de mineurs et au stade, l’hymne c’est toujours Les corons. On part faire le tour des terrils. Il y en avait 4, il en reste 2. Avec la terre rouge on a fabriqué des briques et des routes. Les terrils qui sont restés ont été classé. On dit « terri », sans l et non « terril » comme disent les parisiens. La banderole du PSG, ça n’est pas passé. Patrick est géographe, fils de mineur, botaniste et supporteur de foot. Il connaît les plantes du coin, le nombre de morts dans les mines (25 000 en 150 ans sans compter les maladies professionnelles), le nom des oiseaux (mésanges grives) le nom des fleurs et des arbres (pavots saules orchidées). Il nous montre des crottes de lapins de garenne, des oiseaux qui passent. La faune et la flore ont trouvé refuge sur les terrils. On se croirait en Equateur. Il y pousse même des orchidées. La terre est chaude par endroit. On pose la main dessus. Coté ubac, le sol fume et dégage une odeur de souffre. Quelques SDF y ont trouvé refuge. Certains en sont morts. Avant les mines il y avait des cultures, une région riche, un passé glorieux avec ses châteaux et ses nobles. Tout a été rasé à la première guerre. Les chiffres. 2 fois et demi le tour de la terre (la longueur des galeries creusées dans le nord pas de calais). 5 ans (l’âge minimum d’embauche des enfants jusqu’à une certaine époque). 20 ans (la durée de vie d’un mineur atteint d’une silicose). Ce qui a réduit l’espérance de vie des mineurs c’est l’arrivée du marteau-piqueur. Au bord du chemin un bloc de charbon. Le baptême était obligatoire pour entrer à la mine. Le concubinage n’était pas toléré et la présence à la messe dominicale obligatoire. Bienvenue en terre protestante. La générale minière était généreuse. Nombreux avantages en nature : toit, couvert et hôpital gratuits, divertissements et charbon offerts. D’en haut on voit les maisons bien rangées en ligne, avec des bouts de jardins, c’est vert, aéré.

de retour

Encore une veillée sur le 11/19. On avait fait celle d’octobre, et on est revenu pour la veillée permanente en novembre. Et on revient encore pour encore une veillée particulière. Il y a treize artistes, des comédiens, qui sont venus de partout pour partager cette veillée là avec nous, qui avaient envie de faire cette expérience là. Et puis il y a Daniel, qui fait du cinéma, et Philippe, qui est scénariste, avec qui on va chercher une façon de retranscrire en fiction le réel des veillées. C’est une veillée pleine d’expériences nouvelles pour tout le monde. Poétique du réel.
On est tous impatient d’aller dans le quartier, rencontrer le gens, faire des interview et des portraits.
Aujourd’hui, pour se rencontrer, on est allé se promener autour de la base, et puis sur les terrils, avec Patrick, de la chaîne des terrils. Patrick connaît le bassin minier sous toutes ses coutures.
On s’est arrêté si souvent, sur chaque petite chose, si bien racontées par Patrick, qu’on est revenus à la base bien fatigués et détrempés.