« Le goût de la vérité n’empêche pas la prise de parti »

La plume d’un enfant du siècle

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Parcoursup ou la sélection qui ne veut pas dire son nom

Cet été, un certain nombre de bacheliers se sont retrouvés sans affectation à l’issue de la procédure d’admission dans l’enseignement supérieur. Loin de réfléchir de manière systémique et globale, les dirigeants de notre pays se sont contentés d’incriminer en chœur Admission Post Bac (ou APB) – la plateforme numérique où les lycéens font leurs vœux – ainsi que l’algorithme qui lui est lié. Dans l’urgence, Frédérique Vidal et l’ensemble du gouvernement ont préparé une réforme qui, sous couvert de corriger les erreurs d’APB, s’attaque frontalement selon moi à la conception de l’Université de notre pays. En introduisant la sélection, sans le dire bien évidemment, Emmanuel Macron, son gouvernement et sa majorité rompent avec une vision de l’Université et s’attaquent précisément à son caractère universel.

Comble du cynisme de ce gouvernement et de cette majorité, c’est au nom de la justice et du mérite que ceux-ci disent porter cette réforme. Il y a assurément, nous y reviendrons, quelque chose de profondément orwellien dans la manière de gouverner d’Emmanuel Macron. De la même manière que Big Brother annonçait que la guerre était la paix, les laudateurs d’En Marche nous expliquent que les prérequis ce n’est pas la sélection. Pareils aux cochons dans La Ferme des animaux, les voilà qui affirment, parfois même sans s’en rendre compte, que tous sont égaux mais que certains, les leurs, le sont quand même plus que d’autres. Voilà le projet funeste de Macron pour l’Université, il est tout aussi simple dans sa logique que dévastateur dans ses implications puisqu’il ne s’agit ni plus ni moins que de calquer le modèle des universités sur celui des Grandes Ecoles.

 

Casser le thermomètre

 

Les crimes, en général, sont le fruit d’un mobile. Dans le cas du dépeçage de l’Université qui s’annonce, les puissants de ce pays ont rapidement trouvé un prétexte pour justifier la mise à sac de l’enseignement supérieur public dans notre pays. Je l’ai dit plus haut, c’est à la suite du couac des affectations que le gouvernement s’est mis en action. Il importe toujours, en effet, de raconter de belles histoires lorsque l’on essaye de faire passer une réforme profondément inégalitaire pour de la lutte contre les inégalités. Ces Tartuffe ont trouvé en la figure de certains lycéens aux notes très correctes mais n’étant pas affecté dans l’université qu’ils souhaitaient en raison du tirage au sort un prétexte parfait. Nous agissons pour la justice, disaient-ils, dans leur volonté de faire passer les contempteurs de leurs réformes pour les tenants de l’injustice et des inégalités. La pire des sélections c’est celle du tirage au sort rajoutaient d’autres pour mieux enfoncer le clou, ignorant ou feignant d’ignorer qu’il n’y avait jamais qu’un seul chemin possible.

APB fut donc désigné comme seul et unique coupable et tant pis s’il n’était qu’un outil. L’absence de moyens alloués à l’Université ? Un détail. Le manque de places qui, de facto, crée cette sélection par le tirage au sort ? Une broutille. Le déterminisme social prégnant et persistant dans notre pays ? Trois fois rien. Non, ce qu’il fallait c’était inventer un nouvel outil et un nouvel algorithme pour trier les futurs étudiants. On nous disait que la logique ne changerait pas et qu’il fallait simplement produire un outil plus efficace, le mantra macronien par excellence – celui qui devrait être placé au-dessus du droit selon Gérard Collomb. Dans leur malhonnêteté crasse et leur cynisme absolu, les puissants dissimulaient évidemment qu’un outil n’est jamais axiologiquement neutre, qu’il est à la fois porteur et au service d’une idéologie en lui-même.

 

Prérequis ou le novlangue triomphant

 

Et quelle est donc l’idéologie portée par Parcoursup – le fameux nouvel outil censé tout résoudre – sinon celle d’une sélection à tout crin ? Bien évidemment le terme de sélection n’a jamais été utilisé dans la communication gouvernementale, faisant même office de boite de Pandore aux yeux de l’exécutif. Plutôt que le mot sélection c’est donc à celui de prérequis auquel nous avons eu droit depuis la présentation du projet de loi dans un exercice de novlangue absolue. « Le but du novlangue, écrit Orwell dans l’appendice de 1984, était, non seulement de fournir un mode d’expression aux idées générales et aux habitudes mentales des dévots de l’angsoc, mais de rendre impossible tout autre mode de pensée ». La volonté forcenée de la majorité présidentielle de ne pas vouloir utiliser le terme de sélection, sa hantise même, est presque plus révélatrice que la politique menée en elle-même.

En jouant avec les mots, en louvoyant entre les termes, Emmanuel Macron et son gouvernement reconnaissent de fait l’utilisation d’un nouveau langage visant à rendre impossible toute pensée critique à l’égard des réformes menées. En ce sens, le successeur de François Hollande est dans la droite lignée de sa campagne présidentielle et continue à présenter ses réformes – celle sur l’Université n’échappant pas à la règle – comme les seules possibles pour améliorer les choses. Il demande, en somme, aux universités de faire de la sélection comme Monsieur Jourdain faisait de la prose dans Le Bourgeois gentilhomme, sans le savoir. Il ne s’agit plus de tri mais de justice, plus d’arbitraire mais de rationalité, plus de déterminisme social mais de mérite. En somme la paix, c’est la guerre et la sélection, c’est la démocratisation de l’Université.

 

La fin de l’Université universelle

 

Parce que derrière la question de la sélection, c’est plus profondément celle de la remise en cause du modèle de l’Université universelle qui est prégnante. Avant Parcoursup, en théorie tout lycéen disposant d’un bac pouvait s’inscrire dans l’université de son choix. Quand bien même dans les faits cela ne se passait pas comme cela – en raison de bien de causes dont nous parlerons plus tard – le principe était fondamental. L’Université est en effet le lieu où l’on acquiert le savoir critique, permettant de remettre en cause les structures qui régissent la société. Transformer l’Université universelle en machine à sélectionner (et donc à exclure) est un changement total de paradigme.

Qui seront, en effet, les premières victimes de ce nouveau paradigme sinon les bacheliers des classes les plus dominées de la société ? La nouvelle procédure de candidature, absconse à souhait, est aussi là pour fermer les portes de certaines filières aux enfants les plus modestes de notre pays. Le foisonnement d’entreprises prétendant pouvoir aider les lycéens dans leur orientation (et facturant la rédaction d’un CV et une bien maigre assistance à des tarifs pharamineux) est un formidable symbole : il s’agit progressivement de faire de l’éducation un marché comme un autre. Faisant partie des derniers domaines que la sphère marchande n’a pas encore absorbés, l’enseignement supérieur est livré aux griffes de la prédation la plus totale avec cette réforme avec pour but non avoué de faire perdurer les inégalités et le déterminisme social. Tout changer pour ne rien changer en somme.

 

De l’absence de courage

 

Le corollaire de cette politique est assurément le manque de courage de ceux qui la mènent. Là encore, le novlangue orwellien est de sorti puisque c’est précisément au nom du courage que les puissants disent agir, le courage de s’attaquer aux problèmes comme ils disent. La double pensée est totale. Il est grand temps de les débusquer et de ne pas s’arrêter à la simple contestation. Assez des luttes défensives, il convient désormais de créer un nouvel imaginaire et de répondre sur le même terrain qu’eux, c’est-à-dire à l’échelle systémique. L’Université française va mal, il ne s’agit pas de le nier. Des amphis surchargés aux profs vacataires précarisés en passant par son délaissement au profit des Grandes Ecoles, l’Université est clairement le parent pauvre de la politique éducative de notre pays.

Alors oui, il est urgent d’agir pour redresser la barre et il est plus que temps d’avoir un vrai débat de fond sur l’orientation que nous voulons donner à l’Université. Qu’Emmanuel Macron et sa caste assument leurs projets inégalitaires et emplis d’injustice sociale et acceptent la confrontation d’idées. Dans le cas contraire il nous faudra leur imposer. Il est temps de repartir de l’avant, de défendre et de promouvoir une autre Université, populaire et fraternelle, visant à l’émancipation collective et à l’acquisition du savoir-critique plus nécessaire aujourd’hui que jamais. Des cheminots stigmatisés aux étudiants que l’on veut trier comme du bétail en passant par les classes populaires précarisées chaque jour un peu plus il y a communauté de destin. La convergence des luttes ne doit plus être un vœu pieux mais une réalité concrète. Cessons de courir après chacune des outrances du pouvoir pour organiser la riposte et créer une alternative. Peut-être une telle ambition est-elle utopique mais il n’y a que les combats que l’on ne mène pas que l’on est sûr de perdre.

Anamnesis à la recherche du temps perdu et Passer muscade

Le dernier spectacle qu’on a fait avec le théâtre du Prato, s’appelait les Muscades de la Guerliche. C’était tiré des contes d’un buveurs de bière. On a monté la pièce tandis que la troisième chaîne faisait un documentaire sur cette aventure et nous filmait tout le temps des répétitions et des représentations. On jouait dans une cour de ferme et on dormait dans une école désaffectée. Nous dormions par terre et on se lavait dans des petits lavabos. On passait des longues heures au bar du village. On écoutait Louis Chedid, ainsi soit il. On est resté plusieurs semaines sur place, dans le Douaisis, à Féchin. Le jour du spectacle, il a plu à torrent. Nos maquillages dégoulinaient et il faisait un froid de canard. Jean Pierre avait voulu reprendre d’autorité le rôle de la Guerliche au dernier moment pour le tournage  des représentations mais le réalisateur de la télé s’y était opposé. Pas étonnant que la Guerliche ait quitté le Prato.

Lampiste, em’ tiote lampiste, em’ lampe al va bien mais mi chu triste.

Y a du solel mais y fait frod. On est rintré d’Paris, on est matt (qui vient de l’allemand matt qui veut dire épuisé). On est à la recherche de salle pour répéter et jouer No Border. On va devoir monter le décor dans le futur estaminet du 11/19 parce qu’il n’y a plus une salle de libre à Culture Commune. Dans le nef (la grande salle de C.C) a été installé un nouveau et somptueux grill. Ça change tout. Tout est possible à Culture Commune maintenant, on peut y installer tous les décors du monde et en particulier les agrès de cirque, comme les trapèzes. Les espaces de C.C sont très demandés et le foisonnement des compagnies émergentes trouve ici la possibilité d’expérimenter des nouvelles formes de spectacles vivants. On découvre chaque semaine des nouvelles têtes, des jeunes artistes qui se relaient dan les salles de répétition pour des résidences de plusieurs semaines. C.C est un lieu privilégié de la création contemporaine, et de l’art partagé.

EST CE QU UN NOUVEAU MAI 68 SERAIT EN PRÉPARATION ?

Bon… là, hier, on était à Paris avec Marie pour participer à une réunion du Syndeac. De 17h à 21h sur les projets artistiques qui se fabriquent avec les gens qu’on rencontre ici et là sur des territoires particuliers. Ça fourmille d’idées et de réalisations artistiques (On est très surpris que le Syndeac s’intéresse aujourd’hui à ces pratiques puisqu’il n’y a pas si longtemps de ça encore, tout cela n’était pas pris en compte en tant que démarche artistique. Surtout par le Syndeac). Marie Josée Malys (présidente du Syndeac) dit fort bien l’urgence, dans le contexte politique, économique ambiant, pour chacun.e de se questionner, d’agir, de tendre la main, de briser les murs pour agir ensemble, tous publics confondus. L’oeuvre d’art appartient à toutes et tous et doit être fabriquée par tout le monde. On pourrait imaginer que l’association Artfactories/Autreparts (qui est à l’initiative des premiers regroupements d’artistes travaillant dans les lieux dits intermédiaires sur des formes artistiques incluant les populations. cf leur site internet) et toutes celles et ceux qui participent de ces pratiques et qui se sentent concerné.e.s par cette volonté de transformation sociale et politique (dont le Syndeac), se retrouvent et se regroupent pour mettre en place une coordination internationale des lieux de résistance.

Un collectif de détenus incarcérés à la maison d’arrêt des hommes de Fleury Mérogis.

Nous, prisonniers, condamnés ou prévenus, enfermés à la maison d’arrêt de Fleury Mérogis, lançons un appel contre la conquête sécuritaire qui se joue en ce moment à  travers les mobilisations des surveillants de prison dans toute la France. Cet appel vise également à construire une force collective entre les détenus en lutte et à l’extérieur. Depuis plusieurs jours, des surveillants de prisons bloquent les entrées des maisons darrêt, centrales et centres de détention du territoire français. Ici, à Fleury Mérogis, l’établissement est régulièrement paralysé depuis le début de semaine par plusieurs dizaines de surveillants, empêchant les parloirs avec nos familles, parfois venus de loin, empêchant les extractions dans le cadre des procédures judiciaires (bloquant les anagements depeine), l’entrée des avocats, les cantines, les cuisines, le nettoyage et toutes les activités dédiées à la prétendue « réinsertion » Leurs revendications sont simples, ils réclament plus de moyens et plus de sécurité pour le personnel pénitencier, ce qui se traduit concrètement par un armement généralisé des surveillants, l’imposition de menottes aux détenus lors de leurs déplacements hors des cellules,et des restrictions conséquentes de nos libertés et de nos droits, pour le peu qu’il en reste. Leur mouvement fait suite à diverses manifestations supposées deviolence depuis quelques temps, qui,si elles existent,ne sont que des actes isolés, bien souvent en réponse à une violence bien plus importante de l’institution carcérale et de l’État en général. Depuis une semaine, nous assistons à une surmédiatisation d’événements sporadiques et minimes sur toutes les chaînes de télévision, sur fonds d’antiterrorisme. Une insulte devient une agression, une bousculade un passage à tabac et un retard en cellule une mutinerie. Et nous voyons ainsi défiler ces mensonges sur BFM depuis le week-end dernier. Les surveillants et leur syndicat, interviewés par les médias, ont psenté la prison comme un« sanctuaire de criminels » où les détenus avaient « pris le pouvoir » dans des zones totalement abandonnées parles pouvoirs publics. Mais cette stratégie de désinformation ne s’arrête pas là et se couple à des actions bien réellesà l’encontre des détenus.
 
Ce jeudi 18 janvier au matin, alors que tous les parloirs avaient été annulés, que les activités n’avaient pas lieu et que nous étions séquestrés en cellule, sans information et sans même avoir été nourris, l’administration a finalement décidé,en réponse aux mobilisations de leur personnel, de lancer une nouvelle entreprise de terreur comme on n’envoit qu’en prison à l’encontre des détenus, et alors que rien ne s’était encore passé.  Vers11h, plusieurs dizaines de surveillants et d’Eris, armés, cagoulés et près à intervenir  étaient déployés dans toute la prison. Alors que les départs en promenade se faisaient sous pression, ponctués de coups dematraque et de bouclier, de fouille à nu arbitraires et d’insultes diverses, nous avons décidé de nous organiser contre ces violences gratuites, exercées pour satisfaire des surveillants en mal de reconnaissance. Sur le bâtiment D2, nous étions plus d’une centaine à refuser de réintégrer nos cellules à  l’appel de fin de promenade, qui avait été réduite à 45 minutes au lieu des deux heures quotidiennes. Sur  le bâtiment D1, c’est cette fois l’administration qui nous enfermait plus de 4h en promenade, pour prévenir un risque de blocage et en profiter pour fouiller une bonne partie des cellules. Dans les autres bâtiments, nous tentions plusieurs blocages, la plupart mis en échec par l’intervention violente des Eris.  À travers ces blocages, nous voulons exprimer notre droit à manifester, qui nous a été arraché lors de notre incarcération et nous voulons lancer un message vers l’extérieur, contre ce qui se joue en ce moment devant les prisons françaises : l’invisibilisation des violences quotidiennes à l’encontre des détenus–insultes régulières, coups, pressions administratives, les suicides réguliers, les piqûres forcées, les cellules qui s’enflamment comme à Fresnes il y a quelques jours, et même les viols, comme à la MAF ou à Meaux il y a quelques mois. Mais également,la stratégie des surveillants qui rappelle celle des policiers qui manifestaient illégalement, masqués et armés, en direction des lieux de pouvoir à l’automne 2016 au cri de « la racaille en prison ! », pour réclamer et finalement obtenir un nouveau permis de tuer.
 
 À travers ces actes de résistance collective, nous nous mobilisons contre cette répression grandissante et contre l’entreprise sécuritaire de l’État pénal. Mais pour ce faire, nous avons besoin de construire une force collective, et que nos luttes soient entendues et relayées à l’extérieur. La violence, la vraie, elle est du côté de la prison,de la justice et de la police, qui frappent, séquestrent et légitiment ces exactions. La violence, c’est l’État.
 
Nous ne sommes pas des bêtes, nous sommes des êtres humains, et nous refusons d’être enfermés et renvoyés à des faits qui feraient de nous des parias, sans droits et sans dignité. Nous en appelons aujourd’hui à toutes celles et tous ceux qui, à l’extérieur, luttent contre les violences d’État. Nos mobilisations sont vaines si nous ne sommes pas soutenus et si les acteurs des luttes actuelles ne se font pas écho de nos combats. En effet,nous payons le prix fort de ces blocages, la vengeance de l’administration est terrible, plusieurs personnes ont d’ores et déjà été envoyées au mitard, le quartier  disciplinaire, et nous savons tous que nos conditions de détention seront rendues encore plus difficile, du seul fait d’avoir refusé ces injustices. Par ailleurs, nous avons besoin que des mobilisations fortes appuient nos mouvements, car l’administration sait qu’elle a les moyens de nous faire taire, en chargeant nos dossiers en vue de nos procès à venir ou en refusant nos aménagements de peine.
 
 
Mobilisons-nous, à l’intérieur comme à l’extérieur des prisons. Construisons une vraie force contre la répression en bloquant et en perturbant les institutions répressives et les politiques sécuritaires. Brisons le silence de la prison, et brisons les chaînes qu’elle nous impose. Liberté pour toutes et tous.