"Nous, on ne "mate"pas…" en porte à porte, discussion sur l'univers carcéral (1)

Hier après midi, porte à porte dans Rebreuve-Ranchicourt. Pas facile mais ça avait commencé sur les chapeaux de roues. On avait sonné à la première porte où on a discuté pendant un très long moment. C’était passionnant. On a demandé un objet. Et comment on en est venu, de fil en aiguille, à parler de ça ? Culture, vie ici, passions, métier, travail….
Cette dame et ce monsieur si accueillants ont travaillé – travaillent encore – toute leurs carrières, dans des maisons d’arrêt. A toutes sortes de places, de la surveillance à la direction.
Vous êtes maton ?
Non, on dit pas maton. Nous, on ne « mate » pas…

On arrive avec nos petits bagages d’a priori, même si on sait qu’ils n’ont pas lieu d’être, et on accepte de les revoir bien vite, ces a priori, face à l’enthousiasme avec lequel ils nous parlent de leurs métier. On a parlé longuement de la misère sociale, de la violence sociale qui pousse les gens en prison. Que la violence en prison, ou qui a conduit les personnes en prison n’est que le reflet d’une violence sociale qui s’acharne sur les plus pauvres, qui sont toujours de plus en plus pauvres, qui ne voient pas d’autre issue. La dame nous dit qu’elle a connu parfois trois générations de la même famille, passant, les uns après les autres, à la maison d’arrêt. Pas d’issue. Le Monsieur nous dit qu’il y a peu d’évasion parce que les gens manquent tellement d’argent qu’une évasion ne servirait à rien. Que même pour s’évader, il faut être riche. On a parlé du fonctionnement interne de la prison, du travail – qui concrètement, au quotidien, est plus proche de l’assistante sociale que du flics… même si, précisent-ils, ils sont gradés comme dans la police et dépendent du ministère de l’intérieur. Un travail qui consiste autant à suivre les détenus, à être là à chaque étape. On a parlé du fait que la prison est un univers à part entière, une grosse entreprise qui comprend des centaines et des centaines de personnes (il emploie de préférence le mot « personnes », plutôt que « détenus »…) et que ça représente une logistique énorme, à cheval entre vie quotidienne, arcanes de la justice, nécessité de faire de la prévention, et puis sévir aussi, parce que même au sein de la prison, la justice doit s’appliquer. Que ce n’est pas une zone de non-droit… On a parlé aussi de politique, des volontés politiques appliquées au quotidien de l’univers carcéral.

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