On arrive dans une grande ferme, Chaussée Brunehaut. C’était une ancienne brasserie. Maintenant c’est un gîte qui s’appelle « Holiday-home », mais Benoît Martinage nous explique qu’ici, tout est resté dans son jus.
FERFAY & AVESNES
Benoit : Ma mère était originaire de Ferfay. Elle est née à Ferfay, mais pas ici dans la ferme : elle est née dans une autre ferme à 150 mètres d’ici. Ma grand-mère arrivait de la région du secteur de Montreuil-sur-Mer. Mes grands-parents sont venus ici dans cette bâtisse, à la fin de la guerre parce que ma grand-mère cherchait une ferme un peu plus grande et le propriétaire tenait à ce que ce soit elle qui l’achète. Je ne sais pas pour quelle raison, mais voilà. Et la ferme est restée dans son jus. C’était une brasserie. Il n’y a pas eu de transformation, la maison est toujours restée dans le contexte de l’époque… Moi j’ai vécu ici : enfin on y venait passer nos vacances, c’était notre colonie à nous. Quand vous êtes petits vous avez un parc derrière, c’était énorme, on passait nos journée dehors, on s’inventait des jeux. Et je suis parti d’ici j’avais 18 ou 20 ans, je ne suis plus revenu : les études, puis je suis parti à l’étranger. Moi je suis du sud du département du Nord, dans la région du Val Joli, entre Avesnes et Maubeuge
Justine (de Culture commune) : Je viens de là, moi ! J’ai vécu 10 ans à Avesnes.
Benoît : C’est quel nom ?
Justine : Trichot.
Benoît : Avesnes-sur-Helpe. Mes parents ça fait plus de 60 ans qu’sont là-bas. Ils ont peut-être eu l’occasion de se croiser. C’était quel village exactement ?
Justine : On a vécu à Avesnes-sur-Helpe. Et puis là à Bas-Lieu.
Benoît : Bas-Lieu ? C’est pas en allant plus sur…
Justine : … sur la route nationale en sortant d’Avesnes, pour aller vers Maubeuge.
Benoît : Ah ben, Bas-Lieu oui, c’est… avant Les Trois Pavés ?
Justine : Oui ! C’est ça ! Avant Les Trois Pavés !
Benoît : Ah, peut-être ils se sont croisés.
Justine : Ah ben c’est pas impossible.
Benoît : Des fois, à l’autre bout du monde, on rencontre des gens. (De Ferfay à Avesnes, on parle de bout du monde.) Mais une fois, ça m’est arrivé en Afrique. J’ai rencontré une dame qui ne connaissait qu’un seul village dans le Nord, c’était le mien. Et qu’elle ne connaissait qu’une seule personne, c’est quelqu’un que je connaissais aussi.
FERFAY & CHARLEVILLE
Benoît : Pour revenir à Ferfay…. Je suis revenu ici il y a 7 ans, après avoir vécu dans les Ardennes, à Charleville, le pays de Rimbaud. Le lavoir, là où il a écrit le Bateau Ivre, il y a beaucoup de voiture qui sont rentrées dedans, il est tout esquinté, il a plus grand-chose de l’origine. Ah, mais bon, les gens disent c’est là qu’il a écrit. Mais le lavoir, il n’a plus grand-chose d’origine.
LA BRASSERIE & L’HISTOIRE
Benoît : Pour revenir à Ferfay…. Ici, c’était une brasserie. A Ferfay, il y avait une dizaine de cafés. D’ici, pour aller vers le terril, il y en avait au moins trois ou quatre. Ici, c’était un café. Donc il fallait abreuver tout ce monde là. C’était pas des bières comme maintenant, lyophilisées qui pouvaient se conserver. Non, c’était des bières qui se consommaient tout de suite. C’était livré à cheval, donc le rayon d’action il n’était pas non plus grand grand. C’était 7 ou 8 km. À Lillers, il y en avait une autre de brasserie. Ça devait bien tourner. Ça a tourné jusqu’au début de la seconde guerre, parce que les allemands, quand ils sont arrivés, ils ont piqué tout le matériel qu’il y avait dans la brasserie. Ils ont récupérés tout ce qui était fer et cuivre. Donc, il n’y avait plus de matériel pour faire la bière. Certaines brasseries ont eu de la chance parce que les allemands ne sont pas passés par là et n’ont pas pris le matériel. Ici c’était une base pour l’état-major. Ils n’allaient pas prendre les petites baraques pour l’état-major.
À la fin de la guerre ma grand-mère a acheté cette maison. Et il y a 20 ans, quand elle est décédée, on s’est demandé ce qu’on allait en faire. On s’est dit d’abord, on fait un peu de rénovation, ça protège le bâti, on verra par la suite. On s’est dit (après avoir fait un peu de location) qu’on allait en faire un gîte, même si ça paraissait un peu fou. Parce qu’on parlait pas du tourisme comme maintenant. Y avait pas d’internet. Mais l’internet a permis de faire beaucoup de chose dans le tourisme. À peine mis sur internet… le premier touriste est venu à la fin de la première semaine. Les gens viennent d’un peu partout. Depuis le Brexit, il y a moins d’Anglais, mais il y a d’autres gens : les gens qui transitent, mais aussi des gens du coin, quand il y a de la famille qui vient en visite.
GÎTE & MAISON DE FAMILLE.
Benoît : C’est un concours de circonstance que je revienne à Ferfay, et mon travail me le permettait. Et maintenant, pour ma famille aussi, ce gîte c’est une maison de famille. Et je découvre ma région, je vais voir les choses moi-même, pour conseiller les touristes. Et je vois des choses que les gens du coin ne vont pas voir ou dénigrent.