Journal de bord // Jour 4

« 10h30, au Sat Marron du théâtre du Grand Marché.

Trois jours de journal de bord à rattraper, c’est parti.

Le jour 4 est un Vendredi. Suite à un manque accumulé de sommeil et une première fêtée un peu tard, la journée est principalement consacrée au repos. J’écris le matin, je vais acheter des cartes de l’île pour préparer la semaine suivante, on mange ensemble le midi, la barquette quotidienne. Après le déjeuner je tente de prendre des rendez-vous avec les personnes de l’équipe du théâtre et notamment avec Mireille qui se charge de l’entretien de locaux (elle fait un peu tout nous dit elle le premier jour). Cette prise de rendez-vous est un vrai jeu du chat et de la souris puis une grande joute verbale qui va durer trente minutes : elle ne voit pas l’intérêt de ma démarche, moi j’ai juste envie de la rencontrer, mais ça semble intrusif, tout ça ne semble pas vraiment désintéressé. Elle argumente, je contre-argumente, j’abandonne, elle dit qu’elle réfléchit et finalement disparaît. Il ne reste plus qu’à attendre la semaine prochaine pour connaître la décision finale. Claude, Tamia et Kathy acceptent de passer du temps ensemble, d’aller se promener. Fabrice préférera que l’on reste au théâtre pour parler du lieu mais pas de lui. Juliette va réfléchir. Pour Patrick je ne sais pas trop, pour le moment il accueille « Eperlecques », alors chaque chose en son temps. Pendant que François fait des emplettes pour son périple sur l’île dès le lendemain je me repose encore un peu puis prépare la représentation du soir (repassage, nettoyage des transparents, respiration abdominale/panique/respiration abdominale, etc.).

Une heure avant le début du spectacle, François passe me voir et me dit : « on a un petit problème ». C’est le Black Friday aujourd’hui (on ne commentera pas ici la dimension capitaliste et l’aspect anti-écologique) et pour l’occasion des groupes de jazz se sont installés dans toute la rue du marché. Ils ont l’autorisation de la mairie alors on devra faire avec. On ferme les portes du théâtre pour tester la gêne, je dit qu’on les entend à peine, on leur demande de ne pas trop s’emporter entre 20h et 21h, c’est accepté, Mike les connait. (Finalement, on ne les entendra pas pendant la première partie puis leur présence se fera grandissante au cours de la seconde alors je parlerai plus fort !). 

Pendant la représentation, François et moi faisons quelques petits couacs mais de ceux dont les spectateurs.trices ne se rendent pas compte : « C’est parce que vous vous le savez mais nous on a rien vu ! ». Un peu plus de gens ce soir. Et plus de lycéen.ne.s. Au départ, l’énergie du public est à son comble. Pendant mon introduction je dis « bonsoir » et ça crie « bonsoir » en réponse. Je dis « merci » et on me répond « de rien » en chœur avant même que j’ai pu donner la raison de mon merci. Les rires sont francs et bruyants pendant la première partie, je garde mon sérieux mais pas sans difficulté. Et puis, pendant la seconde partie, l’écoute devient silencieuse, palpable. On me rapportera que presque tout un rang de lycéen.ne.s pleure au moment le plus triste. C’est très différent de la veille et tout aussi intense. Ce soir on organise un bord plateau, je propose vingt minutes maximum (parce que quand même j’ai déjà parlé et le public a dû écouter pendant une heure déjà !). La discussion est passionnante, les questions fusent. Avec un groupe de lycéen.ne.s on parle de militantisme et ensemble on se dit qu’il est bon et utile de lutter conte les dominations, ça fait un bien fou. Je propose à un professeur (qui vient d’ailleurs de tout près d’Eperlecques) de revenir voir sa classe vendredi tant cet échange m’a touché. Un autre lycéen seul vient me voir pendant que je range mes affaires et me demande si je ne trouve pas que les féministes sont parfois trop agressives envers les hommes blancs hétérosexuels. Gentiment je lui fait part de mon point de vue : à mon avis l’agressivité peut être l’un des nombreux outils pour se battre contre les injustices. On se quitte pensifs.

Les spectateurs.trices à la sortie boivent un verre, on discute (ou plus précisément ici : on cause). En continuant à questionner sur ce que je pourrais faire de mon week-end, on me propose de me guider samedi à Saint-Paul et on m’invite à un brunch le dimanche. J’accepte tout, évidemment. On finit tardivement et bien joyeux, un soir de plus. »

Une réflexion sur « Journal de bord // Jour 4 »

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