Clément Rosset, Faits Divers

Est-ce que la joie peut s’acquérir ? Est-ce qu’on peut travailler à sa propre joie ? Est-ce que c’est quelque chose qui est un don ou est-ce que je peux me disposer intérieurement à la joie ? Il y a sans doute quelque chose comme un entretien, un savoir-vivre, pas le savoir-vivre au sens habituel qui consiste à savoir en user avec ses semblables, mais le savoir-vivre qui consiste à savoir en user avec soi-même. De même que toute chose précieuse dans un musée s’entretient, la joie s’entretient : nous sommes les conservateurs de nous-mêmes. Rien n’est possible sans « l’assistance extraordinaire » de la joie, comme dirait Pascal, mais quand on bénéficie de cette assistance, il n’est pas mauvais de l’entretenir. Le mystique dit que si on ne connaît pas la joie, c’est qu’on ne connaît pas le réel car le réel est joie. La réalité dont parle le mystique est inconcevable. Elle est d’ordre transcendantal. La joie pour le mystique mène à des états extrêmes, à l’extase, à l’illumination pour les « bouddhistes », par exemple. Elle est réconciliation de l’individu avec quelque chose qui le dépasse complétement. Pour le non-mystique, elle n’est pas continente ; cette réconciliation avec le réel, cette fulgurance du réel, c’est quelque chose qui constitue une extase concrète. Un orgasme. Un éclat de rires. Un éblouissement. Une victoire sur soi-même. Même si (mystique ou non-mystique) on ne sait pas de quelle réalité on parle, réalité qu’on a peine à concevoir et à définir.

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