On a rencontré monsieur Lempicki, qui tient, avec sa femme, le débit de tabac, le commerce résistant de la cité des cheminots.
C’était une agréable rencontre. On se dit, en sortant, que Monsieur Lempicki fait partie de ces gens qui rendent les a-priori impossibles. Un homme-surprises : flic à la retraite, gauchiste convaincu, qui tient un bureau de tabac, qui peint – ou plutôt barbouille, comme il dit lui-même – et joue dans un groupe de rock-blues-boogie.
On a parlé du quartier, de la disparition des syndicats, de la lourdeur du poids du passé dans la région, et en même temps de l’attachement qu’on peut avoir à un territoire qui a autant d’histoire. On a parlé de la TV et puis de la grande distribution, de la pub, qui tuent la vie collective, la solidarité. On se dit que c’est aussi un choix d’en haut, de tuer la solidarité entre les travailleurs, de faire disparaître la classe ouvrière alors qu’elle est encore là… Elle a changé de nom, elle a été morcelée, divisée, mais elle est encore là.