Hier, au détour d’une promenade curieuse dans les veines de Carvin, nous avons pris un chemin qui monte — pas celui des grands discours, mais celui des marches, des pas, de l’effort partagé, du souffle coupé. Sans nos bâtons de pèlerins mais avec l’envie d’aller voir plus haut, nous étions là : Alex, Camille, Dorine, Greg, Martin, Philippe, Béatrice… et moi, le cœur déjà un peu perché. Béatrice, gardienne de l’association, nous ouvre les portes de pierre comme on entrouvre un secret ancien. Et alors, c’est parti. 163 marches. Pas à pas, palier par palier, vingt mètres d’abord, l’intérieur de la tour comme un ventre de silence. Puis une première terrasse, et là… la charpente se déploie comme un vaisseau de bois, solide et fragile à la fois, souffle de siècles au-dessus de nos têtes. Et puis soudain, Camille. Camille qui danse. Là-haut, suspendue à une trentaine de mètres, dans le vent léger qui caresse les pierres, dans ce moment rare où le ciel se fait complice, elle danse, comme une prière sans mots, comme si le clocher battait au rythme de ses pas. Mais le périple ne s’arrête pas là. Ici, un pigeon qui couve dans son nid de paix. Là, le nid vide du faucon pèlerin, noble et farouche, qu’on salue du regard, sans troubler sa hauteur. Et puis encore plus haut — oui, plus haut — au-delà d’une échelle grinçante et d’une horloge asthmatique, essoufflée de temps, haletante, nous atteignons le dernier souffle : la chambre des cloches. Alors… redescendre. Comme on referme un rêve. Et soudain, 16 heures. Les cloches parlent. Le temps revient. Mais la journée ne s’éteint pas. Car voici Richard. Richard à l’orgue, de Bach au swing, de la nef au plafond, il fait danser les notes de nos têtes à nos pieds. Un instant d’éternité entre les tuyaux et les vibrations. Carvin, hier, nous a pris par la main. Et nous a montré que le ciel, parfois, commence à 163 marches.