Quelle journée que celle d’hier! Mais on a fini en beauté avec la compagnie Porte 27 à la Fabrique. On a répété jusque dans la soirée. Ça travaille dur. Les propositions sont très intéressantes. Après une série de résidences en France et en Palestine, où ils ont travaillé, discuté, réfléchi, co-construit des spectacles avec les gens dans les prisons, dans les camps de migrants, dans des hôpitaux, ils abordent aujourd’hui la dernière partie de leur projet Issue 01 qui consiste à faire un spectacle qui peu ou prou raconterait ce qu’ils ont vécu, éprouvé au cours de plus d’une année de rencontres et de voyages. On a donc fini tard. Ramené Maggie à Bruay. La journée avait commencé par un travail à la table sur les Atomics. Et puis une réunion au café du briquet à Loos. Puis un rendez vous à Lille. Dans un café où je n’étais jamais allé. Très chic. Une ancienne bonneterie transformée en bistrot branché. Rendez vous où on prend le temps de parler de ce qu’on fait et de notre envie par l’art et la culture de faire bouger, de réenchanter le monde. On se passionne, on parle théorie, politique, philosophie, action artistique, partage de savoir faire. On cite Le dépaysement de Jean Christophe Bailly. On dit que nos Veillées, c’est tomber amoureux de chaque ville où on intervient. On dit que ce qu’on vient de vivre au centre social d’Haubourdin est fondamental et magique. Sur un plan artistique et humain. Et puis boum… Une phrase qui fait tomber la conversation comme une pâte à crêpe. Une phrase couperet, comme quoi ce qu’on fait… enfin… si on prétend toujours demander des subventions…faut faire des spectacles sur des vrais plateaux …les décideurs s’impatientent… Une phrase qui vous file un bon mal de gorge. Qui vous coupe la chique. Tourner sept fois sa langue dans sa bouche avant de parler. Je me suis senti ridicule. J’ai rangé mes livres, mes cahiers, mes références, mes Annie Ernaux, Luc et Christian Boltanski, Paul Ardenne et Jean Christophe Bailly et j’ai quitté Lille, son café chic et mes hôtes. Brouillard épais sur toute la route jusqu’à Loos. J’ai demandé à Maggie de prévenir les jeunes acrobates de Porte 27 que j’avais pris un peu de retard.