Frantz a travaillé hier et avant hier sur le décor de Atomics. Dans le froid de la salle HVDZ, à la fabrique. Les chauffages dans les deux petits studios ne marchent plus. Dès qu’on veut les augmenter, ils se mettent en mode sécurité et s’éteignent. Pour les répétitions on avait ramené des petits chauffages d’appoint. Si on avait répété dans la nef, le studio central de la fabrique, on aurait eu chaud puis que là, le chauffage marche bien. C’est très difficile de chauffer une friche industrielle. Les volumes sont vastes et ils ne sont pas isolés, ni du froid, ni du bruit. On dit souvent, c’est la Fabrique! C’est à dire que ça fait partie du jeu. Des règles du jeu. Tu ne viens pas répéter là comme ailleurs. Sinon, comment dire… tu ne viens pas. J’ai toujours pensé qu’on ne pouvait pas faire du théâtre là comme ailleurs. Ce lieu est tellement chargé d’histoire. Je veux dire en terme de spectacles , de travail, tu ne peux pas travailler là sur la durée et ne pas prendre en compte l’histoire de ce lieu, le monde du travail et l’environnement social, politique, écologique et climatique. Où alors c’est un comble , tu recrées une tour d’ivoire artistique dans une friche industrielle. Ce serait cynique. L’écrivaine Annie Ernaux disait: je suis passé du milieu populaire aux mondes des Lettres, j’ai glissé dans cette moitié du monde pour laquelle l’autre n’est qu’un décor. Au 11/19, c’est pas possible, difficilement envisageable quand on y est comme nous installés depuis des années. Et tu sais quoi? C’est au 11/19 qu’on a retrouvé du sens à ce qu’on faisait. Faut pas l’oublier. C’est fondamental. C’est le 11/19 qui nous a permis de tenir, de vivre… Sans ça qui peut dire où je serais… Faut savoir que je viens de la cité 3 de Ferfay. Une ancienne cité, des corons complètement abandonnés au milieu des champs dans les collines de l’Artois. Passé de la cité 3 de Ferfay au monde de l’art, c’est cliniquement indépassable. Sauf à avoir la chance comme moi d’être retombé sur mes pattes en étant au 11/19. Frantz a réalisé un cadre pour qu’on puisse poser dessus le grand écran du fond de scène. Il a installé des petits gradins pour qu’on puisse accueillir environ trente à quarante spectateurs tous les soirs de représentation. Il dit, ça fera une belle petite salle de spectacle pour la suite…Le journal du 11/19 sort début janvier. On fera le tour du quartier pour le donner aux gens.