« Quelle claque ! » dit Guy Alloucherie.
C’est La maison de la force d’Angelica Liddell, texte et création hors normes par sa performance, son engagement, qui lui donne aujourd’hui l’envie de revenir au spectacle et au spectaculaire.

Il convie ici à nouveau, comme dans Les Sublimes ou Base 11/19, le cirque, la danse, le théâtre pour composer une pièce à plusieurs voix, où chacun des interprètes (dix femmes, deux hommes) donne, par ses propositions, avec ce qu’il est, chair et corps au spectacle.

Le sujet du spectacle n’est pas une histoire, c’est plutôt une exploration de soi ; comment aller au bout de soi, physiquement, moralement, pour offrir au plateau le mouvement le plus intérieur, une manière ultime, radicale, d’exprimer ressentis et sentiments, de parler de mort, d’amour, de vie ; comment sublimer l’engagement, l’abandon…

« La force la plus grande est un profond désir » dit Guy Alloucherie qui n’en a pas fini d’essayer, de chercher, de creuser.
Dans un décor familier de briques et de charbon, transgressifs accessoires de jeu, il met aussi, à sa façon, l’humain à rude épreuve.

Suivez les répétitions en consultant le blog de la compagnie.

L’acrobatie, la danse comme une manière de faire front (un entraînement au combat). Le corps comme le prolongement d’une idée. Le corps comme une autre idée. Le corps mobilisé tout entier…Les acrobates, les danseurs, les comédiens tiennent tête, accusent les coups. Allier le corps, le geste à la parole, comme une recherche d’authenticité ou de vérité.

« Tirez-vous donc de vous même! Quel noeud gordien que notre rêverie! L’esclavage du dedans, c’est là l’esclavage. Escaladez-moi cette enceinte: songer! Sortez, si vous pouvez, de cette prison : aimez! L’unique cachot est celui qui mure la conscience. » Victor Hugo

J’ai l’intention de créer un autre spectacle en début de saison 2013/2014. Un spectacle dans l’esprit des Sublimes et de Base 11/19. J’y mettrai cette fois des briques et du charbon. L’idée de ce spectacle est de renouer avec une certaine forme de théâtre de plateau que nous avions abandonnée depuis quelques années au profit d’un travail de terrain long et approfondi que nous avons mené durant de nombreuses saisons. Même si nous n’avons jamais raté l’opportunité de quelques séminaires de recherche menés en laboratoire au 11/19, à Culture Commune. L’année dernière nous avons ainsi pu consacrer plusieurs jours à un travail de création en improvisation autour du corps et de la matière (des briques). Nous n’avions pas encore l’idée du charbon qui m’est apparue comme une soudaine injonction quand j’ai vu dernièrement le spectacle d’Angelica Liddell à Strasbourg. Quelle claque ! Quel anéantissement ! Combien je lui suis reconnaissant qu’on puisse montrer ça (ce spectacle là, La maison de la force) au théâtre. Conjugué à ce que nous, nous travaillons dans nos labos, j’ai tout de suite su qu’il fallait retourner au plateau (au plus vite, après la fin des Atomics) que j’ai trop longtemps déserté. Est ce qu’on était à ce point en désaccord avec tout ce qu’on peut tirer d’un plateau de théâtre qu’on ne pouvait plus imaginer que Veillées, Portraits, Instantanées, Retour sur… Du travail de co-construction avec les publics?

« Auras tu le courage d’être jusqu’au bout la poésie qui te concerne? » Joë Bousquet

L’idée de ce spectacle est de revenir à une forme de spectaculaire (cirque, danse, théâtre) créée à partir des propositions des différents interprètes qui composeront la distribution. Le sujet, si on peut parler aujourd’hui du sujet quand le spectacle prendra corps au fur et à mesure des répétitions, un spectacle comme une offrande profane, afin qu’au désir et à la joie, à l’espérance et à la mélancolie, à l’agression et à la rédemption, à l’hystérie et à la tendresse, au spleen et à l’euphorie, à la panique et à la nostalgie soit apporté cet abandon et qu’ils y trouvent l’accueil dont ils ont besoin publiquement (Heiner Müller in Le théâtre dansé). La mort, l’amour, la douleur, l’épuisement physique et moral, l’engagement, le rôle de l’artiste dans la société, le body art…

« Insatiable, je m’accroche à notre vie car il n’y a qu’une seule chose au monde qui ne s’épuise jamais » Pier Paolo Pasolini

L’idée m’est venue quand je me suis dit que la brique, ça représentait beaucoup dans le bassin minier du Pas de Calais. D’au si loin que me revienne l’ombre de mes amours anciennes, il y a toujours une brique dans le paysage (et du charbon). Donc voilà, on va appeler ce travail là, les Briques et le Charbon. Après Base 11/19, les Sublimes, les Veillées, les Instantanés, les Portraits, les Atomics… sans oublier les spectacles que j’ai faits quand j’étais tout jeune à l’église de Ferfay (qui n’était pas en briques) au cours desquels on écoutait de la musique psychédélique tandis que l’abbé Olive nous distribuait des dragées.

Aimer si fort...

Je me souviens quand j’étais petit dans le coron à Ferfay, tout était en brique. Partout. Il y avait même une briqueterie mais je ne l’ai pas connue… Et un jour j’ai laissé tomber une brique sur la tête d’un camarade, Jannick Merlin que j’ai revu il y a quelques années (il s’en est remis) à l’Abattoir, au café de l’Abattoir à Lillers. Léo Ferré était venu au café de l’Abattoir à Lillers…

« Ni gris ni vert, comme à Ostende et comme partout quand sur la ville tombe la pluie et qu’on se demande si c’est utile et puis surtout si ça vaut le coup de vivre sa vie… »

La force la plus grande est un profond désir. Faire naître le mouvement de l’intérieur des interprètes. Laisser émerger le mouvement, dont il faut découvrir l’origine en soi-même. Créer à partir de l’observation. Exhiber les coutures, les accrocs, et les nouveaux rites qui permettent de supporter la perte de nos croyances.

Faire appel à tout ce qui fait que nous sommes qui nous sommes. Faire jouer les paradoxes. S’amuser des paradoxes. Cirque, danse, théâtre, vidéo. Du terrain, de l’action artistique et culturelle aux délires (délices) du plateau qu’on avait fini par ressentir comme une authentique usure-passion. Prendre la parole pour continuer à raconter tout ce qu’on nous a confié depuis qu’on fait du partage, de la rencontre et de la transmission, la colonne vertébrale de notre recherche et l’accomplissement de notre travail. Quête sans cesse renouvelée et approfondie. Mélanger tous nos ingrédients. Politique, psychanalyse, recherche esthétique. Comme un miroir du monde dans lequel on vit. Un miroir du monde tel qu’on le vit.

Interprètes de tous bords (comédiens, danseurs, acrobates). Un maelström. Une confusion de l’esprit. Tout donner. Aller jusqu’au bout du souffle. Un cri. Un appel à l’aide. Qu’on nous sorte de là. On a touché à tout. On n’a pas trouvé de solutions…

Nil est in intellectu quod non fuerit prius in sensu.

Si on revient aux temps divers de notre parcours (du Ballatum à HVDZ 2012), rien qui ne fut intellectualisé avant d’être éprouvé. Au final on se dit qu’on aura tout essayé. Avec l’envie folle d’en découdre à nouveau. Avec les mots, les images, les danses, les acrobaties et… les briques et le charbon. Notre manière à nous de faire du théâtre populaire. Persuadé qu’on en saura davantage ou du moins qu’on n’aura pas manqué de chercher de nouvelles combinaisons, de tenter de nouvelles épreuves pour… comprendre. Et transmettre.
Guy Alloucherie – 08 mai 2012

Vidéos

Equipe de création :
Mise en scène, scénographie – Guy Alloucherie
Chorégraphie – Howard Richard
Images – Jérémie Bernaert
Création son – Martine Cendre
Dramaturgie – Didier Cousin, Martine Cendre
Lumières – Pierre Staigre
Administration & production – Maggie Delèglise, Gilbert Pouille
Diffusion – Jenny Bernardi

Avec :
Karine About,
Mathilde Arsenault-Van Volsem,
Camille Blanc,
Céline Dély,
Nadia Ghadanfar,
Marion Hergas,
Clémentine Lamouret,
Dorothée Lamy,
Anthony Lefebvre,
Ricahrd Pauliac
Sophia Perez

 


Une production de la compagnie HVDZ en coproduction avec :
L’Hippodrome – Scène nationale de Douai
Culture Commune – Scène nationale du bassin minier du Pas-de-Calais
Le Théâtre – Scène nationale de Saint-Nazaire
Le Bateau-Feu – Scène nationale de Dunkerque

Avec le soutien de
la DRAC Nord Pas-de-Calais,
du Conseil Régional Nord Pas-de-Calais
et du Conseil Général du Pas-de-Calais